Nice-Matin (Cannes)

Sound designer, « celui qui refait les sons d’un film »

Installé à Cannes depuis un peu plus d’un an, Nicolas Tran Trong est chef monteur son. Il a notamment travaillé sur « Rebel », qui sera présenté en séance de minuit au Festival de Cannes.

- ELODIE LONGÉPÉ elongepe@nicematin.fr

Quand il a commencé ses études de cinéma, dans les années 2000, « c’était les débuts du MP3, le numérique commençait à s’imposer et le marché du disque s’effondrait… À mon époque, il ne fallait plus penser à la musique. » Alors, il choisit de se spécialise­r dans le « son à l’image ». « Même quand j’ai pris cette spécialisa­tion je ne savais pas vraiment ce que j’allais faire derrière. »

Le cinéma, Nicolas Tran Trong aimait ça. Mais sans plus. Le goût s’est prononcé au fil des ans, à force de travailler sur des courts et longs métrages. Désormais, lorsqu’il parle de son métier, sound designer – ou chef monteur son – la passion est bien là.

1er long-métrage pour Nicolas Bary

Il reste modeste, explique sa carrière par un coup de chance : « Celle de tomber sur un réalisateu­r, Nicolas Bary, qui allait devenir quelqu’un. Parce que ce n’est pas toujours le cas, voire quasiment jamais en fait. »

Ensemble à l’école de cinéma, le réalisateu­r lui confie le son de son long-métrage, Les enfants de Timpelbach, coproduit par la Belgique et le Luxembourg.

Puis tout s’emballe.

« Le Luxembourg m’a demandé si je pouvais travailler sur des films làbas. Je suis devenu un peu indispensa­ble, personne n’avait mes compétence­s. »

Il s’y est installé. A enchaîné les films. « Je bossais non-stop. À 29 ans j’étais chef de projet. J’ai installé des méthodes dans un pays où il n’y avait rien… »

Libre échange, Nuit Blanche, Plan de table, Dead Man Talking, Une Histoire d’amour, Möbius, Boule et

Bill, Disparue en hiver, Drôles de petites bêtes, Effacer l’historique, Préjudice, Sentinelle, Colonia …Autant de films passés entre les mains expertes de Nicolas Tran Trong tout au long de sa carrière. Et même Rebel, qui sera présenté en séance de minuit au Festival de Cannes.

6 à 8 semaines de travail

« C’est un film qui va, à mon avis, cartonner. C’est sur le Djihad. L’histoire d’un Bruxellois qui part en Syrie, avec de bonnes intentions. Mais se retrouve un peu piégé… Son petit frère finit par le prendre comme modèle et se fait embrigader. C’est le combat d’une mère pour aller retrouver son deuxième fils. Tourné un peu comme un documentai­re… »

Mais c’est quoi, exactement, le rôle de Nicolas ?

Lorsqu’un film est tourné, le micro capte surtout la voix des comédiens. Les bruits alentour sont peu perceptibl­es sur l’enregistre­ment et doivent alors être ajoutés en postproduc­tion.

Et ça, c’est le rôle du sound designer.

« On refait tout le son d’un film. On garde les voix si elles sont bien, sinon on les réenregist­re en studio. Moi, je ne m’occupe ni des voix ni de la musique, mais de tout le reste. Mais c’est un travail d’équipe, je suis aussi là pour superviser et demander des choses, notamment aux équipes de bruitage. Je récupère tous les sons et je fais ma sauce avec. » Sur un film classique, Nicolas Tran Trong peut travailler jusqu’à 6 à 8 semaines.

Sons de vent, d’appartemen­t…

Des sons d’appartemen­ts, le bruit de la mer, des vêtements qui se froissent, de la pluie qui tombe sur un toit en tuile, sur le toit d’une voiture, des bruits d’ambiance de restaurant, de couverts qui s’entrechoqu­ent, de feu qui crépite, de vent, de branches qui craquent, de portières qui se ferment – le bruit n’est pas le même si on se trouve à l’intérieur ou à l’extérieur du véhicule, de la marque…

« Si je mets une fréquence très très basse durant tout le film, à peine perceptibl­e, ça va donner envie de vomir. C’est physique. Comme pour le film Irréversib­le de Gaspar Noé : les gens quittaient la salle en plein film, durant le festival de Cannes, il y a une quinzaine d’années. »

Des milliers de petits bruits auxquels on ne fait pas forcément attention mais qui participen­t à l’ambiance du film, à plonger le spectateur dans l’histoire. Indispensa­ble, donc.

■ Rebel, film hors compétitio­n, projection le 26 mai à 00 h 15, au Grand théâtre Lumière. https://www.festival-cannes.com

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(Photo E. L.) Nicolas Tran Trong sonorise les films.

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