Nice-Matin (Cannes)

Marilyn, Shirley : les aventures américaine­s

Carole Amiel, la dernière compagne d’yves Montand, raconte dans un livre la vie sentimenta­le de ce grand séducteur.

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Dans Yves Montand - La force du destin, Carole Amiel a l’élégance de s’effacer, laissant toute sa place à Simone Signoret. Le contraire aurait choqué, mais cette humilité honore la dernière compagne qui n’élude rien du passé sentimenta­l d’un grand séducteur, dont les conquêtes ont alimenté les gazettes. On n’évoque jamais Shirley Maclaine. Qui, selon plusieurs membres de l’entourage de Montand, a plus compté pour ce dernier que l’emblématiq­ue liaison avec Marilyn Monroe, icône du XXE siècle. De cette « love story », éphémère mais hypermédia­tisée, il avait parlé sans fausse pudeur à Carole Amiel, qui nous raconte.

Des stars viennent voir le show

Montand arrive en 1959 à New York. Son manager américain, Norman Granz, s’est occupé d’obtenir son visa. Ce qui n’était pas tout à fait une formalité, compte tenu d’affinités longtemps affichées à l’égard du régime communiste. Montand doit se produire durant trois semaines dans un théâtre de Broadway. Ganz le lui a promis : « Tant que la salle est à moitié pleine, tu restes. »

C’est un carton. Des stars viennent voir le show, dont Lauren Bacall et Marilyn Monroe. Cette dernière revient même le lendemain avec son mari Arthur Miller. Pendant sept semaines, le public est au rendez-vous. Mais le théâtre a pris d’autres engagement­s, Montand est contraint de quitter la scène. Ses premiers pas sur le Nouveau Continent sont un immense succès. Et sa prestation dans le Dinah Shore Show, une émission de télévision très populaire, a dopé sa notoriété.

« J’avais Marilyn pour moi tout seul »

Carole Amiel : « Six mois plus tard, lorsqu’on cherche un partenaire pour Marilyn Monroe dans Le Milliardai­re, tout Hollywood refuse, aucun acteur n’ayant envie de servir la soupe à Marilyn. Elle parle de lui. Le rôle lui est aussitôt proposé. Montand signe avec la Century Fox. Il ne parle pas un mot d’anglais, mais ce serait fou de décliner. » Concomitam­ment, Simone Signoret reçoit l’oscar de la meilleure actrice pour Les Chemins de la haute ville. Presque cinquante ans avant Marion Cotillard, Juliette Binoche recevant une statuette entre-temps, mais pour un second rôle. Commence le tournage du Milliardai­re. Arthur Miller et Marilyn Monroe s’installent au Beverly Hills Hotel, bungalow 21. Yves Montand et Simone Signoret occupent celui d’à-côté. « Ils sont copains, tout se passe bien. Montand et Marilyn se sentent assez proches. Ils ont les mêmes origines, pauvres. Elle a vécu avec une star du baseball, Joe Dimaggio, de racines italiennes. Tandis que Miller est un intellectu­el, comme Signoret qui a reçu une bonne éducation à Neuilly-sur-seine. Tout le monde s’entend donc à merveille. » Survient une grève des technicien­s qui prolonge le séjour. « Simone doit se rendre en Italie pour un film, tandis que Miller doit retourner à New York pour travailler sur le scénario des Désaxés. Montand et Marilyn vont passer des semaines ensemble, sans les conjoints ; arrive ce qui doit arriver. » Montand n’est pas du tout dans l’idée de la prendre pour maîtresse. Il le dira plus tard à Carole : « J’avais Marilyn pour moi tout seul, mais je ne la voyais pas. » D’abord, il ne comprend rien de ce qu’elle lui dit. Il a appris son texte phonétique­ment. Et se demande, par exemple, pourquoi l’on parle sans cesse sur le tournage d’une bicyclette, quand chacun ponctue ses phrases du mot « basically ». On en est là…

« Une paysanne autrichien­ne »

Montand a compris que, si Marilyn arrive toujours en retard sur le plateau, ce n’était pas pour embêter l’équipe, mais parce qu’elle est terrorisée. « Elle était toute simple. Montand me disait que, démaquillé­e, on aurait dit une paysanne autrichien­ne, tant elle avait une peau blanche, et belle, avec ses grands yeux bleus. De toute façon, Montand a toujours préféré les femmes démaquillé­es. » Rien n’est prémédité. Pas même ce « kissing good night » lorsque Montand vient dire bonsoir à Marilyn.

L’actrice, à bout de forces, a prié la fille du comédien Lee Strasberg de le prévenir que, si elle n’était pas apparue ce jour-là, il ne s’agissait en aucun cas d’un caprice. Il veut la rassurer. Lui expliquer que non, il n’est pas fâché. Un baiser qui dérape. « C’est quand même Marilyn, il est Montand. Montand, seul aux Étatsunis depuis un mois. »

Carole Amiel croit savoir que Marilyn a été plus amoureuse que luimême ne l’était. « Il venait de vivre dix ans de passion avec Simone. Sans un accroc. Pas un seul écart de conduite ; il me l’a toujours dit. » Montand parlait de Marilyn avec « une tendresse infinie », témoigne sa dernière compagne. «Il ne la voyait pas en superstar. Mais avait de l’affection pour cette jeune femme charmante, un peu perdue, qu’il préférait, encore une fois, mal coiffée, démaquillé­e, et non pas en Marilyn, telle qu’elle était sur le plateau. » Montand l’a dit aussi à Carole : « Si Simone avait claqué la porte, je serais sûrement retourné aux États-unis. »

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(Collection Yves Montand-valentin Livi) À la fin des années , Yves Montand et Marilyn Monroe ont vécu une liaison retentissa­nte.

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