Le tourisme linguistique mis en péril par le virus
Les écoles de FLE, français langue étrangère, appellent au secours : elles ne sont pas intégrées au plan de relance du tourisme, alors qu’elles attirent des milliers d’étrangers toute l’année
Exclu des mesures d’accompagnement Covid-19 réservées au secteur du tourisme, le secteur de l’enseignement du « français langue étrangère » (FLE), réduit à 20 à 30 % de son activité, est au bord du gouffre. Méconnu, il représente une part importante de l’économie touristique : « De Menton au département du Var, les écoles qui enseignent le FLE sont une cinquantaine. Dont une quinzaine de grosses structures, qui recevaient à elles seules entre 2 et 4 000 étudiants pour un chiffre d’affaires total de 15 M€ environ sur 150 au plan national », avance Gilles Cappadoro, directeur du Centre méditerranéen d’enseignement du français de Cap-d’Ail, et président du groupement national FLE.
De David Lisnard au gouvernement
« Depuis l’obligation de fermer en mars, on se bat sans succès auprès des ministères pour que nos écoles puissent bénéficier des mesures d’aide du plan de relance du tourisme, et entrent dans la liste S1 du décret du 29 juin 2020, au titre de l’enseignement culturel et en tant qu’opérateurs du tourisme linguistique et culturel. »
Une question de survie, car les trésoreries fondent, novembre et décembre s’annonçant catastrophiques après une saison estivale très réduite.
Lettre a donc été adressée à David Lisnard. Le maire de Cannes et président du Comité régional du tourisme Côte d’Azur a porté la question en comité interministériel le 12 octobre. Les représentants de la profession espèrent une réponse rapide du Premier ministre.
Les effets induits du français langue étrangère
Au-delà des 1 000 € en moyenne que coûtent trois semaines de cours, les effets induits de la présence de ces touristes studieux sont considérables. Emploi des enseignants, de l’encadrement désormais en chômage partiel ou total, mais aussi logement en familles d’accueil, centres ou hôtels, et tout ce qui, culture, ou restauration, fait le mode de vie à la française et attire la clientèle internationale. « Sans aide, on ne tiendra pas jusqu’à l’été », assure Pascal Richez, directeur de l’école Alpha B de Nice : « L’an dernier, nous avons eu 2 700 inscrits, cette année 230
Dans ces écoles, le public est très varié. Ados en séjour linguistique pour les vacances scolaires, jeunes ou adultes qui, tout au long de l’année, préparent une certification, se spécialisent dans le français des affaires ou du droit.
Et aussi ceux qui viennent se mettre à niveau pour atteindre le niveau de pratique B avant d’entamer élèves. Avec le confinement et la fermeture des frontières, les cours ont cessé en présentiel. En ligne ils n’intéressent pas notre clientèle qui cherche aussi la vie sociale à la française. On n’a pu rouvrir que le 20 juillet : avec les annulations nous sommes passés de 200 à 27 élèves. Les quatorzaines puis le passage en zone rouge ont fait le reste pour les ressortissants de l’espace Schengen, certains sont partis avant la fin de leur stage de peur d’être bloqués. La raréfaction de la desserte aérienne, le refus de délivrer des visas aux Américains, Asiatiques Russes ou Brésiliens pour qui l’apprentissage du français n’est pas une raison prioritaire nous prive de nos stagiaires. »
L’optimisme se dilue avec l’inquiétude et l’absence de visibilité. « On a mis un an pour se remettre de l’attentat de juillet 2016. Là on ne sait pas si on va se relever. On subit une double peine. »
Ado en séjour linguistique, prof en remise à niveau...
une formation universitaire. Et même des profs de français étrangers en mise à jour pédagogique et linguistique… ou des résidents étrangers qui ont tout leur temps pour accéder à la pratique de la langue de leur pays d’accueil. Les séjours durent en moyenne trois semaines, mais vont de sept jours à six mois selon l’objectif.