Guy Argiolas, comédien à Grasse : « Jouer sur scène m’apporte beaucoup de plaisir »
« Juste différent »
« Je ne me considère pas comme une personne en situation de handicap. Je suis juste différent. Je n’y pense même plus. Je fais mon petit bonhomme de chemin. C’est comme si on me demandait si ça me gênait de ne pas avoir les yeux bleus. Sans le fauteuil, je ne serais pas le même. Ça nous rend peut-être un peu plus tolérants, plus ouverts »,
Depuis deux ans, Guy Argiolas, 60 ans, joue dans La Boîte à rêves. Une pièce écrite par Marie-Josée Luxi en collaboration avec treize résidents du foyer Malbosc, à Grasse. Un établissement géré par l’Association départementale des parents et amis de personnes handicapées mentales (Adapei) que Guy, atteint de poliomyélite et d’un retard mental, fréquente depuis l’âge de 17 ans.
Au sein de la troupe de théâtre Louma, née il y a 10 ans, à raison de deux répétitions par semaine, Guy a appris bien plus qu’un texte ou qu’un rôle. Concentration, mémorisation, élocution, prononciation, dépassement de son inhibition…
Dans La Boîte à rêves, la dernière création de la troupe, jouée pour la dernière fois à la salle Léo-Lagrange de Mouans-Sartoux en novembre, les comédiens incarnent des villageois en pleine préparation de leur fête de l’été. A cette occasion, chaque personnage raconte ce qu’il aurait aimé faire ou être.
Sur scène, à la fin de la pièce, Guy est coiffé d’une perruque de cheveux bruns au brushing impeccable pour incarner Thierry Le Luron, son idole.
« J’aurais aimé être imitateur »
« Si je n’avais pas été handicapé, j’aurais été imitateur. Depuis que je suis tout petit, je suis fan de Thierry Le Luron. Pour moi, c’est le plus grand », indique-t-il avant de se lancer dans une imitation convaincante de Jacques Chirac, Giscard d’Estaing ou encore Georges Marchais.
Son répertoire ne se limite pas aux hommes politiques. Dans les jardins du château de Malbosc où il réside, entouré de ses camarades comédiens, il enchaîne sur quelques titres de chanteurs qui ont marqué son enfance : Enrico Macias, Georges Brassens, Fernandel, qui était aussi acteur. « Un acteur que j’ai toujours aimé, alors c’était facile de jouer son rôle dans le film où il a un sosie. J’ai joué aussi toutes les pièces de Pagnol », notamment le rôle de Panisse dans Marius.
Des rôles que le sexagénaire, originaire de Juan-les-Pins, interprète depuis son fauteuil roulant. La troupe aimerait pouvoir se produire dans davantage de lieux, mais les salles de spectacles et les coulisses ne sont pas toujours adaptées aux personnes à mobilité réduite.
« On n’a jamais reçu de tomates »
Guy s’est déjà produit devant un public de deux cents personnes. « Au début, ça m’a fait peur. Quand il y trop de monde, j’ai l’impression d’étouffer. Pour l’instant, on n’a pas reçu de tomates. Le jour où ça arrivera, je me permettrai peutêtre d’en lancer une sur ce monsieur », dit-il en désignant du regard René-Marc Ruffin, chef de service du foyer Malbosc et à l’initiative de la création de troupe Louma. Pour avoir eu cette idée folle ?
« Aujourd’hui, ça m’apporte beaucoup de plaisir de retrouver, dans la salle, certaines personnes venues me voir », sourit celui qui, à 60 ans, n’a malheureusement plus ses parents auprès de lui pour découvrir celui qu’il est devenu.
» Pendant trois ans, il a travaillé à l’élaboration de solutions adaptées pour prévenir le piratage et crypter les données à protéger. Cela a abouti à l’élaboration d’un
« J’aime les challenges »
Ambitieux, combatif, ce spécialiste de l’intelligence économique et du cryptage quantique est intarissable sur le sujet. Une ténacité qui force l’admiration, et qui lui a valu d’être récompensé par le concours de l’Adie (Association pour le droit à l’initiative économique) et de décrocher une aide financière à la création d’entreprise. Sa société, sa fierté. Sa façon de« montrer qu’on peut être une personne en situation de handicap, et un gérant d’entreprise comme les autres. On m’a parfois demandé : “Vous touchez une pension, alors pourquoi vous travaillez ?” Parce que j’ai envie de m’épanouir en tant que personne. J’aime les challenges. J’ai toujours aimé le sport, les défis. C’est mon sport à moi. »