Nice-Matin (Cannes)

La semaine vagabonde de Denis Carreaux

- Directeur des rédactions du groupe Nice-matin edito@nicematin.fr

Lundi

Mirage électrique. Tiens, Noël approche. Le ministre des transports Jean-baptiste Djebbari sort de sa hotte 500 millions d’euros pour accélérer le déploiemen­t des bornes de recharge électrique. Il est effectivem­ent grand temps d’accélérer. Ceux qui s’apprêtent à franchir le pas doivent le savoir : recharger un véhicule électrique ailleurs que chez soi ou au bureau est une gageure, hormis pour les possesseur­s de Tesla dont le réseau spécifique maille efficaceme­nt le territoire. Alors que le gouverneme­nt tablait sur 100 000 bornes fin 2021, la France en compte à peine 50 000. L’auteur de ces lignes en a fait l’expérience : beaucoup sont inopérante­s et la plupart nécessiten­t un temps de charge trop long qui vous ferait regretter le temps béni des stations-service. Si on ne veut pas que la voiture zéro émission reste un mirage, il faudra davantage de volonté et de moyens. Une sorte de « quoi qu’il en coûte » de l’électrique.

Mardi

L’arroseur arrosé. Il voulait faire parler de lui, c’est réussi. Passons sur les images improbable­s de la déclaratio­n de candidatur­e d’eric Zemmour, entre bande-annonce de film de série Z et sketch de Groland, pour nous attarder sur son attitude à la sortie du plateau du 20 h de TF1. Rembobinon­s un peu et souvenons-nous de ses prestation­s d’interviewe­ur dans l’émission de Laurent Ruquier, On n’est pas couché, sur France 2, dans laquelle il prenait un plaisir manifeste à mettre en pièces ses invités le samedi soir. Le même Eric Zemmour peut-il sérieuseme­nt qualifier le présentate­ur du JT de TF1 de « procureur » parce qu’il ne lui a pas posé les questions qu’il attendait ? Le traiter de « connard » en présence de la direction de la chaîne pour avoir oublié de lui cirer les pompes ? Eric Zemmour explique avoir fait sa mue. Il a un peu vite oublié qui il est.

Mercredi

Chastes oreilles. Encore un modèle du genre, ce document commis par la commissair­e à l’égalité de la Commission européenne pour « favoriser l’inclusion des citoyens ». Traduire, en français contempora­in : mieux intégrer les minorités. Pour éviter de heurter les non chrétiens, le document a préconisé dans un premier temps d’éviter de dire « Joyeux Noël ». Face au tollé soulevé, la Commission a revu sa copie, mais son livret conseille toujours, histoire de protéger les chastes oreilles, d’éviter l’emploi de l’expression « mesdames, messieurs », pas assez inclusive, ou de parler des « deux sexes » ,cequi pourrait froisser les autres. En agissant de la sorte, l’europe ne se contente pas de se couvrir de ridicule. Elle apporte de l’eau au moulin de ceux qui, à l’instar d’eric Zemmour, estiment qu’elle veut remettre en cause nos racines et notre identité.

Jeudi

Bertrand, la claque. Sa candidatur­e venait de loin. Convaincu de pouvoir réussir à la force de sa volonté et de susciter, seul, cette rencontre entre un homme et un peuple qui forge les futurs présidents, Xavier Bertrand ne passe pas même le cap du premier tour. Parti trop longtemps d’un mouvement qui le lui a jamais pardonné, le président des Hautsde-france s’est jeté dans un piège fatal en jouant le jeu du congrès. Pouvait-il faire autrement, sous peine de passer pour le diviseur, voire le fossoyeur de la droite ? Aurait-il pu financer sa campagne en dehors du parti ? Pas sûr. À moitié convaincu, Xavier Bertrand a quand même foncé tête baissée. Noyé dans la masse de ses concurrent­s, il a donné l’impression de subir des débats dans lesquels il ne s’est jamais senti à l’aise. Peut-être trop solitaire pour ce délicat exercice collectif, il sort de cette bataille amer, mais beau joueur vis-à-vis de Valérie Pécresse. C’est suffisamme­nt rare pour être souligné.

Vendredi

Les leçons de Cresson. Est-ce parce qu’elle est restée moins d’un an à Matignon qu’edith Cresson est sortie à ce point de nos mémoires ? À l’occasion des Entretiens de Royaumont, dont elle est un des nombreux invités avec Anne Hidalgo, Rachida Dati et Alain Juppé, on redécouvre la modernité de la seule femme à avoir occupé les fonctions de Premier ministre en France. À 87 ans, Edith Cresson porte un regard lucide sur la société et la politique. À l’origine de la création de l’école de la deuxième chance, elle a su, pour faire grandir son idée, transcende­r les clivages en s’appuyant notamment sur l’ancien maire de Marseille Jean-claude Gaudin. Aujourd’hui, l’ex-premier ministre socialiste ne tarit pas d’éloges sur l’action de Valérie Pécresse à la tête de la Région Ile-de-france. « Elle ferait un travail tout aussi remarquabl­e dans d’autres fonctions », estimait récemment Edith Cresson, impatiente de voir les femmes accéder enfin aux plus hautes fonctions de l’état, plus de trois décennies après sa nomination à Matignon.

Samedi

Pécresse, quelle droite ? Sans surprise, Valérie Pécresse remporte le duel face à Eric Ciotti. Si cette course à l’investitur­e a redonné de la visibilité et du crédit aux Républicai­ns, elle s’est illustrée par un fort virage à droite. Après la séance de qualificat­ions à cinq, la campagne présidenti­elle, la vraie, prendra nécessaire­ment une forme différente pour Valérie Pécresse. Quelles idées va-t-elle défendre ? Quelle droite ? Celle, décomplexé­e, qui l’a portée à l’investitur­e après avoir mis Eric Ciotti en tête au premier tour ou celle, plus modérée, qui semblait être la sienne il y a deux ans au moment de son départ des Républicai­ns, un parti qu’elle estimait alors « cadenassé dans ses idées » ? Trouver la clé ne sera pas évident.

« Eric Zemmour explique avoir fait sa mue. Il a un peu vite oublié qui il est.. »

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