Nice-Matin (Cannes)

« La souffrance des policiers »

- THIERRY PRUDHON

Après trois mandats et demi de maire à Mandelieu, j’avais atteint un certain degré d’usure, de lassitude. On peut toujours le nier, certains maires l’atteignent plus tard, mais il était là. Et puis les années passant, on est forcément moins connecté à l’air du temps, il faut laisser de nouvelles idées s’exprimer. » Depuis octobre 2017 – il a alors succédé à Louis Nègre, le maire de Cagnes touché par le cumul des mandats –, Henri Leroy a trouvé un nouveau souffle au Sénat, où il vient d’être réélu pour six ans sur la liste des Républicai­ns, fin septembre. Un engagement qu’il vit à fond, comme le prolongeme­nt de sa vie antérieure. « Le Sénat est la chambre des collectivi­tés. Il constitue pour moi l’opportunit­é de mener un combat contre les pesanteurs administra­tives qui empoisonne­nt la vie des maires, en essayant de transforme­r les lois pour leur faciliter la vie, à la lueur de ce que j’ai connu sur le terrain et en restant en contact étroit avec les maires actuels. » Il peste encore contre un code des marchés publics, et des charges trop lourdes pour les entreprise­s françaises, qui l’ont parfois empêché de choisir des sociétés locales pour des aménagemen­ts à Mandelieu. Au Palais du Luxembourg, tout ne va certes pas sans freins. « Je suis toujours révolté, mais je ne suis en aucun cas frustré par la tâche que j’accomplis. Je suis dans la déterminat­ion pour faciliter la vie des maires, dont le rôle est de plus en plus compliqué, et partant de citoyens qui ne comprennen­t plus des lois parfois désuètes. Les trois quarts du temps, par des amendement­s, nous parvenons à faire évoluer les projets de loi. J’ai donc trouvé au Sénat ce pour quoi j’y suis venu, au sein d’une équipe de cinq sénateurs [tous LR] très soudée », souligne-t-il. S’il juge nécessaire un renouveau régulier des maires pour apporter du sang neuf, le doyen des sénateurs azuréens, 75 ans, met en avant le vécu pour faire la loi ou la contrôler. « C’est bien que le Sénat se rajeunisse, du fait de la parité et du non-cumul des mandats, mais il est utile que ceux qui y arrivent aient l’expérience de la gestion d’un exécutif local et des qualités que cela implique. Il doit rester la chambre des sages, de ceux qui tirent des leçons de leurs expériment­ations pour faire évoluer les lois. » Lui qui est resté simple conseiller municipal à Mandelieu, « sans délégation ni indemnité », précise-t-il, aimerait que la loi sur le non-cumul des mandats autorise au moins les sénateursm­aires pour les communes « qui laissent du temps, jusqu’à 15 000 habitants ». Henri Leroy évolue d’autant plus comme un poisson dans l’eau au Sénat qu’il a pu y intégrer la commission des lois. L’ancien officier de gendarmeri­e, qui a notamment servi en Nouvelle-calédonie et à Toulon, y est devenu le référent des questions de sécurité [lire par ailleurs]. « Je suis un réactif, assume-t-il mais je me suis aperçu en vieillissa­nt que le dialogue, l’union, permettent de positiver les choses. » S’il s’assume comme «leplusà droite » des sénateurs azuréens, il « Je mesure, tous les jours, la souffrance des policiers. »

Requinquer la sécurité. C’est le cheval de bataille d’henri Leroy, qui a notamment conduit une mission d’enquête de six mois sur le sujet en . « Sa dégradatio­n est le résultat de trente ans de manque de considérat­ion et de moyens. Recrutemen­t, dotation matérielle et formation ont été délaissés. Il est indispensa­ble de les réajuster, sans quoi on va aller vers le far-west. Le projet de budget  stagne, mais le plan de relance va attribuer  % de plus aux forces de sécurité. C’est un premier pas, le tiers de ce qu’il faut faire, il faudra donc que ce plan soit triennal car le chantier est énorme. » Entre autres suggestion­s, il plaide pour l’oralisatio­n des procédures, avec l’aide des nouvelles technologi­es, pour décharger les policiers des tâches administra­tives, « pouvoir passer du défensif à l’offensif ». Et redonner de la considérat­ion aux forces de sécurité : « Durant mon enquête, j’ai visité des bâtiments dans un état de délabremen­t sans pareil. Il faudrait un milliard rien que pour rénover ceux de la gendarmeri­e. » Le sénateur insiste, insupporté par les campagnes de dénigremen­t : « Sans les forces de sécurité, nous vivrions dans un état de terreur. Mais qui veut encore être policier ou gendarme aujourd’hui ? Ils se font insulter, cracher dessus, traiter de racistes et de violents. C’est désespéran­t. Il faut relancer la motivation et soutenir la police. Dans deux corps qui regroupent   agents, il y a inévitable­ment des accidents. Mais ils sont composés de gens motivés pour faire leur travail le mieux possible. Les forces de sécurité ne sont pas racistes ! Un policier ne se lève pas en se disant qu’il va casser de l’arabe ou du Noir, mais pour assurer la sécurité publique. »

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Le rôle des maires est de plus en plus compliqué...”

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(Photo N.-M.) « Je ne transigera­i jamais avec mes valeurs : je crois au travail, j’aime la France, son identité, son histoire. »

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