Nice-Matin (Cannes)

Mistral gagnant

Sudiste sacré dans le Nord, Christophe Galtier devrait amener un souffle nouveau au Gym.

- WILLIAM HUMBERSET

Le feuilleton est enfin terminé, Christophe Galtier est le nouvel entraîneur de L'OGC Nice. Un épilogue que l'ancien coach du Losc n'a jamais imaginé devoir attendre si longtemps après avoir confié dès janvier, puis de nouveau en avril, ses envies de départ à Olivier Létang. Mais le président lillois a joué le temps et la surenchère jusqu'à ce 28 juin libérateur. « Christophe est un homme honnête, vachement droit. C'était impossible qu'il annonce vouloir quitter Lille sans avoir eu un accord de son président », souffle un proche du Marseillai­s.

‘‘Galette’’ n’a pas voulu « démentir » tout ce qui a été raconté à son sujet. Mais il ressentira forcément une pointe d’amertume au moment de retrouver Lille et Olivier Létang, dès la prochaine 2e journée de championna­t. « Christophe tient toujours ses engagement­s et sa parole. Il écoute et joue cartes sur table, décrit Bernard Caïazzo, son président pendant 7 saisons à L'AS Saint-etienne. Mais attention, il ne faut pas le trahir ! » « C’est un vrai gars du Sud, un sanguin, rigole Philippe Mazzuchett­i, Niçois qui fut son coéquipier d'une saison à Nîmes (1994-1995). Il est franc, spontané. S'il faut dire merde, il dira merde. Il peut être très impulsif, mais il est surtout sans concession. On l’aime ou on ne l’aime pas. Moi, je vois un mec en or. » Suspendu six mois en 2000 pour avoir été accusé d'agression sur Marcelo Gallardo, alors qu'il était adjoint de Bernard Casoni à L'OM, Galtier, « un homme entier », n'a pas toujours su réagir à moitié face à la provocatio­n. « Si un joueur lui fait à l'envers, il déguste, avertit le président des Verts. Je me souviens d'un geste d'humeur de la part d'un joueur à sa sortie du terrain, il y a 5-6 ans. C'était très chaud dans le vestiaire, Christophe voulait en venir aux mains, ses adjoints ont dû le retenir. C'est un homme avec un grand H, un vrai. Ce n'est pas un rigolo qui parle. Il n’a peur de rien. Il aime tellement ses joueurs que j'avais excusé sa réaction. Il a une autorité de grand frère, c'était une réaction émotionnel­le face à un manque de respect. »

Le respect est une valeur fondamenta­le du clan Galtier. Dans le staff, le boulot comme la famille. Régine, sa femme qui vit à Cassis et dont il souhaitait se rapprocher, son fils Jordan, nommé coach-adjoint à L’AC Ajaccio, et John Valovic, son beau-fils qui gère ses intérêts, sont « des personnes de grande qualité » nous assure-t-on. « John dénote dans le monde actuel des agents peu scrupuleux et vénaux, » ajoute un homme influent du football français.

Enfant des Caillols, Galtier a effectué sa formation, ses premiers pas profession­nels et ses débuts sur un banc avec l'olympique de Marseille. Estampillé OM, l'ami d'enfance des Cantona a forgé son expérience au gré de ses rencontres. Le défenseur de 19 ans « plein d’énergie, sérieux, bosseur, solide, généreux et joyeux » qu’a connu Jacky Bonnevay à ses débuts (1985-87) était devenu un chef de file dix ans après dans le Gard. « C’était l'une de ces saisons galères que tu

‘‘ Un homme avec un grand H, qui n’a peur de rien ”

préfères oublier à la fin de ta carrière, plaisante Mazzu, ancien Aiglon formé au Gym (1985-1992). Mais tu gardes en mémoire l'esprit de certains mecs, Christophe fait partie de ceux-là. Pour son accent marseillai­s, sa gueule, son charisme. Il avait tout pour lui. C'était un super joueur de ballon qui savait mettre le bleu de chauffe quand c'était nécessaire. Il était capitaine en sélections de jeunes, tu sentais déjà l'âme d'un leader. »

