La brebis à cinq pattes
Le suspense commence à durer trop longtemps. La nature, même politique, a horreur du vide. Emmanuel Macron a certainement des raisons pour prendre son temps. Mais comme personne ne les connaît, ces raisons – même pas, affirment-ils, ses proches –, comme au surplus c’est la première fois sous la Ve République que le Premier ministre n’est pas nommé, dans la foulée, ou presque, de l’investiture
du Président, l’interrogation sur l’identité du futur, ou de la future, occupante, de Matignon nourrit conversations et commentaires depuis trois semaines. Dans les colonnes des journaux, sur les plateaux de télévision, chacun se creuse la cervelle pour donner un nom à celui, ou à celle, qui décrochera la timbale. Nous possédons certes quelques informations : la personne choisie doit avoir la fibre sociale, pour diriger la réforme des retraites, ainsi qu’un profil écologique, pour répondre au défi du climat, lutte qui figurera dans ses responsabilités directes. N’oublions pas non plus (mais cela commence à être bien tard), qu’il devrait, en principe, diriger la campagne des législatives qui a déjà commencé sans lui, ou elle.
Depuis quelques jours, la recherche des commentateurs, qui, le plus souvent, n’ont pas d’informations plus crédibles que quiconque, s’oriente vers une personnalité féminine. Pourquoi ? Tout simplement car le chef de l’état en a évoqué la possibilité et que les Français, a priori, y sont plutôt favorables. Le choix est ouvert, car les femmes occupent désormais de nombreux ministères et pas seulement ceux de seconde importance, contrairement à ce qui fut longtemps le cas. Alors qui ?
Les langues vont bon train. La brillante directrice de l’unesco ou l’actuelle ministre du travail, l’ancienne porte-parole de Nicolas Sarkozy, aujourd’hui présidente du Grand Reims, ou la ministre de l’industrie dans
« Imposer une femme à Matignon va dans le bon sens. »
le gouvernement sortant ? Une femme Première ministre ? Depuis la nomination d’édith Cresson par François Mitterrand en 1992, il y a trente ans, aucun autre Président ne s’y est risqué, tant l’opinion publique, à ce sujet, est fluctuante : il suffit d’une gaffe ou d’une erreur, pour que ce qui est, aux yeux des Français, supportable de la part d’un homme devienne une condamnation à la démission pour une femme.
Mais enfin, si l’une des grandes causes d’emmanuel Macron est, comme il le dit, l’égalité des hommes et des femmes, choisir et imposer une femme à Matignon va dans le bon sens.
Voilà pourquoi il cherche aujourd’hui, et a peut-être déjà trouvé, la brebis à cinq pattes.