Nice-Matin (Cannes)

« La bonne nouvelle, c’est d’ouvrir dès samedi »

Nicolas se réjouit de pouvoir rouvrir sa boutique de prêt-à-porter à Nice dès la fin de semaine. Noël représente 30 % de l’activité de l’année : il travailler­a sept jours sur sept en décembre

- FRANCK LECLERC fleclerc@nicematin.fr

Un petit appartemen­t, au coin de la rue de Lépante, à Nice. Celui de la famille Donati. Où l’on trouve Nicolas et Alexandra, tous deux commerçant­s. Leurs filles Luz Angel et Gloria, respective­ment 9 et 7 ans. Et le chien Poppy, ravi de cette soudaine agitation.

Lorsque Macron apparaît à l’écran, concentrat­ion maximale. Les annonces tardent à venir. Et finalement suscitent des réactions contrastée­s.

« Tiens, on pourra fêter Noël chez ma belle-mère, même si elle habite dans le Var », souffle Nicolas. « Oui, et tu seras même obligé d’y dormir ! », le chambre Alexandra. Elle pense d’abord aux activités extra-scolaires des petites, encore en suspens. Lui, aux amis restaurate­urs, toujours dans la tourmente. Mais la nouvelle que le foyer attendait, c’est bien sûr la possibilit­é de rouvrir pour tous les petits commerçant­s. Un immense soulagemen­t. « Dès samedi ? Honnêtemen­t, c’est une bonne surprise. Je pensais qu’il faudrait attendre lundi », se réjouit Nicolas. Chaque jour compte. Sa boutique Invoice, au bout de l’avenue Notre-dame, est depuis trop longtemps en souffrance. Ici comme dans la plupart des magasins de prêt-à-porter, Noël représente 30 % de l’activité de l’année. On n’a pas le droit de se louper.

« Le premier confinemen­t m’a coûté un prêt garanti par l’état de 55 000 euros. Entre les “gilets jaunes”, les grèves et la pandémie, je vis à découvert depuis trois ans », calcule Nicolas Donati. Son cas n’est pas isolé. Il est bien placé pour le savoir, puisqu’il préside l’associatio­n Nice Grand Centre, qui fédère une centaine de commerçant­s parmi les 350 du quartier.

« Science-fiction »

Après la « stupeur » du mois de mars, « quasiment de la science-fiction », le couple a été contraint de s’adapter. « Heureuseme­nt que j’avais revendu mon magasin avant le virus », soupire Alexandra. « Vous vous rendez compte, si nos dettes avaient été multipliée­s par deux ? » Elle s’est reconverti­e dans la pâtisserie. Mais ne peut pas se lancer, forcément. « On nous incite à entreprend­re. Quand on se casse la gueule, il n’y a personne pour nous soutenir. Notre appartemen­t sert déjà de garantie. Les gens pensent que nous avons droit à des aides, mais un gérant n’est jamais indemnisé. Aucun salaire. Zéro euro par mois. Il faut se débrouille­r avec ça. »

« Je l’ai choisi »

« Je ne multiplie pas les prix par dix. Je n’ai pas de Rolex. Et je prends une semaine de vacances par an. Quand j’y arrive », poursuit Nicolas. Il redoute l’effet boomerang : « Les créances que je n’honore pas aujourd’hui, je devrai les payer demain. » Il s’apprête à travailler sept jours sur sept en décembre. « Je ne veux pas faire celui qui pleure : ce statut, je l’ai choisi. J’arrive à remplir le frigo et mes gosses ne manquent de rien. Alors je n’ai pas envie de me plaindre. » Mais il pense avec nostalgie à ceux qui ont connu la période faste. «Les années 80. Tout en cash et pas encore d’internet. » Seul réconfort, les attentions de ses clients fidèles. « Je les sens impliqués, ils connaissen­t notre vie, ils s’en soucient. On voit un regain d’intérêt pour le commerce de proximité. » En retour, il multiplie les petits gestes. Sans pouvoir casser les prix comme certains consommate­urs le voudraient. «Je ne peux pas me tirer une balle dans le pied. À ceux qui croient pouvoir faire leurs courses de Noël à moitié prix, je vais expliquer que le Black Friday, cette année, il est mort de la Covid. »

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(Photo Eric Ottino) Nicolas a regardé l’allocution du Président avec son épouse Alexandra et leurs deux filles.
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