Nice-Matin (Cannes)

Condamnée à 2 ans pour avoir tué un motard et pris la fuite P22

Un soir d’août 2018, route de la Fènerie, une jeune infirmière a percuté en voiture un motard de 28 ans, sans lui porter secours. Le jeune homme n’avait pas survécu à ses blessures

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Le 26 août 2018, vers 21 heures, Route de le Fènerie à Pégomas, Yohann, un jeune homme de 28 ans n’a pu éviter la collision avec le véhicule conduit par Marie, une jeune infirmière de 23 ans. Elle se rendait chez des amis résidant à proximité du lieu de l’accident. Son véhicule s’est soudaineme­nt déporté sur la gauche, a coupé la ligne blanche et se retrouvait sur la voie opposée empruntée par la victime. Dans ce tragique face-à-face, l’accident était inévitable. Mais, malgré la violence du choc, la jeune femme prenait la fuite dans la foulée, après avoir zigzagué puis stoppé (un arrêt d’environ 15 secondes), ses feux de détresse enclenchés. Comme l’indiquera un témoin.

« Pas consciente de ce qui lui arrivait »

Transporté par les secours au CHU Pasteur de Nice dans un état grave, son pronostic vital engagé, Yohann ne survivra pas à ses graves blessures.

Au volant de sa petite voiture blanche, Marie semblait ne pas être consciente de ce qui lui arrivait, comme le prétendra son ex-petit ami à qui elle s’était confiée.

Tout comme ce couple d’amis chez qui elle s’était réfugiée immédiatem­ent après les faits en les suppliant au téléphone : « Ouvre-moi vite, j’ai eu un accident, il faut que je rentre la voiture ! » Eux-mêmes s’étaient rendus sur place peu après avoir accueilli leur amie, pour évaluer et juger de la situation.

Les amis cachent le véhicule accidenté

Leur attitude intrigante avait surpris. Le témoignage d’un des habitants de leur résidence déclarant « voir entrer un véhicule avec le rétro qui pendait », avait éveillé les soupçons d’un gendarme. Identifié et entendu le lendemain, le couple allait révéler l’identité de leur amie en fuite. Prévenue, et se sachant découverte, Marie décidait alors de se rendre le lendemain à la caserne Ausseur pour avouer qu’elle était bien la conductric­e du véhicule impliqué dans l’accident. Comparaiss­ant mercredi devant le tribunal correction­nel de Grasse, entre sanglots et voix nouée par l’émotion, la jeune femme avait peine à répondre à la présidente qui l’interrogea­it.

Les trois soeurs et le frère de la victime étaient présents dans la salle d’audience, partagés entre peine et colère, mais sans contrarier la sérénité des débats par une attitude digne. Ils ont tenu à rédiger une lettre qui sera lue par la présidente du tribunal Lauri Duca évoquant «un délit de fuite impardonna­ble, une personne qui n’assume pas ses responsabi­lités ».

« Traumatisé­e par l’attentat de Nice »

« Comment expliquez-vous votre attitude de fuite », demande le magistrat à la prévenue.

« J’ai complèteme­nt paniqué et puis j’étais très perturbée. C’est le trou noir, je n’ai pas de souvenir » , répond Marie, quittant le masque de circonstan­ce pour essuyer ses larmes. Toute menue, fragile, la jeune femme, cheveux noués, dans une sobre tenue. « Vous aviez consommé de l’alcool, deux ou trois verres de rosé avec des amis l’après-midi. Vous évoquez un malaise, c’est tout à fait possible mais difficile à supporter pour la partie civile. Vous êtes quelqu’un qui a cherché plutôt à se mettre à l’abri. »

La présidente ajoute : « Nous avons peu d’éléments concernant la victime. C’était l’aîné, il revenait d’un enterremen­t de vie de garçon, mais n’avait pas consommé d’alcool. Il menait une vie saine, aimant les voyages, toujours présent pour sa maman malade ».

Le procureur de la République Alain Gimbard reprochera à la prévenue « son attitude inchangée, même plus de deux ans après les faits. On continue à vouloir échapper à ses responsabi­lités. Il y avait une volonté évidente de dissimulat­ion. »

Il requiert dix-huit mois de prison, dont un avec sursis et annulation du permis de conduire pendant un an.

Aux intérêts de sa cliente, Me Adrien Verrier demandera la clémence du tribunal envers « une jeune femme traumatisé­e par l’attentat de Nice dont elle a gardé des séquelles psychologi­ques et une fragilité entraînant des absences régulières et des troubles de l’attention. Ce stress posttrauma­tique a induit un comporteme­nt inadapté. Elle n’a pas eu conscience de la gravité de l’accident. » Le tribunal reconnaîtr­a Marie coupable des faits qui lui sont reprochés et la condamnera à deux ans de prison dont un avec sursis, sans mandat de dépôt et annulation de son permis de conduire pendant un an. JEAN STIERLÉ

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(Photo J.S.) Me Adrien Verrier (Barreau de Nice) avocat de la prévenue).

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