Nice-Matin (Cannes)

« Jamais je n’aurais cru que j’irais demander un bout de pain »

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Annie vend des produits d’artisanat sur les marchés. Le 16 mars, l’activité de cette commerçant­e s’est arrêtée net. « C’est simple, j’ai un salaire zéro et des dépenses. J’ai tout de suite cherché de l’aide : j’ai appelé la mairie de SaintLaure­nt-du-Var, ils m’ont dirigée vers le Centre Communal d’Action Sociale : ils ont été très gentils. Au bout du fil, l’assistante sociale a fait le point sur ma situation, et elle m’a dit que je n’avais droit à rien, pas d’aide au logement à cause de mes revenus antérieurs. En fait, je ne rentrais dans aucune case. Mais je pouvais prétendre à des colis alimentair­es. »

Alors Annie s’est présentée à Porteur d’Espoir 06. « C’est la première fois de ma vie que je demande de l’aide, mais je le fais sans complexe : cette situation ce n’est pas moi qui l’ai créée, je ne suis pas coupable. »

Elle récupère, une fois par semaine, des pâtes, du sucre… « Je paie 3,50 euros le panier, et ça fait du bien. » Car depuis le mois de mars, la « petite » retraite de son compagnon est engloutie dans le paiement du loyer. « 600 euros par mois, on est locataire de l’OPAM (Côte d’Azur Habitat, ndlr), ça reste un loyer raisonnabl­e en temps normal, mais là...»

« S’ils avaient pu diminuer le loyer, ne serait-ce que de 100 euros, pendant 2-3 mois, ça aurait permis de respirer un peu… »

Annie a pu compter sur sa fille, « elle m’a bien aidée ». Et, pour faire face, la commerçant­e a sollicité l’aide de l’Etat.

« J’ai réagi un peu tardivemen­t, mais ça y est j’ai reçu 1 500 euros, ça nous permet de payer nos frais. Et je vais toucher encore 1 500 euros : heureuseme­nt qu’en France nous avons un bon système social, mais jusqu’à quand l’Etat pourra-til aider ? »

Comment voit-elle l’avenir ? La quinquagén­aire attend la réouvertur­e des marchés dans son secteur d’activité avec hâte, pour gagner sa vie de nouveau. « Je garde le moral : j’ai de la chance car je n’ai pas à payer de loyer pour un magasin, et la marchandis­e que je vends n’est pas périssable. Je ne vis pas seule et je suis même bien accompagné­e. »

« Je suis prête à repartir sur les marchés, mais je sais que ce sera dur, cet été, on n’aura pas la manne touristiqu­e, or c’est pendant cette période que je gagne ce qui me permet de tenir l’hiver où c’est plus calme. »

Alors, elle prépare déjà les prochains mois. « Je mets de côté, quelques paquets de pâtes, pour préparer l’hiver. » « J’en donne aussi un peu à des copines qui ne disent rien, mais qui en ont besoin. Elles n’osent pas aller à l’aide alimentair­e. Moi, je n’aurais jamais cru que j’irais un jour leur demander un bout de pain. Mais c’est comme ça, c’est ponctuel. »

Annie avait plutôt l’habitude d’être de l’autre côté, de ceux qui donnent : « Je fais des conteneurs pour l’Afrique. Là, comme tout est bloqué, j’ai appelé Emmaüs pour qu’ils viennent tout chercher. »

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S’ils avaient pu diminuer un peu le loyer pendant - mois...”

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Annie,  ans, commerçant­e.

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