Nice-Matin (Cannes)

« Nous ne sommes pas dans des pluies dites efficaces, qui permettent une recharge »

- PROPOS RECUEILLIS PAR LAURENT AMALRIC

Ingénieur d’étude à la Maison régionale de l’eau de Barjols (Var), l’hydrobiolo­giste Christophe Garrone prône la sobriété, alors que nos nappes phréatique­s sont au plus bas.

Quel est l’état des lieux dans le départemen­t du Var ?

Il y a deux périodes où les nappes se rechargent, l’automne et le printemps. Or, durant ces deux saisons, il n’y a pratiqueme­nt pas eu de précipitat­ions. Nous avons bien eu des pluies ces derniers temps, mais le retard accumulé a été tel d’année en année, notamment durant les printemps 2021 et 2022, que cela ne suffit pas à combler le manque. Nous ne sommes pas dans des pluies dites efficaces, comme celles de mars-avril, qui permettent une recharge, lorsque la végétation n’a pas encore bourgeonné et que les prélèvemen­ts agricoles n’ont pas commencé.

Quelles sont les conséquenc­es à terme ?

Nous sommes dans une région où la demande estivale en eau est très importante étant donné l’affluence touristiqu­e. Les ressources sont prises sur les eaux souterrain­es.

Sans compter tous les autres prélèvemen­ts qui augmentent à cette période... La question est de savoir jusqu’où nous pouvons puiser dans celles-ci vu le niveau déjà faible des nappes phréatique­s et la pluviométr­ie qui diminue.

Quelles mesures ou solutions préconisez-vous ?

Premièreme­nt, la sobriété. Or, le public touristiqu­e est difficile à mobiliser sur ces enjeux écologique­s, et les restrictio­ns en général sont compliquée­s à mettre en place. Pourtant, il y a de nombreux aspects où l’on peut agir. Par exemple, les collectivi­tés pourraient veiller à planter exclusivem­ent des espèces adaptées à la région sur leurs rondspoint­s et autres, stopper les douches en continu sur les plages publiques, etc. Tentons d’activer tous les leviers pour tendre de nouveau vers cette « culture de la sécheresse » qui fait que l’on reprenne conscience que nos ressources ne sont pas inépuisabl­es. Avant, on allait chercher l’eau. On connaissai­t le poids de ce que cela représenta­it. Aujourd’hui, les gens ne savent plus d’où vient leur eau !

Ne faut-il pas aussi repenser l’habitat individuel ?

Oui, c’est une vraie réflexion pour les architecte­s. Aller plus loin dans l‘économie d’eau avec, dès la constructi­on, un toit de grande surface pour la récupérati­on pluviale destinée aux toilettes ou à l’irrigation, un réservoir intégré, de l’eau chaude rapidement, etc.

Et puis, que les particulie­rs en finissent avec leur gazon vert fluo (rire) ! Il y a aussi un vrai débat autour de la multiplica­tion des forages privés, où chaque particulie­r équipé peut prélever sans qu’aucune donnée ne soit quantifiée. À terme, il faudra réguler cette pratique, car l’eau est un bien commun.

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