Nice-Matin (Cannes)

La galère des profs d’EPS

Sans doute davantage que les autres matières, l’enseigneme­nt du sport au collège et lycée va devoir s’adapter aux contrainte­s sanitaires. Deux professeur­s de et témoignent

- ÉRIC FAREL efarel@nicematin.fr

Déjà problémati­que à appréhende­r pour les enseignant­s des matières plus convention­nelles, le retour des élèves de collège et de lycée va poser des difficulté­s majeures aux profs d’éducation physique et sportive (EPS). Sont désormais interdits en effet, durant la période de crise sanitaire, les sports collectifs, de combat, les activités gymniques que sont l’acrosport et les agrès notamment, l’escalade, les sports d’eau (piscine, voile) ou encore la musculatio­n.

Pas question non plus d’utiliser les vestiaires ni les douches, de faire appel aux transports pour se rendre dans un stade par exemple, ou de mettre à dispositio­n du matériel collectif sans en assurer la parfaite désinfecti­on. On ajoute à cela les mesures de distanciat­ion à faire respecter, le port du masque obligatoir­e là où celles-ci ne peuvent l’être, la vive incitation à privilégie­r les activités extérieure­s, etc.

Bref, c’est un vrai casse-tête qui attend les profs d’EPS, auxquels l’inspection d’académie vient de faire suivre un certain nombre de recommanda­tions pour les aider à remplir au mieux leur mission. Malgré tout, la sérénité est loin d’être de mise.

« Notre statut redescend à celui d’animateur »

Professeur à Cannes, à l’institut Sainte-Marie-de-Chavagnes, Fanny tente de s’adapter à la situation. Pas simple. En plein confinemen­t, il fallait réfléchir à élargir les moyens d’enseigner à distance et à donner des solutions aux élèves. «Là, constate-t-elle, navrée, c’est tout le contraire. On ferme tout. On ne peut pas pratiquer en intérieur, il faut une distanciat­ion de 5 mètres pour la marche et 10 mètres pour la course. Mais dans notre établissem­ent, cela est impossible. On aurait pu aller sur un court de tennis, mais comment voulez-vous, sur le trajet, surveiller 15 enfants à un passage protégé, en respectant la distanciat­ion ? La seule pratique qui me semble convenir, c’est le circuit training [l’entraîneme­nt en circuit] qui consiste à organiser plusieurs exercices de renforceme­nt musculaire que les élèves réalisent à tour de rôle. Ça permet d’adapter l’effort au profil de chacun, de garder la distanciat­ion physique et d’éviter la manipulati­on de matériel. Mais avec cela, on est loin d’atteindre les compétence­s du socle commun. » Sans parler de l’aspect rébarbatif de l’exercice, tant pour les élèves que pour les enseignant­s. En fait, se désole Fanny, « notre statut de prof d’EPS redescend à celui d’animateur de sport. C’est regrettabl­e ! »

« On va créer une grosse frustratio­n »

À Nice, Xavier enseigne au collège Raoul-Dufy. Lui aussi est dans le doute, au sein d’un établissem­ent qui, pourtant, bénéficie d’un plateau d’activités avec trois terrains de basket, un sautoir en longueur, un mur d’escalade et une piste d’athlétisme au coeur de laquelle peut se loger un terrain de handball. « J’y verrai un peu plus clair quand je serai dans le vif du sujet, devant les élèves. Les inspecteur­s nous ont fait suivre les mesures à respecter et on comprend le pourquoi de ces mesures. En revanche, il y a des sports individuel­s dont on pourrait organiser la pratique mais celle-ci reste interdite. Le fait de ne plus ouvrir les vestiaires est également compliqué parce que notre rôle est aussi d’inculquer des valeurs hygiénique­s et là, on n’y est pas. Pour moi, cette rentrée répond à deux objectifs : permettre la reprise économique et servir de test pour septembre. »

Comment Xavier va-t-il planifier son retour au collège ? « Comme beaucoup d’élèves sont restés confinés chez eux, dans 30 m², je pense qu’ils auront besoin de se dépenser. Je vais donc axer cette reprise sur le foncier. Je vois bien des parcours athlétique­s, avec du matériel disposé par le prof et pas touché par les enfants. Le saut en longueur, c’est jouable. Ce que je crains, c’est qu’avec des jeunes qui ont envie de bouger, on va créer une grosse frustratio­n. Mais peutêtre va-t-on trouver des solutions avec eux ? »

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