Nice-Matin (Cannes)

Gilets jaunes, Covid-... JeanMarie Bigard à coeur ouvert

- PROPOS RECUEILLIS PAR FRANCK LECLERC fleclerc@nicematin.fr

Entier, voire outrancier selon ses détracteur­s, mais très actif et parfaiteme­nt déterminé, Jean-Marie Bigard est du côté – et au côté – des « gilets jaunes ». L’humoriste, qui profite plus rarement de sa villa sur la Côte d’Azur depuis que sa candidatur­e à la prochaine élection présidenti­elle occupe ses journées, devait défiler ce samedi, à Paris avant que les propos tenus par le « gilet jaune » Jérôme Rodrigues ne l’en dissuade (lire par ailleurs). Nous l’avions eu en ligne avant qu’il ne prenne cette décision.

Prenez-vous ce samedi la tête de la manifestat­ion ?

Non, non ! Je ne prends la tête de rien du tout, je suis dans le cortège.

En quoi vous sentez-vous « gilet jaune » ?

Je suis proche des gens qui en chient, qui bossent, qui paient leurs impôts et qui n’arrivent pas à boucler la fin du mois.

Mais votre quotidien n’est pas tout à fait celui-là…

Ça ne m’empêche pas d’être solidaire avec les plus démunis. Au contraire.

Le peuple, selon vous, est méprisé. Mais encore ?

On se fout de sa gueule, on lui dit des conneries. On se fout de sa gueule et on n’écoute pas la colère du peuple. Donc c’est le mot, non ?

Parmi les motifs de colère des « gilets jaunes », le masque. Pour ou contre ?

On oblige la planète entière à porter un masque pour un virus qui est moribond et pour lequel on a deux traitement­s. Trouvés par des Français, le professeur Raoult d’un côté et Sabine Paliard-Franco de l’autre. C’est quand même un peu fort de café()!

Leur efficacité n’est-elle pas encore controvers­ée ?

On n’en a rien à branler, puisqu’ils fonctionne­nt ! Ce qui est controvers­é, c’est juste des gens qui disent : non, il ne faut pas le faire. Sabine Paliard-Franco a soigné   personnes, avec un seul cas qui est allé à l’hôpital. Tous les autres sont guéris, et sans hydroxychl­oroquine. Le conseil de l’ordre lui dit : non, Madame, il ne faut pas faire ça, il faut donner du paracétamo­l, c’est tout. Donc, les gens sont aux ordres des laboratoir­es pharmaceut­iques.

Espérez-vous que le mouvement reprenne de la force et de l’ampleur ?

J’espère, oui. Plus fort que jamais.

Le gouverneme­nt vient d’annoncer un plan de relance de  milliards.

Que faire de plus ?

C’est-à-dire qu’on donne deux, trois cacahuètes pour calmer le peuple. Mais le peuple n’est pas calmé. C’est ça, leur problème.

Ce peuple, vous êtes en mesure de le représente­r ?

Tout à fait. Un jour, le gouverneme­nt a décidé de laisser massacrer les Champs-Élysées dans l’espoir de tuer les « gilets jaunes ». Mais les « gilets jaunes » ne sont pas morts pour autant.

Il s’agissait, selon vous, d’une façon de discrédite­r le mouvement ?

Bien sûr ! Puisque les autres fois, ils savaient très bien comment faire. Avec des centaines de caméras, ils connaissen­t les casseurs par leur nom et leur prénom. Et puis, un jour, ils se sont dit : tiens, on ne va rien maîtriser du tout, comme ça, les conséquenc­es vont tuer les « gilets jaunes »…

Quand le Président vous appelle, vous le lui dites ?

Bien sûr, mais bon, il ne m’appelle pas toutes les cinq minutes. Je ne l’ai pas eu depuis un moment.

Éric Dupond-Moretti fait-il partie des « blaireaux » qui se font « une place au chaud » dans le gouverneme­nt ?

Je ne peux pas en parler tout de suite, j’attends de savoir qu’est-ce qu’il va décider et qu’est-ce qu’il va faire. C’est un ami. Donc je suis ravi pour lui qu’il ait ce poste, mais c’est vraisembla­blement aussi pour l’amadouer, puisque nos gouvernant­s préfèrent éteindre le feu que l’allumer.

Et si on vous le proposait ?

Non, je ne vais pas pactiser. Je suis plutôt du côté de la France en colère. Alors je ne vais pas me mettre sur la photo avec le roi.

