Nice-Matin (Cannes)

E-sport : Louis Ducruet vise une médaille olympique

À 27 ans, le nouveau président de la Fédération monégasque de sport virtuel (et joueur invétéré) veut fédérer une équipe compétitiv­e en ouvrant un centre d’entraîneme­nt propice à la détection

- Textes : Thomas MICHEL tmichel@nicematin.fr Photos : Sébastien BOTELLA

Si un secteur ressort encore plus fort de la crise sanitaire, c’est bien celui du jeu vidéo. Un marché économique­ment fructueux dont le confinemen­t a mis en exergue la vitalité, la popularité et la portée. En l’absence de compétitio­ns réelles, nombre d’icônes du sport ont par exemple brillé manette en mains. À commencer par Charles Leclerc.

À Monaco, le confinemen­t a aussi été l’occasion pour le nouveau président de la Fédération monégasque d’e-sport, Louis Ducruet, d’affiner ses ambitions. Au 1er janvier dernier, le fils de la princesse Stéphanie a succédé à Boris Fedoroff, un ancien camarade de classe qui partage sa passion du gaming. Un passage de témoin naturel et réfléchi. « Louis apporte un profil plus internatio­nal dont nous avons besoin pour être reconnus par les organismes supranatio­naux comme la Fédération internatio­nale d’e-sports et d’autres fédération­s, notamment dans le cadre des JO. » Depuis 2017, le sujet n’est plus tabou au Comité internatio­nal olympique (CIO). Un jour, pas avant 2028, des « gamers » reconnus comme athlètes pourraient représente­r leur pays aux JO. « On va s’y préparer dans l’espoir d’envoyer quelques athlètes supplément­aires dans le contingent monégasque, dévoile Louis Ducruet. Il faut encore que le gaming rentre dans les moeurs et les mentalités pour pas qu’il y ait trop d’opposition­s. Mais le CIO est ouvert d’esprit sur ce sujet. »

« Il y aura des pourparler­s »

Avant d’atteindre l’Olympe, et pourquoi pas décrocher une médaille, Monaco va devoir se structurer. Au centre du projet fédéral, la « Gaming House ». Un centre d’entraîneme­nt de 50 m2, en cours d’agencement, sous le Musée océanograp­hique. Un local mitoyen de l’Associatio­n des Jeunes de Monaco voué à devenir l’Académie de l’esport monégasque.

« Notre priorité sera de détecter et sélectionn­er les talents monégasque­s », détaille Louis Ducruet. En cela, l’un des chantiers prioritair­es du président sera de fédérer les deux clubs de la Principaut­é. L’associatio­n Monaco e-Sports Club, présidée par Boris Fedoroff, et le club profession­nel de l’AS Monaco e-Sports, lié au club de foot et non affilié à la Fédération à ce jour. «Iln’yapaseude contact direct récemment mais il y aura des pourparler­s. » L’idée de la Fédération serait d’attribuer à l’associatio­n le rôle de pépinière, de centre de formation, et que l’ASM prenne en mains la carrière des joueurs promus profession­nels. En finir aussi avec une confusion résumée par Boris Fedoroff. « Quand on est arrivé, on est devenu, avec l’aide du président Biancheri, la 22e section officielle de l’AS Monaco omnisports. Du coup, notre nom officiel était AS Monaco e-sports » Sauf que l’AS Monaco de Rybolovlev s’est à son tour lancée dans l’aventure virtuelle et, même si l’associatio­n a été renommée Monaco e-sports Club, la ressemblan­ce des noms et blasons a créé des imbroglios. Les deux équipes monégasque­s, performant­es, s’affrontant même parfois dans des tournois.

Au final, l’associatio­n a subi un coup d’arrêt jusqu’à ne pas engager de profession­nels en compétitio­n cette saison. « Ça a vraiment arrêté notre croissance mais, aujourd’hui, on a des interlocut­eurs plus intelligen­ts et le dialogue a repris », se réjouit Boris Fedoroff, conscient aussi que la licence internatio­nale pour s’aligner sur certains jeux peut se chiffrer en millions d’euros. Impossible pour une associatio­n dont la jeune Fédération affiche un budget prévisionn­el de 50 000 euros. Plus réaliste pour un club ambitieux comme l’AS Monaco, dont le projet e-sport est indissocia­ble de la politique marketing.

Bref, l’union aurait tout pour faire la force.

« Une associatio­n ouverte à tous »

Avant toute gloire, le projet du président Ducruet est de créer une communauté, des interactio­ns qui dépassent les écrans. L’associatio­n vise ainsi « entre 100 et 150 licenciés pour la saison 2020-2021 ». Pour 150 euros, la licence ouvrira droit à un quota d’heures en accès libre à la Gaming House, ainsi que des séances de coaching hebdomadai­res. Avec la possibilit­é de payer pour étendre ce crédit, voire de privatiser la salle pour des événements d’entreprise comme des anniversai­res. Les jeux proposés « s’adapteront à la demande » mais Rainbow 6, Call of Duty, FIFA et PES seront au catalogue.

« L’associatio­n va être ouverte à tous, à toutes les nationalit­és », insiste Louis Ducruet. Ou presque. « Certains jeux sont violents et interdits aux moins de 16 ans, et c’est à nous de montrer l’exemple et mettre les parents en confiance. »

Boris Fedoroff envisage même un accès à partir de 14 ans face à l’afflux de demandes sur les simulation­s de foot venant de (très) jeunes garçons. « On ne veut pas devenir une garderie » ,résume-t-il.

Fédération et associatio­n restent ouvertes aux sponsors et mécènes pour « faire vivre leurs projets » et changer de braquet dès que possible. Sitôt sa demande d’adhésion à la Fédération internatio­nale validée, Monaco pourrait par exemple répondre à l’appel d’offres annuel pour organiser la Coupe du monde. « Qui demande un budget important mais dont les retombées sont très intéressan­tes », analyse Boris Fedoroff. Comme la plupart des grands groupes mondiaux de télécommun­ications, Monaco Telecom ne s’y est pas trompé. Avant que le Covid-19 ne débarque, un premier tournoi événement à Monaco était déjà dans les tuyaux. Du virtuel au réel.

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La « Gaming House » pourra accueillir quinze joueurs simultaném­ent dès septembre.

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