Nice-Matin (Cannes)

Mémoire de la Résistance, Daniel Cordier a fêté ses 100 ans à Cannes

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C’est entouré des siens que Daniel Cordier a fêté, hier dans sa résidence cannoise, ses 100 ans. «Un moment très émouvant », nous a confié l’une de ses proches au téléphone, avant de retourner auprès de celui qui, s’il n’évoque peut-être rien aux plus jeunes, est, pourtant, un monument de l’Histoire de France, l’un des quatre derniers compagnons de la Libération.

Né le 10 août 1920 à Bordeaux, il n’a pas encore 20 ans lorsque, révolté par le discours du maréchal Pétain demandant l’armistice avec l’Allemagne, il embarque pour l’Angleterre. Décision motivée par un autre discours, survenu le lendemain : l’appel du 18 juin 1940 du général de Gaulle. L’été suivant, il est affecté au BCRA (bureau central de renseignem­ents et d’action), services secrets de la France libre.

Secrétaire de Jean Moulin jusqu’en juin 

Parachuté près de Montluçon le 26 juillet 1942, il gagne Lyon, où il rencontre Jean Moulin, délégué du Comité national français. Il devient, d’ailleurs, son secrétaire jusqu’en juin 1943 et l’arrestatio­n de ce dernier par la Gestapo. Pourchassé par celle-ci, interné en Espagne, il retourne, en mai 1944, en Angleterre, où il est nommé chef de la section des parachutag­es d’agents du BCRA. Le 20 novembre de la même année, il est décoré de la croix de la Libération. Première des nombreuses distinctio­ns – dont il ne fait, de ses dires, que peu de cas – qu’il se verra décerner après-guerre (chevalier, commandeur, grand-officier et enfin grand-croix de la Légion d’honneur, chancelier d’honneur de l’ordre de la Libération, Croix de guerre...), dont la dernière est intervenue le 7 juillet dernier. Ce jour-là, Ed Llewellyn, ambassadeu­r du RoyaumeUni à Paris, est venu chez lui, à Cannes, le nommer membre honoraire de l’ordre de l’Empire britanniqu­e. Le conflit achevé, Daniel Cordier deviendra peintre et marchand d’art, « initié par Jean Moulin à l’art moderne », qui lui en révéla «lavitalité, l’originalit­é et le plaisir », écrit-il en 1989.

Plusieurs vies mais libre, toujours

Puis, écrivain. Ou, plutôt, historien de la Résistance, pour défendre l’honneur et la mémoire salie de son « Patron ». En 2009, ses mémoires, Alias Caracalla, multiplien­t les récompense­s (prix littéraire de la Résistance, Renaudot de l’essai, prix Nice-Baie-des-Anges). Existences multiples (il était, dans ses jeunes années, militant de l’Action française et royaliste maurassien), menées sans jamais se départir de cette liberté qu’il chérit tant.

Hier, les hommages de politiques se sont succédé, celui du Premier ministre, Jean Castex, en tête, à celui « qui prit tous les risques pour que nous vivions libres. » Le maire de Cannes, David Lisnard – qui lui avait remis la médaille d’Or de la Ville le 13 mai 2019 – a, pour sa part, salué un « engagement suscitant respect et admiration » ,etun parcours « porté par une exigence permanente d’indépendan­ce, source d’inspiratio­n ». P. F.

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