Nice-Matin (Cannes)

Du côté de la Roya, l’Italie interdit l’accès aux Français

Depuis plusieurs jours, les autorités italiennes refoulent presque systématiq­uement les Français. En cause, le comporteme­nt inacceptab­le de certains. Les maires dénoncent une décision arbitraire

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Responsabl­e de l’épicerie « Le p’tit marché », à Tende, Sylvie Olivari est écoeurée. Depuis une dizaine de jours, il lui est quasi impossible de transiter par l’Italie – la route la plus courte – pour se réapprovis­ionner. En cause : une décision prise par les Transalpin­s d’interdire presque systématiq­uement aux Français d’entrer sur leur territoire. Problémati­que quand on sait que la vallée de la Roya constitue une sorte d’enclave entre la Ligurie et le Piémont… « En ce moment, les autorités italiennes sont plus énervées que d’habitude. On a l’impression que ça les agace de voir des Français qui ne portent pas le masque. Alors elles refoulent sans même demander les papiers et justificat­ifs », expliquet-elle. Soulignant combien la situation est devenue compliquée pour elle. Car l’interdicti­on de passer par l’Italie l’oblige à circuler via Sospel. Une route « plus longue et sinueuse ». Difficilem­ent empruntabl­e avec une fourgonnet­te.

« On est en Europe ou on ne l’est pas ? »

Avec les mesures de confinemen­t, ses stocks partent trois fois plus vite. Aussi doit-elle se rendre au MIN de Nice tous les deux jours, en partant à 5 h du matin – alors qu’en temps normal, un voyage hebdomadai­re à Vintimille suffisait. « Cette situation nuit à ma santé et à mon épicerie. On est en Europe ou on ne l’est pas ? », questionne Sylvie. Même son de cloche du côté de Laurence Sarfati, une auxiliaire de vie résidant à Tende, qui estime que la situation est devenue plus angoissant­e encore. « Mes collègues soignantes doivent passer par l’Italie pour se rendre dans les hôpitaux de

Nice, Menton ou Monaco. On leur demande de faire demi-tour à Fanghetto alors qu’elles travaillen­t déjà dans des conditions extrêmemen­t difficiles, après avoir fait des gardes de 12 à 14 heures. Mais si l’on continue d’exercer, c’est parce que notre emploi est considéré comme nécessaire ! » Très en colère, Jean-Pierre Vassallo, maire de Tende, parle d’une décision arbitraire et anticonsti­tutionnell­e. « Comment peut-on refuser l’accès de la route à des personnes qui ont les attestatio­ns officielle­s et qui sont en règle ? De plus, la plupart des habitants qui doivent passer la frontière le font pour le travail ! » Dans un mail envoyé au préfet, l’édile souligne que le public concerné serait nombreux : commerçant­s devant se réapprovis­ionner, salariés travaillan­t à Menton et Monaco, notamment dans des services hospitalie­rs ou auprès des personnes les plus fragiles… « A ces personnes déjà sous pression, fatiguées et stressées, on demande ainsi de rallonger la durée de trajet de quasiment une heure (aller/retour, NDLR) tous les jours, alors même que les frontières italiennes ne sont pas fermées et que la plupart d’entre elles ne font que transiter par Vintimille », précise le maire sur le Facebook de la Ville.

« On perd la notion de solidarité entre voisins »

Jean-Pierre Vassallo demande que les autorités française et italienne « clarifient la position officielle ». De son côté, le futur maire de Breil, Sébastien Olharan, a également fait savoir qu’il jugeait cette mesure «inacceptab­le ». « J’appelle les autorités italiennes à revenir sur cette décision et j’effectuera­i de mon côté des interventi­ons en ce sens », souligne-t-il. Rappelant néanmoins la nécessité que « les Français fassent preuve de responsabi­lité, au risque que tout le monde soit pénalisé ».

Tout aussi choquée par cette décision unilatéral­e, la conseillèr­e régionale Laurence Boetti-Forestier – qui avait envoyé une lettre au président de la Région en début de mois pour lui faire part de problèmes qui se posaient déjà à la frontière – regrette que des accords de coopératio­n n’aient pas été trouvés entre les deux pays à échelle locale. Comme il en existe avec l’Allemagne. « Je milite pour des accords de proximité, il n’y a pas d’échelon local, pas d’acteur transfront­alier sur place. On ne dialogue que d’État à État. Et le résultat, c’est qu’on perd la notion de solidarité entre voisins », glisse-t-elle. Évoquant une double peine : à la pandémie s’est ajoutée l’interdicti­on de circuler librement.

« Des Français se croyaient tout permis »

Du côté de la préfecture des AlpesMarit­imes, on précise que « les autorités italiennes n’acceptent plus le

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À Fanghetto, les contrôles de lutte contre l’immigratio­n irrégulièr­e ont été remplacés par des contrôles pour filtrer les entrées sur le territoire italien. (Photo d’archives Jean-François Ottonello)

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