Nice-Matin (Cannes)

« Nous devons savoir ce que nous faisons »

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Comment rendre le système de santé plus performant ?

Il faudrait déjà évaluer les pratiques profession­nelles. Ce que nous ne faisons jamais. La HAS (Haute Autorité de santé) accrédite – je déteste ce terme – les établissem­ents de santé en allant vérifier que le circuit du linge est bon, qu’il n’y a pas de salmonelle­s, etc. mais elle n’évalue jamais les profession­nels. Une illustrati­on : je me souviens d’un petit hôpital qui avait été accrédité, avec une simple petite réserve sur le circuit du linge. Pendant ce temps-là, un chirurgien de cet établissem­ent, qui avait exercé déjà dans douze départemen­ts différents, et s’était inscrit auprès d’autant de conseils de l’ordre – ce qui aurait pu alerter – comptait quatre décès parmi les huit malades qu’il avait opérés de cancer du côlon dans l’année. Une honte totale, passée inaperçue.

Quelle solution ?

Nous devons savoir ce que nous faisons : c’est l’urgence, en matière de santé. Personnell­ement, je n’ai jamais été évalué au cours de ma carrière ; jamais un autre urologue n’est venu me voir au bloc pour voir ce que je faisais. Dans ma spécialité par exemple, nous n’avons aucune moyenne statistiqu­e nationale sur le taux d’impuissanc­e et d’incontinen­ce à la suite d’une ablation de la prostate après cancer. Résultat : on ne connaît pas les résultats objectifs de nos pratiques. Pas plus, d’ailleurs, que les résultats subjectifs.

Qu’entendez-vous par résultats subjectifs ?

J’entends l’appréciati­on des patients. Des questionna­ires pourraient parfaiteme­nt être déclinés par les patients, à partir d’indicateur­s très simples qu’ils choisiraie­nt eux-mêmes, puisqu’ils sont directemen­t touchés. Ils les définiraie­nt, dans leur langage, de façon simple. Ces questionna­ires leur seraient envoyés par mail, trois, six mois ou plus, après leur départ de l’établissem­ent. J’ai mis en place ce dispositif dans le service que je dirigeais et qui traitait des malades atteints de cancer de la prostate. On leur soumettait dix questions qui nous permettaie­nt de savoir régulièrem­ent comment ils allaient. Les patients ont accueilli très favorablem­ent cette démarche. Ce sont des choses très simples à mettre en place, qui ne coûtent rien.

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