Milan, infirmier affecté
Benoît, 25 ans, est interne en pneumologie. Il a déjà huit années d’études de médecine derrière lui et sera diplômé dans trois ans. En stage depuis un mois au centre hospitalier de Grasse, il est arrivé en pleine crise : « C’était le début du deuxième confinement, le nombre de cas explosait. » Le jour de cet entretien, six lits de réanimation et dix-sept lits sur vingt dédiés à la Covid étaient occupés…
« Deux médecins de l’hôpital nous ont expliqué qu’ils allaient avoir besoin d’aide. Nous avons, de notre côté, monté une ligne d’internes pour participer au service Covid créé à Grasse. »
Sur vingt-quatre internes, vingt y participent, par roulement et sur la base du volontariat. En travaillant pleinement, comme n’importe quel médecin, mais jamais seuls, toujours en binôme avec un senior.
Leurs missions : « A l’hôpital de Grasse, la mise en place du traitement et la surveillance ont été protocolisées. Tout a été fait pour que l’on ne se perde pas dans les informations. On est au courant de toutes les évolutions, mises à jour, nouveautés. Notre rôle, c’est de venir aider les médecins, de faire les entrées, de gérer les patients Covid qui demandent une attention particulière. »
« Des complications, des décès »
Pour les « vieux » internes, qui avaient déjà vécu le premier confinement, il était évident que la crise allait repartir. « Nous étions bien plus préparés : comment s’habiller, comment se désinfecter, comment respecter les gestes barrières… » Les nouveaux ont bénéficié d’une formation spécifique.
Pas question de relâcher la vigilance. «On connaît tous des gens plus ou moins sceptiques, que ce soit dans notre famille ou à l’extérieur, des gens que l’on voit sans masque. Nous nous rendons compte que cette maladie est toujours aussi grave. C’est souvent la famille, malheureusement, qui prend la mesure de la Covid lorsqu’un de ses membres est hospitalisé, sans possibilité de visite mais avec une communication par visioconférence. Et de notre côté, il est parfois assez dur de voir qu’un patient va mal, alors qu’on n’aurait jamais pensé qu’il puisse être concerné. Un jeune de 29 ans, par exemple. Si les personnes âgées sont les plus touchées, nous voyons bien que n’importe qui peut être impacté. » « C’est aussi par le bouche-à-oreille que nous essayons de faire comprendre qu’il faut respecter les gestes barrières. Les hôpitaux ont été submergés, nous avons encore beaucoup de patients Covid. Ce n’est pas quelque chose de banal que l’on suit facilement en plaçant sous oxygène. Il y a des complications, des décès. »
F. L.
Milan, 20 ans, est élève infirmier. En deuxième année, il doit s’accommoder d’une suspension de sa formation qui pourrait durer jusqu’au mois de janvier. C’est vrai de tous les instituts et écoles de la région Sud : Nice, Cannes, Menton, Saint-raphaël, Aix-en-provence, Digneles-bains…
Lui est volontaire. Comme environ 80 camarades de sa promotion, sur 140. Tandis que les aides-soignants appelés à devenir infirmiers doivent, eux, se conformer à cette obligation, étant payés par le CHU. Milan sera rémunéré. Mais c’est aussi par solidarité qu’il s’est inscrit. Une façon d’apporter sa pierre à l’édifice. Ce qui lui permettra, accessoirement, de ne pas perdre son temps, cette expérience pouvant compenser utilement l’arrêt des cours, même distanciels.
Milan estime devoir à la négligence d’une partie du public d’être provisoirement privé de son école et d’aller sur le front. Pour sa part, il s’attend à tout découvrir, n’ayant pas encore été confronté à la réalité des services hospitaliers. Il s’y prépare, non sans appréhension : « La réanimation, c’est chaud… »