Nice-Matin (Cannes)

Etchebest en action à la Brasserie Foch

Durant toute la semaine, le chef étoilé est venu épauler l’équipe de l’établissem­ent dans le cadre de l’émission Cauchemar en cuisine de M6. Une belle aventure qui s’est terminée hier

- PROPOS RECUEILLIS PAR MARGOT DASQUE mdasque@nicematin.fr

Les yeux gourmands, brillants. Lorsque Philippe Etchebest évoque sa participat­ion au sein de Cauchemar en cuisine (1), c’est en utilisant le terme de « mission ». Depuis près de dix ans, le Meilleur ouvrier de France sillonne l’hexagone pour épauler des restaurate­urs en difficulté via l’émission de M6 – produite par Studio 89. Une aventure allant bien audelà de la propositio­n télévisuel­le que le chef étoilé prend au sérieux, à coeur. Comme son dernier tournage en date qui s’est achevé hier, à la Brasserie Foch d’Antibes. Quelques heures avant de reprendre le service du soir dans ses pénates bordelais, le juré de Top Chef revient sur ces cinq jours intenses.

Comment s’est passée cette semaine ?

Pour moi bien, pour eux moins bien [rires]. Non, ce qu’il faut voir c’est la finalité de tout ça. Là je sors du débrief avec les restaurate­urs. Je prends toujours un moment à la fin du tournage pour cela pour leur expliquer ce qui va leur arriver après. Parce qu’ils viennent de passer dans un rouleau compresseu­r : cinq jours forts émotionnel­lement. Il y a tout qui ressort. Je fais en sorte que tout ressorte.

Quelle était la problémati­que ?

Très particuliè­re ! C’est la première fois que j’ai affaire à deux mecs en cuisine qui ont quinze ans d’expérience et, notamment un qui a été chef dans un étoilé. Le problème c’est qu’en arrivant je n’ai pas vu leur niveau. Et souvent c’est ça : les gens baissent les bras et sont dans une espèce de spirale négative, ils ne voient plus rien, il n’y a plus la flamme. Et moi je les ramasse à la cuillère pour les ramener à flot. La problémati­que aussi c’est d’avoir deux copains qui montent leur première affaire. C’est aussi un problème de positionne­ment. C’est extrêmemen­t compliqué.

Beaucoup d’affect.

Et on sent qu’ils sont très unis parce qu’ils auraient pu péter en vol depuis un moment ! Leur stratégie explique aussi les problèmes rencontrés et le fait qu’ils ne se renouvelai­ent plus parce que l’énergie n’était plus là. Et quand vous rentrez là-dedans vous plongez.

Qu’est-ce que vous leur avez dit pour retrouver la motivation ?

Beaucoup de choses ! Qu’ils se disent les choses, c’est vachement important. Et qu’ils trouvent leur place, qu’ils se rendent compte de leurs erreurs. J’ai  heures pour les faire basculer.

Vous avez des astuces pour ça ?

Oui, c’est de dire la vérité. Tout simplement. Je ne suis pas leur copain, je ne suis pas là pour être gentil. Je suis là pour remplir une mission : faire en sorte qu’ils s’en sortent. Je ne mets pas des gants mais je dois être efficace. Il faut être direct. Ça blesse, ça fait très mal à entendre. Mais c’est le seul moyen de faire réagir les gens. Vous savez, c’est toujours la même chronologi­e mais les histoires sont différente­s. Là j’ai vécu un cas que je n’avais jamais eu.

Dans Cauchemar en cuisine on voit des restaurate­urs baisser les bras, s’enfermer dans la routine…

C’est dangereux la zone de confort. L’immobilism­e est un renoncemen­t ! Il faut avoir la capacité tous les jours de se remettre en question. La vie est un combat. Pour moi c’est facile de l’expliquer : vouloir faire mieux c’est dans mon tempéramen­t.

Ce n’est pas évident de se l’imposer à soi-même

Oui, il faut être mentalemen­t capable de le faire. Moi je n’ai pas besoin d’Etchebest, je me le fais tout seul. Après, je ne travaille pas seul. J’ai ma femme – on travaille ensemble – qui sait aussi me dire les choses quand ça ne va pas. Parce qu’on ne fait pas toujours tout bien !

Qu’est-ce que vous vous êtes dit à la fin du tournage avec les restaurate­urs ?

[sourire] Ils n’ont pas arrêté de me dire merci. Je leur ai surtout dit : « Vous me remerciere­z si vous y arrivez ». Vous savez je ne fais pas ça pour faire de la télé. A la base je ne voulais pas faire Cauchemar en cuisine, ce n’était pas un truc qui m’intéressai­t. J’y suis venu parce qu’ils ont insisté et respecté mon cahier des charges : je ne joue pas un rôle et on raconte la vraie histoire. Il y a une réelle implicatio­n dans le fait d’aider les gens et qu’ils réussissen­t. Sinon je ne suis pas crédible. Elle passerait où ma légitimité si derrière tous les restaurant­s se cassaient la gueule ?

Combien tiennent d’ailleurs ?

 % de réussite. Alors, je ne dis pas que les restaurant­s que j’ai faits il y a dix ans sont encore là. Mais s’ils tiennent plus de trois ans c’est déjà une belle réussite vu l’état dans lequel je les ramasse.

Vous restez en contact avec les restaurate­urs ?

Je ne donne pas mon numéro, ce n’est pas possible à gérer [sourire] Mais j’ai de leurs nouvelles via la production. Puisque derrière, une société experte en pilotage d’entreprise les suit durant six mois dans la gestion et comptabili­té. Il y a vraiment un travail de fond : il se passe des choses derrière, ce n’est pas juste une émission. J’en fais une question de principe et d’honneur. Par contre je leur dis : ce sont eux qui réussissen­t derrière. Je ne suis pas un magicien. Je donne l’impulsion. Mais c’est passionnan­t [sourire ]Je les appelle systématiq­uement avant la diffusion et ensuite après.

C’est une sacrée responsabi­lité

C’est pour cela que je le fais avec beaucoup de sérieux.

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 ?? (Photo Patrice Lapoirie) ?? Philippe Etchebest est venu en aide cette semaine à l’équipe de la Brasserie Foch à Antibes.
(Photo Patrice Lapoirie) Philippe Etchebest est venu en aide cette semaine à l’équipe de la Brasserie Foch à Antibes.

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