« Si l’on attend trop, on aura des syndromes de glissement »
Propriétaire d’un Ehpad familial à Saint-Laurentdu-Var (Les Heures Claires, créé par sa grand-mère), Jean-Charles Pic préside l’association de directeurs d’établissements pour les personnes âgées dans les Alpes-Maritimes. Peu représentative dans le car récente, mais où l’on trouve aussi des résidences autonomie, des foyers-logements et de l’aide à domicile, le tout recouvrant privé, public et associatif.
Quelle est la situation dans vos établissements ?
L’un d’entre eux a un cas positif, un autre en a quatre, mais il n’y a pas eu de flambée. Les établissements qui ont été touchés au début de l’épidémie ont subi, hélas, une propagation plus forte. Aujourd’hui, on la contient mieux. Parce que nous avons plus de matériel et plus de méthode. Raison pour laquelle nous voulons témoigner de notre soutien. Ceux qui sont éprouvés le sont parfois gravement et je considère, effectivement, qu’il y a un facteur chance. Sachant que les Ehpad qui ont de nombreux vacataires ont statistiquement multiplié les facteurs d’entrée du Covid. Or, nous avons du mal à fidéliser le personnel. Et je rappelle qu’il y a un mois, nous n’avions pas de masques. Nous étions nus, face à ce virus que nous ne connaissions pas.
Qu’attendez-vous des tests PCR et sérologiques ?
Nous demandons bien sûr la multiplication de ces tests. Cela ne concernait jusqu’à présent que les établissements qui avaient des cas déclarés. Le dépistage systématique prend du temps à se mettre en place. Ce que nous demandons aujourd’hui, c’est un assouplissement des règles imposées.
Il est urgent de rétablir des visites ?
Rétablir des possibilités de visite pour les familles, mais aussi permettre aux kinés de revenir. Il faut que l’on nous fasse un peu plus confiance pour adapter les mesures en fonction des établissements.
Le « glissement » est à craindre ?
Certains résidents, plutôt valides, comprennent qu’ils doivent faire attention et rester pendant un certain laps de temps dans leur chambre. Le lien est toujours là, grâce au téléphone ou à Skype. Pour des personnes présentant des troubles comportementaux, cela commence à être difficile. Après avoir pris des mesures d’urgence au cours du mois écoulé, on doit en prendre de nouvelles qui permettent de durer. Pour protéger contre le virus, certes, mais pour maintenir aussi l’état de santé des résidents, y compris sur le plan psychologique.
La santé passe aussi par le contact avec les familles ?
Si l’on attend trop longtemps, on subira des syndromes de glissement irréversibles. Des gens qui baissent les bras et se laissent mourir, on n’en a pas encore. Mais si la situation continue, les dégâts psychologiques seront importants. Pour l’instant, nous avons des signaux qui incitent les psychologues, dont l’intervention a été renforcée, à attirer l’attention. Ce sont des personnes qui, auparavant, avaient l’habitude de déambuler et qui, maintenant, ne marchent plus beaucoup. Ce peut être quelqu’un qui commence à exprimer des idées noires ou a besoin d’un peu plus d’assistance pour prendre ses repas. Il faut rappeler que dans un Ehpad, les résidents ont, en moyenne, ans et huit pathologies différentes.