L’antibois Samir Aït-saïd porte-drapeau !
Le gymnaste antibois Samir Aït-saïd et la judokate Clarisse Agbegnenou ont été élus par leurs pairs porte-drapeaux de l’équipe de France.
Il a d’abord cru à une blague. Une sorte de canular, monté de toutes pièces par un ami ou une connaissance. Sauf que Samir Aït Saïd était bien le destinataire du coup de fil. Dimanche soir, le gymnaste de 31 ans a mis quelques secondes à réaliser. A comprendre ce que le CNOSF lui annonçait. Le porte-drapeau de la délégation française aux Jeux Olympiques de Tokyo, ce sera lui. Le premier gymnaste de l’histoire à endosser ce costume. L’antibois, né à Champigny-sur-marne mais devenu figure de la cité des Remparts. Lui le battant. Le vaillant. Freiné mais jamais stoppé. Le 23 juillet prochain, il guidera le contingent tricolore aux côtés de la judokate Clarisse Agbenegnou. Pour la première fois, un duo mixte (et donc respectant la parité) sera chargé de montrer la voie tricolore.
« C’est une fierté de porter toute une nation », a-t-il commenté, hier soir sur France 2.
Préparation densifiée
Un signe fort. Cinq ans après les Jeux de Rio, lointain souvenir embrumé par une triste sortie. Une impulsion au saut de cheval, quelques secondes en l’air et une mauvaise réception. Lorsque Samir ouvre les yeux, sa jambe est à l’équerre. Double fracture tibia péroné. Rideau. La compétition est terminée avant d’avoir vraiment commencé. Le garçon peine à y croire, mais ne veut pas tomber dans la fatalité. Il faut digérer, avant d’y retourner. La rééducation est longue. Le seigneur des anneaux s’accroche. Tient bon. Le cap, c’est Tokyo. Rien d’autre. Il affronte les épreuves. La disparition de son papa, à qui il avait promis de décrocher l’or aux JO. Le report de l’échéance, chassée par un virus que personne n’avait senti venir. Le temps est long, il faudra en profiter. « La vie nous réserve des coups durs et il y a deux façons de réagir : soit tu baisses les bras et t’abandonnes comme un lâche, soit tu te bagarres pour atteindre tes objectifs et rendre fiers tes proches, réagissait-il, fin 2019 dans nos colonnes. La première solution ne me passe même pas par la tête.»
Le chef de file de l’olympique d’antibes essaie d’en faire abstraction. Densifie sa préparation, y ajoute de la piste, de la boxe et du jujitsu brésilien. Il se fait mal, mais sait pourquoi. Grimper sur le podium au Japon. La plus haute marche et rien d’autre. En octobre 2019, il décroche une médaille de bronze aux mondiaux en Allemagne et obtient son précieux sésame pour Tokyo.
« Vous vous êtes trompé »
Alors, forcément, lorsque le téléphone a sonné dimanche soir, difficile de croire à cette nouvelle tâche qu’on lui confie. Une mission, une de plus. « Il avait l’impression d’être dans un rêve, confie son entraîneur Rodolphe Bouché, à ses côtés depuis des années. Pour lui, c’était la même sensation que le jour de sa blessure. C’était tellement improbable, il a dit : ‘‘Vous vous êtes trompé de numéro !’’»
Sur France 3, l’intéressé a confirmé en se marrant. « Pendant cinq secondes je n’ai pas parlé. Moi, Samir Aït Saïd, porte-drapeau ? Mais non ! »
Il lui reste à savourer. Ajuster les derniers réglages et caler soigneusement ses polos tricolores au fond de ses bagages. Le reste appartient déjà à l’histoire.