Ils veulent sauver les huiles essentielles
La culture de la lavande, l’un des emblèmes de la Provence, et d’autres plantes à parfum, aromatiques et médicinales, serait menacée par un projet de la Commission européenne.
C’est un projet qui donne de l’urticaire à toute une filière, celle des plantes à parfum, aromatiques et médicinales (PPAM) dont la lavande est le fer de lance. Dans le cadre de sa nouvelle stratégie pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques, l’union européenne pourrait considérer l’huile essentielle de lavande, mais aussi celles du thym, du romarin, et d’autres, comme dangereuses pour la santé. Avec pour conséquence de restreindre, voire d’interdire, leur usage, notamment dans certains produits (cosmétiques, parfums, lessives, aromathérapie…). Sur le plateau de Valensole, comme dans le haut Var où sont installés des lavandiculteurs, cette démarche est vécue comme une véritable déclaration de guerre. Et comme dans tout conflit, la résistance s’organise.
Une pétition atteint signatures
Les lavandiculteurs ont commencé à alerter l’opinion publique en juin. De grands panneaux « Lavandes en danger, cessation d’activité » ont fleuri dans les champs. Ils ont aussi lancé une pétition citoyenne (1). Hier, elle recueillait plus de 192 114 signatures, chiffre en hausse constante. « Les huiles essentielles et les produits naturels risquent de disparaître des produits de grande consommation en raison de nouvelles méthodes d’évaluation et réglementations inadaptées aux produits naturels et imposées par l’europe », explique Alain Aubanel, président de l’union des professionnels des PPAM (lire page ci-contre). Par exemple, le traditionnel savon à la lavande pourrait être interdit. Les lavandiculteurs et producteurs demandent à la Commission européenne une approche spécifique et adaptée aux huiles essentielles et globalement aux produits naturels, qui garantissent la protection du consommateur et de l’environnement. Ils défendent aussi une culture et des paysages, car la disparition des huiles essentielles signifierait la disparition de leurs métiers et des champs de lavande dans le sud de la France. Au-delà de leur avenir propre, ils font valoir que d’autres corporations seraient impactées si le projet va à son terme car il aurait par ricochet des répercussions sur la filière apicole et la filière touristique, victimes collatérales.
Comme souvent, s’agissant d’un sujet à forte connotation régionale, la politique s’invite dans le débat. La Région Sud, qui a même payé une page de pub dans un quotidien national pour évoquer ce sujet, et plusieurs autres élus, comme Christophe Castaner, ont attiré l’attention du gouvernement.
Un comité interministériel consacré au sujet
Le ministre de l’agriculture, Julien Denormandie, a confirmé lors d’une réunion le 9 septembre, la mise en place d’un comité interministériel « huiles essentielles » afin de « définir la meilleure stratégie pour défendre la lavande et les huiles essentielles au niveau européen ». Le lendemain, le président de la République a exprimé son soutien à la filière.
« Le premier objectif d’obtenir un soutien national est atteint, se réjouit-on à l’interprofession, où l’on reste vigilant. Le travail ne fait que commencer. Il s’agit désormais d’élaborer des propositions concrètes adaptées aux huiles essentielles, en concertation avec les autorités. »