Agent de service hospitalier et femme
« J’ai beaucoup de fierté. » Parce qu’elle n’aime pas se plaindre, ni quémander, l’avouer est une épreuve pour elle. Emma ne se
(1) nourrit pas toujours à sa faim. « Mon enfant, c’est ma priorité ; je veux qu’il puisse manger un steak, des légumes, un repas équilibré. Moi, je peux me contenter d’un yaourt », confie timidement et sous couvert d’anonymat cette jeune maman solo de 27 ans.
« On n’en mène pas large »
Agent de service hospitalier dans un établissement public azuréen depuis six ans, Emma gagne 1 300 euros par mois. Avec cette somme, et en dépit du soutien de ses proches – « J’aurais été bien incapable de payer une crèche ou une nounou » –, difficile de faire face aux dépenses essentielles, comme son loyer de 700 euros par mois. Alors, elle multiplie les heures supplémentaires. Et au moins deux fois par semaine, après ses journées épuisantes à l’hôpital, elle fait des ménages chez des particuliers. «Çamepermet n’a pas été simple, même sous couvert d’anonymat. La plupart sont « hors la loi », et la peur est immense d’être identifiés par une hiérarchie dont ils craignent qu’elle soit sans complaisance. Pour ces travailleurs pauvres auxquels la crise des « Gilets jaunes » a donné la parole, la menace d’une perte d’emploi fait peur.
Longtemps, très longtemps, trop longtemps probablement, ces soignants hospitaliers sont restés silencieux. Comme si les deux qualités que chacun leur reconnaît : abnégation et dévouement, leur intimaient l’ordre de se taire. Et en dépit de leur mécontentement légitime face à des conditions de travail à l’hôpital de plus en plus dégradées, ils se sont peu mobilisés. Mais depuis quelques années, la colère gronde.
Moins nombreux dans les services – les hôpitaux peinent à recruter alors que les salaires sont si peu attractifs –, « victimes » de la réduction des lits associée au virage ambulatoire, dépossédés de ce qui constitue souvent leur principale motivation : le temps donné au patient, ils sont à bout de nerfs, et leur voix s’élève pour réclamer des salaires décents, à la hauteur de leurs missions. Et une simple reconnaissance. Il est urgent que leur voix soit entendue : ces centaines de milliers de personnels hospitaliers portent à bout de bras notre système de santé. de gagner environ 250 euros de plus par mois. Je ne vais pas très loin avec ça, mais au moins, je peux offrir des petits plus à mon fils, comme une sortie au McDo de temps en temps… »
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Offrir à mon fils une sortie au McDo ”
Emma ne demande pas grandchose : « Juste un petit coup de pouce qui m’aiderait à couvrir mon découvert, souffler un peu et lever le pied sur les ménages, pour passer un peu plus de temps avec mon fils. » Découvert à la banque, agios, et un frigo qui se vide. Un quotidien tristement familier. « On n’en mène pas large… », commente la jeune femme. Une augmentation à l’issue du Ségur de la santé ? Emma sourit. « On croise les doigts… On espère un peu, même si ce n’est pas autant que les soignants. »
Emma n’envisage pas de quitter