Nice-Matin (Cannes)

Sébastien Olharan, l’envol d’un jeune homme pressé

Plus jeune maire des le Breillois de 27 ans (LR) a créé la sensation des départemen­tales en raflant le dernier bastion communiste. Le « bébé Ciotti » a bien grandi.

- CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr

Breil-sur-roya, municipale­s de mars 2008. Dépouillem­ent des bulletins de vote. Un ado accompagne sa mère. «Je crois que c’est là que j’ai eu le déclic, se souvient Sébastien Olharan. Après ça, je me suis dit : je veux faire de la politique ! »

Défi relevé. En 2020, ce Breillois de 26 ans devient maire à son tour. Le plus jeune des Alpes-maritimes. Un an de plus, et le voici propulsé au conseil départemen­tal. Pas le benjamin, mais presque. Il lui a fallu signer un exploit. Sébastien Olharan, en tandem avec Céline Duquesne, chipe à la gauche son bastion historique de Contes, fief du communiste Francis Tujague. Cette fois-ci, l’affaire ne s’est pas jouée au premier tour mais à 142 voix près. Un point d’écart. La victoire n’en est que plus savoureuse pour LR. Cela vaut bien les vivats de la foule, dimanche soir, dans les jardins du Départemen­t. On félicite le jeune élu, ému. On l’embrasse. On se l’arrache. « Un aboutissem­ent », pour Sébastien Olharan. Et si ce n’était qu’un début ?

Du Départemen­t à l’assemblée nationale

« J’étais chez moi », confie le champion du soir à l’applaudimè­tre. Car c’est ici qu’a germé sa carrière. Aux côtés d’eric Ciotti, puis de Charles-ange Ginésy. «Je l’ai eu comme stagiaire au Départemen­t. C’est Gilbert Mar y [exconseill­er général] qui l’a amené, rembobine Bertrand Gasiglia, membre du cabinet Ginésy et proche de Ciotti. Sébastien finissait ses études à l’institut d’études politiques de Bordeaux. Il était passionné de politique. Il avait déjà en tête d’être candidat à Breil. Il me demandait : “Je ne suis pas un peu jeune ?” » On connaît la suite.

Pourtant, la politique n’avait rien d’une évidence. «Àla maison, on n’en parlait jamais », jure Sébastien Olharan. Un nom basque. Celui de Bertrand Olharan, feu son grand-père monté à Paris. Il y rencontre Simone Pastorelli, une Breilloise. Bernard, leur fils, passe ses vacances dans la Roya. Devenu douanier, il demande à y être muté. Retour aux origines familiales. Dans cette vallée où l’ingénieur Antoine Recugnat, arrièregra­ndpère de Sébastien Olharan, contribua à la création de la ligne Breil-vintimille. Olharan, un pur produit local donc.

L’effet Alex, mais pas que…

Bertrand Gasiglia se souvient : « Il avait la passion de sa commune dans le sang ». La politique aussi. Fort d’un master « métiers du politique », le jeune homme s’y frotte auprès d’eric Ciotti. En stage au Départemen­t,

où il s’occupe de ses éléments de langage. Puis à l’assemblée nationale.

S’ensuivent neuf mois à frapper aux portes closes… avant un retour au cabinet Ciotti. Il devient chef du protocole. Puis chargé de missions green deal et smart deal pour Ginésy. Bref, «il sait comment on monte un dossier de subvention­s, souligne Bertrand Gasiglia. Sa formation et l’expérience qu’il a accumulée l’ont aidé face à la tempête Alex. » Justement. Ce sont les voix de la Roya, et celles de la Bévéra, qui lui ont permis de l’emporter. Le fruit d’une gestion de crise largement saluée, de la Covid à Alex. « Il a fait son baptême du feu. Il a démontré qu’il était capable d’assumer, pas seulement pour sa commune mais pour toute une vallée, salue une habitante de la Roya, qui préfère rester discrète. Ila conscience de la souffrance de la population, beaucoup d’empathie. Et ses Facebook live ont été très appréciés, dans des villages en manque d’informatio­ns. »

La com’, Sébastien Olharan connaît. Les médias aussi. Il a été le correspond­ant de Nice-matin à Breil de 2014 à 2018. André Ipert, l’ancien maire poussé dehors, a vu éclore «ce “bébé Ciotti” avec une grande ambition personnell­e ». Il reconnaît ses qualités de « travailleu­r, qui connaît bien ses dossiers ». Mais il relève que le tombeur de Francis Tujague a bénéficié des « votes favorables du RN. Quand on est dans la ligne d’eric Ciotti, c’est plus facile… Il se donne une image d’ouverture, mais je pense qu’il est assez formaté par son mentor. Et qu’il rêve d’une droite radicale plus que sociale ».

Le nouvel élu de la « vallée rouge », tenant d’une droite plutôt droitière ? L’expression fait rire Sébastien Olharan. Lui se revendique d’« une droite sociale et conservatr­ice ». La conseillèr­e régionale Valérie Boetti-forestier (Modem), avec qui il travaille main dans la main depuis 2015, relativise : «Les étiquettes, on s’en fout ! C’est l’intérêt des population­s qui prime. Nous sommes les héritiers du gaullisme social de Gilbert Mary. Notre recette : être des travailleu­rs acharnés, au plus près des gens. »

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Il a conscience de la souffrance de la population ”

Il bluffe son monde par sa maturité de vieux briscard

Mary, Ciotti, Ginésy, Boettifore­stier, mais aussi Rey, Beck, Guibal… Tous ont contribué à l’envol de Sébastien Olharan. Un jeune élu qui bluffe son monde par sa maturité de vieux briscard. Et qui inspire la méfiance à ses adversaire­s. En témoigne Valérie Tomasini, battue avec Francis Tujague

: « Il ne s’est jamais caché de vouloir faire carrière en politique. Et quand on est un carriérist­e de la politique, on n’est pas forcément près des gens. » L’élue tendasque persifle : « Ciotti a trouvé son “petit ”. Un héritier. Il ira loin, certaineme­nt. »

Valérie Boetti-forestier voit déjà en lui « un futur grand de la politique », lui promet même « un destin national ». L’intéressé calme le jeu. «Je ne m’interdis rien. Mais dans l’immédiat, je n’ai pas envie de m’éparpiller. J’ai déjà une responsabi­lité immense avec la reconstruc­tion de Breil et de la vallée de la Roya. »

Le « bébé Ciotti » a bien écouté les conseils. Ceux de Bertrand Gasiglia, par exemple. « L’avenir n’est jamais tout tracé - surtout en politique ! Il faut d’abord assurer la stabilité de sa base. Mais il est élu dans une vallée qui a besoin de personnali­tés fortes. Je pense qu’il est à même de réussir. »

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Un carriérist­e de la politique. ”

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(Photo Frantz Bouton) Le tout nouveau conseiller départemen­tal, dimanche soir dans les jardins du Départemen­t.
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