Russes et Ukrainiens du Var racontent leurs points de vue et leurs inquiétudes
À Fréjus, où elle travaille dans la boulangerie achetée par son mari depuis 6 ans, Oksana Khyliuk, est inquiète. Née d’un père russe (décédé) et d’une mère ukrainienne, elle est en contact quotidien avec sa famille qui vit près de Nicolaev, une grande ville à 400 km au sud de Kiev.
« Je les appelle tous les jours et j’aimerais qu’ils viennent vivre en France. Ici, il y a de l’avenir ». Ce qui n’est pas le cas, à ses yeux, du pays où elle est née : « l’ukraine est une place pour jouer pour Poutine. La Russie est un pays agresseur. » Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, élu en avril 2019, souhaite un rapprochement avec l’union européenne mais également adhérer à l’otan, ce qui impliquerait l’intervention des pays membres de l’alliance atlantique en cas d’agression militaire.
« Je ne veux pas que mon fils aille faire la guerre »
« Les Russes et Poutine veulent récupérer des terres ukrainiennes, dont une partie (le Donbass et la Crimée, Ndlr.) sont ukrainiennes mais peuplées de Russes. Qu’ils aillent vivre en Russie », dit la Fréjusienne d’adoption.
« Il n’y a pas de sécurité en Ukraine, poursuit-elle. Depuis le début de la crise, des gens, des civils, meurent, je connais un jeune de 20 ans qui est mort. Je ne veux pas que mon fils ou mon gendre aillent faire la guerre ».
Une crainte qui n’est pas partagée de l’autre côté du département varois. Du moins en apparence... À Toulon, dans les magasins d’alimentation russe, les affaires priment sur la géopolitique. « Moi, je suis russe, et mon employée est ukrainienne, relève la gérante de l’épicerie Inter Market. Nous ne sommes pas là pour faire de la politique, mais du commerce...» Quelques kilomètres plus loin, Kateryna avoue regarder d’un oeil distrait la situation se tendre entre les deux pays. « Je suis en France depuis 16 ans, confie l’ukrainienne, derrière la caisse de son magasin Katusha à Saintjean-du-var. L’ukraine, c’est loin. On ne sait pas grandchose... C’est difficile de se faire une idée sans être sur place. Où est la vérité ? Chacun défend ses intérêts. »
« Nous prions tous les jours pour la paix »
Français mais descendant de Russes blancs, issus de l’immigration accueillis en France après la révolution de 1917, Georges Zapolsky ne cache pas en revanche une certaine inquiétude. Le président de l’association de la communauté orthodoxe de tradition russe dans le Var est donc satisfait de voir le président de la République prendre « l’initiative de rencontrer les protagonistes, pour entendre et comprendre ». «Ilyaunjeu géopolitique qui nous dépasse, mais il faut aussi se souvenir de l’histoire des nations, explique-t-il. Des décisions prises dans le passé et qui n’ont pas été respectées, notamment sur la militarisation de certains États... J’espère un dénouement heureux. Au sein de l’église orthodoxe de Toulon, nous prions tous les jours pour la paix. Car personne ne peut se satisfaire d’une guerre entre deux peuples qui partagent les mêmes origines ! »