Luca Otmane : de Nice au PSG pour grandir
Luca Otmane (-73 kg) a décidé de quitter l’Olympic Judo Nice, le club fondé par son père, pour poursuivre sa carrière du côté du Paris Saint-Germain. Un choix fort dicté par le besoin de passer un cap dans une progression que le jeune homme de 25 ans trouvait trop stagnante. « J’ai écouté mon instinct, c’était le bon moment » nous a confié Luca Otmane au téléphone depuis sa chambre du centre de rééducation de Capbreton, où il se remet d’une opération du genou.
Le retour sur les tatamis se rapproche ?
C’est difficile de donner une date. C’était une opération assez complexe qui nécessite que je sois très à l’écoute de mon genou. J’ai été bien pris en charge. Le but maintenant, c’est de revenir dans les meilleures conditions, pas le plus rapidement possible. Pouvoir remettre un peu d’adversité début janvier, ce serait bien.
Partir au PSG, c’était une étape nécessaire dans votre carrière ?
Oui. J’étais arrivé à un moment où j’avais le sentiment que ça coinçait. Pas à cause du club ou de l’entraîneur mais à cause de moi. Je ne me voyais plus progresser.
Il fallait quitter votre zone de confort ?
J’avais besoin de me mettre en danger, de sortir d’un environnement qui allait parfois trop dans mon sens. Quand je faisais mal les choses, on me le disait mais j’avais du mal à l’entendre. Je vais être confronté à une manière de fonctionner beaucoup plus exigeante et professionnelle. Je n’aurai plus d’excuses. Je vais être face à moi-même et mes obligations. Jusqu’à présent, je n’ai jamais été meilleur que quand j’étais au bord du précipice.
Partir de Nice a été un choix difficile ?
Je reste un enfant d’ici. Sur le plan sentimental, ça me fait forcément quelque chose. Mon père aurait aimé que je réussisse ici. Mais la priorité, c’est que je devienne un champion. Que ça marche ou que ça ne marche pas, j’aurais tenté ma chance. Aujourd’hui, j’ai signé un an avec le PSG mais ce n’est pas la fin de mon histoire avec l’OJN. J’ai grandi grâce à ce club, grâce aux bénévoles, aux entraîneurs, aux partenaires, à la Ville… Un jour, je redonnerai tout ce qu’on m’a donné, c’est la base.
« Me confronter à une autre vision du judo »
Comment a réagi votre père ?
L’idée de partir me trottait dans la tête depuis le premier confinement.
Il y a eu une énorme remise en question jusqu’à me demander si je voulais vraiment être un champion. Aujourd’hui, je sais ce que je veux. Mon père a eu du mal à l’entendre au début. On a eu des discussions d’homme à homme. Mais au final, il a su se mettre dans la peau du père et non pas du patron, et m’accompagner dans mes choix.
Pourquoi un contrat d’un an seulement ?
Au début, un an ça me dérangeait. Pour préparer les Jeux de Paris-, ce n’était pas cohérent. Mais les dirigeants m’ont dit que c’était leur manière de fonctionner, et qu’ils souhaitaient m’accompagner dans cette démarche. Il n’y a pas de promesse dans le judo, c’est à moi de montrer ma volonté de réussir.
Qu’est ce qui vous sépare encore des meilleurs ?
Beaucoup de choses. Je l’ai compris quand j’ai perdu contre le Japonais Ebinuma au Grand Slam de Paris. Ça a été une belle leçon. J’ai vu que j’avais encore énormément de boulot, notamment sur le côté tactique. Mon engagement me joue parfois des tours.
Vous aviez besoin d’une nouvelle approche ?
L’objectif, c’est d’écouter un nouveau discours, me confronter à une autre vision du judo. Stéphane Auduc était bien plus qu’un entraîneur pour moi, je le remercierai toujours, mais ce changement d’environnement va me faire grandir. J’ai senti que c’était le bon moment de partir. C’est une bonne chose que ce soit en début d’Olympiade.
Vous avez donc tiré un trait sur les Jeux de Tokyo ?
Honnêtement, je ne pense pas y être. Maintenant, si je reviens assez tôt, si je sens qu’il y a quelque chose à aller chercher, une infime chance, je ne me priverais pas. Je prendrais tout ce qu’il y a prendre. Dans la démarche de performer aux Jeux de Paris-, ce serait très intéressant de vivre une première aventure olympique. En cas de qualification, je viserai bien sûr une médaille. Mais on en est bien loin.