La bonne guerre
Elles étaient belles, dignes, recueillies et émouvantes ces foules qui se pressaient hier en hommage à Samuel Paty. Sans doute pas aussi fournies que cet acte atroce l’aurait mérité. Une mobilisation un peu en dedans, tant le désarroi nous accable, tant le manque de solutions évidentes et concrètes est patent. Retirer le rayon des produits halal, qui choque le ministre de l’Intérieur, serait-il le début d’une réponse ? Allons, allons, ne nous égarons pas ! Sur le plan sécuritaire, beaucoup est déjà fait, qui nous protège au quotidien d’un grand nombre d’attentats, même si notre réseau de surveillance est à claire-voie. Il faut toujours plus de moyens financiers et techniques, de recrues pour infiltrer les réseaux, pour repousser le danger en amont. La traque des auteurs et de ceux qui les inspirent est, c’est une évidence, un devoir de sécurité nationale.
Plus difficile, parce que nous n’avons pas encore pris la mesure de l’enjeu : le combat contre l’Islam politique, matrice d’un nouveau fascisme qui ne dit pas son nom. Auquel il faut une riposte juridique - la fermeture des lieux de propagation des idées extrémistes et l’expulsion des idéologues étrangers - mais aussi lutter plus efficacement contre le discours insidieux sur la primauté des principes religieux sur les lois de la République.
Un corps à corps idéologique à l’ancienne, argument contre argument, dans les médias, sur Internet, et dans des lieux d’échange qu’il reste à inventer. L’État, mais aussi le milieu associatif, ont un rôle crucial à jouer, avec l’aide de tous les croyants de bonne volonté. Impossible, dans ce cadre, de ne pas mettre à plat nos relations avec les pétromonarchies, ces états friqués qui fournissent la nébuleuse fondamentaliste en dollars et en idées rétrogrades. Le troisième front est le plus vaste et le plus incertain : la jeunesse. Elle n’est pas la seule génération bercée par le conspirationnisme et le repli identitaire. Les grands réseaux sociaux qui dissimulent leur appétit au gain derrière la défense des libertés individuelles, ne sont absolument pas au niveau de leurs responsabilités. Les enseignants sont précieux mais restent de courageux petits
Les enseignants sont précieux mais restent de courageux petits soldats au barda surchargé
soldats au barda surchargé par les attentes du reste de la société : est-ce une question de contenu des programmes ? Du nombre d’heures réservées à ce type de cours ? Des réponses, vite, des réponses. Les gosses et les ados d’origine immigrée, Français depuis plusieurs générations, manquent de repères et de modèles positifs qui leur ressemblent. Leur désenchantement est le terreau idéal pour les idées tordues. Ils ont surtout le besoin, comme tous les copains de leur âge, d’une parole parentale apaisée. Des parents qui ont prouvé, au cours des dernières décennies que l’Islam pouvait être comme les autres, dans sa pratique régulière, une religion de vie et non une religion de mort, respectueuse de la République, de l’État de droit, de ceux qui croient au ciel, comme de ceux qui n’y croient pas.