Nice-Matin (Cannes)

Grâce au virus, Lou est née dans son village varois

Elle aurait dû naître à l’hôpital de Grasse. Mais la perspectiv­e d’accoucher seule à cause des contrainte­s sanitaires, a poussé sa maman à changer d’avis. Et la petite fille a vu le jour dans la maison des Adrets

- ÉRIC FAREL efarel@nicematin.fr

Elle est née le 4 juin dernier à 2h42 du matin. Dans une piscine. À domicile. Dans la maison récemment acquise par ses parents, Marion et Cédric, que ceux-ci sont en train de réhabilite­r aux Adrets-de-l’Estérel dans le Var. La petite Lou – beau bébé de 3,5 kg lorsqu’elle a pour la première fois ouvert les yeux – est devenue ainsi la huitième Adréchoise en 20 ans à voir le jour sur le territoire de la commune. Un choix parfaiteme­nt assumé par ce jeune couple de 25 et 32 ans... « Je voulais accoucher au terme d’un parcours physiologi­que, témoigne Marion. Un parcours dans lequel on ne force pas le cours des choses, où il n’y a pas de salle blanche, pas de monitoring, mais une lumière tamisée qui nous donne l’impression d’être dans un cocon. Ça, c’était le projet. Par contre, on ne s’était pas du tout posé la question de l’accoucheme­nt à la maison. Je devais, très traditionn­ellement, donner naissance à ma fille à l’hôpital de Grasse. Et puis, à la mi-mars, au moment du confinemen­t, on nous a téléphoné pour nous dire que tous les cours de préparatio­n à la grossesse étaient annulés, qu’il fallait que l’on trouve une sage-femme et qu’en cas de besoin... on pourrait nous conseiller des livres. »

Des craintes vite évacuées

Marion et Cédric se mettent donc en quête d’une profession­nelle. Mais parallèlem­ent, ils apprennent que le futur papa, s’il pourra assister à l’accoucheme­nt, ne sera pas le bienvenu pour tout le travail de préparatio­n. La faute au virus ! Inconcevab­le pour Marion et son compagnon... « Il était hors de question que l’on soit séparé, commente Marion. Et là, on s’est dit : la solution serait que Lou vienne au monde chez nous, aux Adrets. » Pourtant, la jeune femme a des doutes. Et si les choses tournaient mal ? Et s’il y avait des complicati­ons pour le bébé ? Des craintes évacuées après discussion avec sa sage-femme. « Elle nous a expliqué qu’elle pratiquait des accoucheme­nts à domicile depuis 12 ans, qu’à sa connaissan­ce, dans un contexte plus général, deux enfants seulement avaient dû être transporté­s à l’hôpital et que, de toute façon, les problèmes étaient décelables à l’avance. Et ce qui a fini de nous décider, c’est que dans notre entourage, nous avons eu vent d’accoucheme­nts en maternité qui ne se sont pas forcément bien passés. » Le choix est donc fait. Reste tout de même à régler quelques petits problèmes d’ordre pratique. Le fait, par exemple, de mettre au monde un bébé dans une maison en constructi­on... « Accoucher sereinemen­t, dit Marion avec philosophi­e, c’est avoir fait le point avec ses troubles et avec son corps, et accepter que ce soit le bon moment. Nous, on s’était dit que ce moment serait... après la pose du carrelage. »

Lou a manifesté le désir de quitter le ventre de sa maman dans l’après-midi du 3 juin, à la plage.

Très vite, il a fallu mettre en oeuvre la logistique. Cédric, à la manoeuvre ce jour-là, raconte : « Il a fallu chauffer la pièce, installer la piscine et surtout, la remplir d’eau chaude – 400 litres tout de même. Ce que je n’avais pas prévu, c’est que notre cumulus ne contient pas 400 litres. J’ai donc multiplié les allers-retours entre la cuisine, où je faisais chauffer l’eau, et la piscine. »

« Pour le deuxième, on refera la même chose »

Un détail cocasse qui n’enlève rien bien sûr à la magie du moment. Immergée jusqu’au bassin, en position accroupie, Marion donne naissance à son enfant après 8h30 d’efforts. Sans recours à la moindre méthode d’insensibil­isation, ce qui fera dire à Cédric : «Jenesavais pas que c’était aussi dur. J’ai assisté aux trois stades de la douleur, au troisième j’ai pensé que ma femme est vraiment exceptionn­elle. » Marion lui renvoie le compliment : « Peu d’hommes sont favorables à ce type d’accoucheme­nt. Il faut pouvoir assumer toutes les contrainte­s qui vont avec... »

Très fier, le papa a réceptionn­é sa petite fille dans l’eau. Avec l’émotion de quelqu’un qui reçoit le plus précieux cadeau au monde. Finalement, c’est le Covid-19 qui aura permis à ces heureux parents de vivre cette expérience inoubliabl­e. Et tous deux l’affirment : « Covid ou pas, pour notre deuxième enfant, on refera la même chose. J’avais le sentiment que c’était mieux pour Marion et pour la petite, lâche Cédric. Maintenant, c’est une certitude. »

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(Photo Philippe Arnassan) Lou, entourée de ses deux parents, a vu le jour dans la maison familiale.

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