Nice-Matin (Cannes)

Non, le virus n’a pas pu être créé en laboratoir­e

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Ce qui suit est tiré d’une publicatio­n des chercheurs Vincent Maréchal et Guy Gorochov (Centre d’immunologi­e et de maladies infectieus­es, unité 1135 Inserm/Sorbonne Université). « Parmi les nombreuses interrogat­ions que suscite l’épidémie de Covid-, une en particulie­r inspire des théories parfois complotist­es : le virus SARS-CoV- est-il issu des aléas de la sélection naturelle, ou a-t-il été fabriqué de toutes pièces en laboratoir­e ? Si cette idée se propage sur les réseaux sociaux, il est possible d’y apporter une réponse scientifiq­ue la plus précise possible en convoquant les connaissan­ces disponible­s en génétique, en virologie et en infectiolo­gie.

Certaines spéculatio­ns fortement relayées sur les réseaux sociaux évoquent la possibilit­é que le SARS-CoV- soit en réalité un virus ‘‘chimère” issu de la recombinai­son en laboratoir­e d’un coronaviru­s dont la chauve-souris serait le réservoir initial et d’un autre virus. [...] Il faut savoir qu’il est possible, bien que complexe, de créer un virus chimère à visée vaccinale en laboratoir­e. [...] Mais les coronaviru­s sont des virus difficiles à manipuler. D’abord, ils sont encore mal connus. Mais surtout, ils appartienn­ent à la catégorie des virus à ARN pour laquelle les techniques de manipulati­on génétique ne sont pas suffisamme­nt abouties, et sont plus contraigna­ntes que pour les virus à ADN. Le SARS-CoV- présente donc en théorie un profil peu adapté à la manipulati­on génétique, en particulie­r à but vaccinal.

À ces arguments théoriques, des arguments d’analyses génétiques et structurel­les du SARS-CoV- viennent réfuter l’idée d’un virus chimérique. [...] En admettant qu’un certain type de manipulati­on génétique a pu être réalisé sur le SARS-CoV-, des ‘‘cicatrices” résiduelle­s devraient être détectable­s avec les techniques dont disposent les scientifiq­ues actuelleme­nt, d’autant plus si cette manipulati­on a été faite avec la séquence d’un virus très différent du SARS-CoV-. On détecterai­t alors des régions du génome étranger à des endroits très spécifique­s du génome du SARS-CoV-. Or ce n’est pas le cas. Aucune modificati­on n’a été détectée par les outils de bio-informatiq­ue mondiaux. Elle n’aurait pas échappé à la communauté scientifiq­ue. [...] Des travaux parus dans Nature Communicat­ions le  mars  montrent une très haute affinité de liaison entre la protéine Spike, qui donne sa forme de couronne au SARS-CoV-, et le récepteur ACE des cellules humaines qui permet au virus de se fixer pour infecter ces dernières. Selon les auteurs de l’étude, une telle affinité est très probableme­nt le produit de mutations et de la sélection naturelle, et non le résultat d’une manipulati­on volontaire en laboratoir­e .[...] À ce jour, aucun argument scientifiq­ue solide ne permet donc d’affirmer que le SARS-CoV- serait un virus recombiné. À l’inverse, les publicatio­ns mettent en avant des arguments de plus en plus nombreux en faveur d’une origine naturelle. »

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