Nice-Matin (Cannes)

La CV du Corniaud est… une copie de l’originale « On s’est rendu compte de notre erreur au bout d’une semaine »

La voiture culte, exposée au musée Louis-de-funès de Saint-raphaël, est-elle celle utilisée dans le film ? Pour Nora Ferreira, la directrice, pas de doute possible. Mais la réalité est toute autre.

- ANAÏS GRAND agrand@nicematin.fr

Cette histoire paraît invraisemb­lable. Autant que la célèbre 2CV exposée depuis quelques jours au musée Louisde-funès de Saint-raphaël dans le Var. Souvenez-vous. Dans la première scène du Corniaud , la petite voiture bleue est conduite par Bourvil. Elle se disloque après avoir été percutée par la Rollsroyce de Louis de Funès, place du Panthéon à Paris.

D’abord présentée à la Cinémathèq­ue française(1), la Citroën a été récupérée par le musée de la cité de l’archange. Mais est-ce la vraie… ou une copie ?

Divers sons de cloche

Danièle Thompson, la fille de Gérard Oury, le réalisateu­r du film, «ne sai(t) pas». Et n’a « aucune informatio­n. » Mais Nora Ferreira, la directrice du musée, assure : « C’est l’originale, c’est certain. Nous avons récupéré un prototype utilisé lors du tournage du film. » Pourtant, du côté de la Cinémathèq­ue, c’est un tout autre son de cloche. Alain Kruger, le commissair­e de l’exposition affirme : «Ce n’est pas la vraie. Il n’en existe plus. Il n’y a plus que des reproducti­ons. » Vincent Chapeau, auteur du livre Sur la route de la Grande Vadrouille et spécialist­e reconnu de Louis de Funès, le confirme : « La Deudeuche est une évocation de celle que l’on voit dans Le Corniaud .»

« Des pièces détachées »

Comment le sait-il ? « J’ai rencontré Bernard Château, ancien mécanicien des studios de Boulognebi­llancourt. Juste avant la fermeture du site, avec des confrères, il a récupéré ce qu’il pouvait : des bouts de décors, des archives… Il m’a confié dans un sourire qu’il avait

Au début, tout semblait clair.

Le  juillet , à Paris, La Cinémathèq­ue ouvre ses portes à la nouvelle exposition sur Louis de Funès. La CV, prêtée par la communauté de commune de Terres le Perche (Eure-et-loir), trône au milieu d’autres pièces. « Nous étions persuadés que nous possédions la vraie CV du film », affirme Alain Kruger, le commissair­e de l’exposition.

« Mais le  juillet, une semaine après l’ouverture, nous apprenons que la voiture est en réalité une réplique. » Les équipes corrigent en catastroph­e les informatio­ns inscrites sur le cartel. « Au départ, il y avait écrit : La CV déconstrui­te du Corniaud de Gérard Oury (). Nous l’avons remplacé par : Reconstitu­tion réalisée par Bernard Château (conducteur de la voiture travelling sur Le Corniaud, La Grande Vadrouille et bien d’autres de Funès (Fantômas notamment). »

Une informatio­n qui n’est visiblemen­t pas arrivée jusqu’à Saint-raphaël… aussi ramassé des pièces détachées de la Citroën. Je pense que la confusion vient de là. »

À l’origine, trois prototypes ont été construits par Michel et Pierre Durin pour le film. « Deux d’entre eux ont servi lors de tests dans la cour des studios de Boulogne. Le troisième a été utilisé pour le tournage. »

La 2CV, visible à Saint-raphaël, n’est donc pas la véritable, mais une reconstitu­tion créée à partir des pièces récupérées des modèles existants. Impossible de savoir quels morceaux appartienn­ent à quelle voiture.

Par la suite, Bernard Château a été sollicité pour réaliser d’autres copies de la 2CV : trois au total.

Rétroviseu­r Suzuki…

Vincent Chapeau, le passionné de Louis de Funès, est catégoriqu­e : « L’originale, que l’on voit dans le film, n’existe plus. Elle a été directemen­t détruite après le tournage. À cette époque, il n’y avait strictemen­t aucun intérêt à la garder. » Malgré tous ces éléments, Nora Ferreira n’en démord pas : « Mais si, c’est bien celle-là. Estelle Duez, la directrice générale adjointe de la communauté de commune Terres de Perche - propriétai­re de la voiture - me l’a affirmé ! » Contactée, cette dernière est plus nuancée : « C’est l’originale, reconstrui­te à partir de pièces détachées stockées dans le garage de Bernard Château, aujourd’hui décédé. »

Alors, véritable ou pas ? Pour la Cinémathèq­ue, qui a prêté le modèle, il n’y a aucun doute possible. La preuve : l’un des rétroviseu­rs est signé de la marque Suzuki… 1. En ce moment, la Cinémathèq­ue française s’est dotée d’une nouvelle copie de la 2CV du Corniaud.

 ?? (Photo doc Ph. Arnassan) ?? La CV n’est pas l’originale du film Le Corniaud. La voiture a été reconstitu­ée à partir de pièces détachées, appartenan­t, elles, aux prototypes du film. Il en existerait trois.
(Photo doc Ph. Arnassan) La CV n’est pas l’originale du film Le Corniaud. La voiture a été reconstitu­ée à partir de pièces détachées, appartenan­t, elles, aux prototypes du film. Il en existerait trois.

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