Prêtes pour le plongeon
Étape importante, hier midi, sur la jetée du port Canto : les six sculptures ont été dévoilées par l’artiste, le maire et les Cannois qui ont servi de modèle. Immersion prévue fin novembre
Nour, 20 ans, étudiante, regarde la sculpture et réalise : elle est sur le point d’entrer dans l’histoire de Cannes et de la Méditerranée.
Dans cent ans, deux cents ans, des plongeurs de l’entre-deux îles la « rencontreront » dans la baie de Cannes. « Je me demande encore pourquoi Jason DeCaires Taylor m’a choisie. C’est un mystère… » L’artiste répond simplement à cette question : il lui fallait des visages caractéristiques. « Des visages qui représentent une génération, une époque. Des faciès qui, lorsqu’ils sortiraient des masques réalisés [lui] parleraient… » Celui de Nour a été retenu. Maintenant elle est là, devant l’oeuvre qui la représente et qui a été dévoilée hier. Elle observe ses deux faces, l’une à la verticale, l’autre en retrait, deux expressions différentes: « celle de la résilience et celle de la vulnérabilité », a dit l’artiste pendant son allocution. Elle est « d’accord » avec cela. Maurice, marin-pêcheur de presque 80 ans aussi. Depuis qu’il a dévoilé la sculpture, il la regarde, tourne autour et se reconnaît chaque minute davantage. « Oui, c’est bien moi ». Pareil pour la petite Anouk (7 ans) : « J’ai deux nez mais oui c’est moi !!! »
D’autres « artistes » vont poursuivre le processus
Jason DeCaires Taylor a prévenu : maintenant que les sculptures sont presque prêtes à être immergées (fin novembre) entre les deux îles, pour créer le fameux musée sousmarin cannois, le « processus de création va se poursuivre ». D’autres « artistes » : la mer, les poissons, les coraux vont apporter leur touche. Du coup, les visiteurs du musée, en masque et tuba, ne verront jamais la même chose. « Et c’est bien ce qui est beau. »
C’est bien, là aussi, le message essentiel de cet artiste mondialement connu, que tout le monde réclame et qui s’est laissé séduire par Cannes : « Que les visiteurs voient à quel point la mer est belle. Elle a l’air forte. Mais elle est en train de changer, elle est fragile, il faut la protéger… »
Sur un ancien site bombardé
Voilà, hier matin, les oeuvres du futur musée sous-marin – le premier de France et de Méditerranée – ont donc été dévoilées. Et avec elles, l’identité des modèles : Anouk Vangment, Eugène Kustov, Nour Bradai, Dominique Royal, Marion Beaudin et Maurice Merenda entrent dans l’histoire aquatique de la commune. Fin novembre, les oeuvres pesant environ dix tonnes chacune seront descendues dans les fonds situés face à la propriété Grand-Jardin de Sainte-Marguerite. Un site choisi à dessein, « qui a été bombardé dans les années 1990 pour installer un câble électrique et qui a donc été fortement dégradé », a rappelé le maire David Lisnard. Du coup, la présence des sculptures (facilement et librement accessibles puisque seul un mètre séparera le haut des têtes et la surface), permettra à la faune et la flore de se constituer. Les poissons, les algues, les coraux viendront très vite s’y nicher…