Écologie : dans le Var, le Château de Berne épinglé
Ce 27 février 2019, quand les agents de la réserve naturelle nationale de la plaine des Maures ont aperçu au loin des panaches de fumée, ils ne se doutaient pas de l’ampleur du « désastre ».
En s’approchant des différents brasiers non surveillés situés au sein du domaine viticole Clos de Maurin, appartenant au Domaine du Château de Berne, ils constatent que d’importants travaux de défrichements sont en cours. Sans autorisation, en plein coeur de la réserve naturelle fréquentée notamment par les tortues d’hermann… Au total, ce sont plus de cinq hectares de milieu naturel de cette espèce protégée qui ont été altérés ou détruits. Lors de leur contrôle, les agents découvrent même une tortue décédée et une autre, agonisante, qui devra être euthanasiée. Un lézard vert occidental est également retrouvé sans vie. «Les travaux ont eu lieu sans autorisation dans le périmètre de la réserve naturelle, en pleine zone Natura 2000 et dans un secteur classé rouge pour la préservation des tortues d’hermann, pointe la conservatrice de la réserve naturelle nationale Marie-claude Serra à la barre du tribunal correctionnel de Draguignan. Ce niveau de protection renforcé est obligatoirement connu des exploitants agricoles ! »
Plus d’un million d’euros de dommages et intérêts
Sur le banc des prévenus, l’ancien directeur général du Domaine du Château de Berne ne conteste pas la réalité des travaux et s’étonne que la société mandatée pour exécuter les travaux n’ait pas été renvoyée à ses côtés. Mais surtout, à ses yeux, une demande de dérogation n’était pas nécessaire. « Le règlement de la réserve naturelle exempte de demande de dérogation les travaux d’entretien quand l’activité agricole était préexistante à sa création, en 2009, souligne Me Florent Ladouce. Or, le défrichement a eu lieu sur d’anciennes parcelles de vignes. Cette zone était en jachère depuis des années. Le Château de Berne, qui venait d’acquérir le Clos de Maurin, souhaitait juste la remettre en activité. » « La preuve n’a pas été apportée que les parcelles défrichées étaient à destination agricole auparavant », conteste la substitut du procureur Estelle Bois, qui requiert une même peine de six mois d’emprisonnement avec sursis et 40 000 euros d’amendes à l’encontre de l’ancien dirigeant et du directeur d’exploitation. Ses réquisitions vont plus loin en ce qui concerne la SA Château de Berne : 80 000 euros d’amende et une obligation de remise en état des lieux sous six mois sous peine d’astreinte.
Sur le banc des parties civiles, plusieurs associations de défense de l’environnement France Nature Environnement Paca et 83, la Station d’observation et de protection des tortues et de leurs milieux (Soptom) et la LPO Paca - ont fait valoir un préjudice écologique important, estimant les dommages et intérêts que devrait verser le Domaine Château de Berne à plus d’un million d’euros. Le délibéré sera rendu le 24 septembre.