Mike Brant, souvenirs de vacances dans le Var
Peu avant son suicide en 1975, le chanteur à la voix d’or est venu passer plusieurs semaines dans la villa de son imprésario Simon Wajntrob, sur un littoral seynois où il aimait se ressourcer
Mike Brant en vacances à La Seyne… Près de cinquante ans après les faits, l’anecdote peut prêter à sourire. Surtout pour ceux qui ignorent qu’à cette époque, Moshé Michael Brand de son vrai nom est une véritable star, adulée par des milliers et des milliers de fans pour ses talents de chanteur et sa gueule d’ange. Un play-boy qui ne pouvait pas faire un pas dans la rue sans qu’une armée d’adolescentes en furie lui courre après pour tenter de l’approcher. C’est pourtant dans une relative confidentialité que Mike Brant viendra passer plusieurs semaines, entre 1973 et 1975, dans la villa de son riche imprésario, Simon Wajntrob. La grande bâtisse, qui possède alors un accès à la mer, se trouve à Saint-Elme, en limite de Saint-Mandrier. Épuisé par ses tournées, le champion des hit-parades, vient s’y ressourcer, plus détendu que jamais. Il passe de longues heures à bronzer au bord de la piscine. Sur le plongeoir du bassin, il aurait composé son tube Tout donné, tout repris.
Émeute lors d’un concours de boules
« Il s’agissait de la villa Gispy, se souvient Berto, un Seynois qui travaillait à proximité. On fréquentait aussi le même restaurant. » Un établissement qui s’appelait (et s’appelle encore) « La Rascasse ». Simon Wajntrob et Mike Brant y ont leurs habitudes, appréciant la bouillabaisse et le terrain de pétanque juste derrière, discutant facilement avec les gens du coin. Le petit « village » de pêcheurs provençal offre à Mike ce qu’il ne parvient plus à trouver ailleurs : un cadre de rêve en même temps qu’un semblant d’anonymat.
Dès qu’il s’éloigne, en revanche, sa vertigineuse popularité le rattrape. L’écrivain Olivier Lebleu raconte à ce sujet le soir où Mike choisit
(1) de participer à un « concours de talents amateurs » dans une localité voisine : « Facétieux, le chanteur vedette se fait inscrire sous le nom de Toto Maurice. Méconnaissable sous un bonnet, de grosses lunettes noires et un survêtement, Mike s’avance sur la scène et massacre C’est comme ça que je t’aime. Malgré les sifflets, il chante de plus en plus fort, de plus en plus juste, avant de jeter bas son déguisement, sous les regards médusés ! Enfin reconnu, Mike devra s’engouffrer dans la Rolls de Wajntrob, enchanté de son canular… »
Un autre jour, « un simple concours de boules, mais baptisé “Mike Brant” déclenche une véritable émeute. [...] écrit encore Olivier Lebleu, qui fait probablement là référence à une partie organisée par feu la Boule saint-elmoise. Désemparé, Mike est ramené en fourgon de police pour sa sécurité. La chasse est ouverte, les filles finissent par escalader le mur de la propriété Wajntrob… » Même sur les bords de la Méditerranée, sa tranquillité, petit à petit, s’évapore.
Si le chanteur seynois Jean-Luc Bruno n’a jamais croisé Mike Brant sur nos rivages, il n’ignore rien du passage de la star aux Sablettes. À commencer par l’identité de son hôte et de sa fameuse bâtisse aux volets bleus, longtemps un lieu de pèlerinage pour les fans du monde entier. « Simon Wajntrob était un agent influent à l’époque, expliquet-il. On avait failli collaborer. Un soir, en 1975, il était venu me voir chanter à La Gazette en chansons à Saint-Mandrier et il avait
(2) adoré ma prestation… »
Lors de ce passage sur la presqu’île, le jeune Jean-Luc Bruno interprète Mike .« Tu n’avais pas 30 ans, fier et beau comme un dieu, quand tu chantais sur scène… » Une ode à l’artiste qui envoûtait, il y a peu encore avec son regard perçant, l’autre Seyne. La seule, peut-être, qui lui aura un temps permis d’être lui. Simplement lui.
1. Dans La Voix du sacrifice (Publibook - 2012)
2. L’ancêtre de la Tournée de Var-matin-Nice-Matin.