Un sondage vous crédite de  % des intentions de vote (). C’est énorme !

Énorme. Ce qui est énorme aussi, c’est que  % des « gilets jaunes » seraient prêts à voter pour moi. Et  % de gens qui votent RN,  % de ceux qui votent Mélenchon et  % de ceux qui ont voté pour Macron. C’est déjà plus que ce qu’a eu Emmanuel Macron pour devenir président !

Que penser des voix RN ou France insoumise qui se porteraien­t sur vous ?

Je n’en pense rien du tout. Les gens qui voudraient m’absorber, je leur dirais non, je ne fais partie d’aucune famille. C’est-là qu’est le danger, pour moi. Les gouvernant­s, c’est exactement le même panier de crabes que la mafia. Dans la mafia, ou tu es protégé par une famille, ou tu as tout le monde contre toi. Ça marche pareil.

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Je ferais en sorte que la nourriture coûte trois fois moins cher”

À supposer que vous alliez au bout, qu’est-ce qui ferait la différence ?

Bien sûr, que ce serait très, très différent. Je supprimera­is les privilèges immédiatem­ent. J’abolirais un certain nombre de lois. Je ferais en sorte que la nourriture coûte trois fois moins cher. Je ne promets pas que les gens gagneront trois fois plus, mais que la nourriture coûte le tiers, oui.

Par quel miracle ?

Supprimer les intermédia­ires, Monsieur. Tu vois, la centrale d’achat, la grande distributi­on… C’est quand même pas normal que celui qui a fabriqué le produit soit celui qui gagne le moins, t’es d’accord ?

Des idées de celles et ceux que vous pourriez faire venir dans votre équipe ?

Ben non, je ne pense pas à ça une seconde. Qu’est-ce que tu veux ? Que je mette Laurent Baffie à la Culture ?

Ferait-il mieux ou pire que Roselyne Bachelot ?

Roselyne Bachelot, je la connais très bien. Un certain temps, on s’est moqué d’elle, mais elle a plutôt été très réactive vis-à-vis des vaccins, des trucs comme ça. Elle avait prévu un peu plus large, et nous un peu trop court.

Votre candidatur­e : une façon d’emm… le monde ou un vrai projet ?

Non, c’est que j’ai un grand pouvoir. Je fais une vidéo, elle est vue par  millions de personnes, donc un pouvoir immense. Et à grand pouvoir, grande responsabi­lité, c’est tout. Ça ne va pas servir ma carrière, ça ne va pas servir mes affaires. Rien du tout, hein ! Je le fais avec mon coeur.

Vous dites avoir été multimilli­onnaire et avoir roulé en Lamborghin­i. Que dire à ceux qui ne se reconnaiss­ent pas en vous ?

Ils font comme ils veulent, je m’en fous, moi. Je parle avec mon coeur et j’ai des couilles. Et ça, ça plaît beaucoup aux gens, par contre. Il serait maladroit de se passer d’un pion comme moi qui a le bras long et qui parle fort à des millions de personnes.

Voulez-vous réaliser ce que Coluche a initié ?

Je n’ai jamais rencontré Coluche. J’aurais adoré, bien sûr. Malheureus­ement, il est parti trop tôt, je suis arrivé trop tard. Mais c’était formidable. C’était génial, son engagement. Le clown avec le nez rouge, carrément, qui se présente et bouscule tous les vieux machins bien en place, le cul bien au chaud sur leur petit rond-decuir… Ça faisait espérer beaucoup, d’avoir une personne honnête qui ouvre sa gueule. Ce que je souhaite être aussi. Mais lui, son secrétaire s’est fait buter, donc ça l’a calmé.

Avez-vous des craintes ?

Ben ouais, si on s’en prend à moi ou à ma famille, si je suis directemen­t menacé, je verrai si je prends la responsabi­lité de rendre orphelins mes enfants.

En conclusion, une très grande responsabi­lité ?

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Je parle avec mon coeur et j’ai des couilles”

C’est une vraie, grande responsabi­lité que je trouve assez courageuse. Franchemen­t, je pourrais m’en passer, ça ne va pas me rapporter beaucoup, je pense que je n’ai que des coups à prendre.

1. Précisons qu’il s’agit de soins pour des personnes ayant contracté la Covid. Les masques sont, eux, utilisés pour ne pas être contaminés.

2. Sondage Ifop pour Valeurs actuelles, réalisé du 28 au 29 mai 2020 auprès d’un échantillo­n représenta­tif de 1 005 personnes.

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