Membre de la dernière équipe de France Espoirs championne d'europe (1988) aux côtés de Laurent Blanc, Alain Roche, Franck Sauzée et Eric Cantona, le joueur Galtier n'a jamais raflé de titre en club malgré deux finales de coupe de France perdues avec L’OM. Une anomalie qu’il rectifie en tant qu’adjoint d’alain Perrin, à Sochaux, avec une finale remportée face à... Marseille, en 2007. Le premier sacre d’une associatio­n qui sera fructueuse à L’OL (champion de L1 en 2008) pour un technicien qui s’était déjà nourri du savoir-faire de Gérard Gili au Sporting Club de Bastia (2002-04). « Je me souviens de quelqu’un de très cool, proche des joueurs. Assez chambreur aussi, rembobine Chaouki Ben Saada, qui sortait à peine du centre de formation corse à l’époque.

Il préparait les séances, s’occupait de la mise en place des entraîneme­nts avec José Pasqualett­i, mais il restait en retrait dans les discours. Il avait un oeil reculé. »

« Il a suivi un parcours linéaire en tant qu’adjoint. Ça me donne l’impression qu’il s’est donné les moyens d’atteindre le haut niveau.

Il a appris au contact de gens brillants et modérés comme Gili et Perrin, admire Jacky Bonnevay, adjoint de Claude Puel à Saintetien­ne. Jusqu’à ce qu’alain lui donne l’opportunit­é de tenter sa chance et prendre son envol avec les Verts. »

« Il n’a jamais cherché à prendre le poste de numéro 1, il était sur le point de partir quand nous avons mis fin à notre collaborat­ion avec Perrin, raconte Bernard Caïazzo. C’est Alain qui l’a convaincu de se lancer. Christophe progressai­t chaque année en tant qu’adjoint. Parce qu'il est intelligen­t, il capte, applique et améliore même. Sa soif d'apprendre et de progresser était énorme, mais il restait très humble. »

S’en suivront huit saisons réussies, dont une Coupe de la Ligue (2013) qui met fin à 32 ans de disette et offre un retour sur la scène européenne au peuple vert, six ans après la dernière campagne.

« Christophe sait s’entourer, partager ses compétence­s.

‘‘ Enfin un coach qui construit des équipes à son image ! ”

Avec Thierry Oleksiak, un gars extraordin­aire aussi, ils ont ajouté le travail à la créativité. Leur départ a été une première cassure psychologi­que avec le football pour moi, concède leur patron dans le Forez. C’est un peu comme si quelqu’un de votre famille quitte le pays. Plus rien ne sera comme avant. » « Fidèle », «loyal» envers ses dirigeants, ‘‘Galette’’ l’est aussi en amitié. Julien Fournier « n’a jamais perdu le fil » avec son coéquipier de padel. Jean-pierre Rivère a rapidement adoubé le Marseillai­s et le trio partageait de longues conversati­ons sur la pelouse avant chaque match qui les opposait. Alors qu’il luttait pour le maintien pour sa première saison à Lille, Galtier avait confié ses inquiétude­s quant à la fragilité de son groupe à quelques minutes d’affronter l’équipe de Lucien Favre. Chose qu’il ne fera jamais en public assure Caïazzo.

« Il défend toujours l'institutio­n, ne se plaint jamais. Il aurait pu, quand il arrive à Lille en décembre (2017), Lopez était critiqué. Mais il est resté droit, n’a jamais cherché d'excuse. Pour être deuxième l’année suivante, puis champion trois ans après. C’est très fort. » D’autant que l’exploit au nez et à la barbe du PSG a été réalisé sans Luis Campos ni Gérard Lopez, les principaux artisans du projet lillois. « Il a su protéger ses joueurs malgré les bouleverse­ments traversés par le club, note Philippe Mazzuchett­i. Je revois le joueur qu’il était, un meneur d’hommes à la Deschamps. Qui t’envoyait une dose d’adrénaline et te foutait les poils par ses discours ! Ses équipes lui ressemblen­t. Enfin un coach qui construit des équipes à son image ! Je m’ennuyais devant les matchs du Gym, je trouvais ça plat. Là, je sais que les joueurs vont avoir envie de mourir sur le terrain pour lui ! »

Couronné à Lille, ‘‘Galette’’ est déjà adoubé à Nice.

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