Borne dans le grand bain
Tout juste nommée Première ministre, Élisabeth Borne se retrouve déjà face à une double urgence : constituer son équipe gouvernementale et mener la bataille des législatives.
Élisabeth Borne a déjeuné hier avec Emmanuel Macron à l’élysée, où elle a passé trois heures à plancher avec le chef de l’état sur la composition du futur gouvernement. Celuici pourrait être dévoilé aujourd’hui ou demain, avant le prochain Conseil des ministres organisé vendredi. Selon l’entourage de la nouvelle cheffe du gouvernement, les deux têtes de l’exécutif penchent d’abord pour une nouvelle équipe gouvernementale « resserrée » ,qui sera ensuite étoffée dans un deuxième temps, probablement après les législatives des 12 et 19 juin.
« Très bonne campagne à tous ! »
Car c’est d’abord en tant que patronne de la majorité que l’ex-ministre du Travail, des Transports et de la Transition écologique aborde ses fonctions, avec pour feuille de route de donner à nouveau une majorité à la macronie à l’assemblée nationale. Elle a choisi pour directeur de cabinet Aurélien Rousseau, 45 ans, ancien directeur général de l’agence régionale de Santé d’ile-defrance, ex-directeur adjoint de cabinet des Premiers ministres socialistes Manuel Valls et Bernard Cazeneuve. « Courage à tous, très bonne campagne à tous ! », a-t-elle lancé, selon des participants, hier matin aux députés de la macronie réunis au Palais-bourbon, souhaitant « la majorité la plus large possible » pour « porter » le « programme clair et ambitieux » du Président.
Pas d’état de grâce face aux oppositions
Elle-même jamais élue, elle se présente dans la sixième circonscription du Calvados, qui avait placé nettement en tête Emmanuel Macron aux deux tours de la présidentielle. Selon son entourage, elle devrait y faire campagne dès la fin de la semaine. Devenue lundi la deuxième femme à diriger le gouvernement français sous la Ve République, 30 ans après Édith Cresson, Élisabeth Borne, 61 ans, est relativement peu connue des Français. Ancienne du Parti socialiste, cette diplômée de l’école nationale des Ponts et chaussées et de Polytechnique a notamment été présidente de la RATP, grande entreprise publique de transports, après avoir été une pupille de la Nation suite à la mort de son père alors qu’elle avait 11 ans.
« C’est une femme remarquable, au parcours républicain exemplaire. Elle a connu le monde de l’entreprise et connaît bien l’état. C’est la bonne personne pour relever les défis du moment », s’est félicité le président LREM de l’assemblée nationale, Richard Ferrand.
Pour autant, Élisabeth Borne ne peut pas compter sur quelque état de grâce face aux oppositions : l’insoumis Jean-luc Mélenchon la considère comme « parmi les figures les plus dures de la maltraitance sociale » dans la macronie, tandis que la RN Marine Le Pen pronostique la « poursuite de la politique de mépris, de déconstruction de l’état, de saccage social ». À l’image du secrétaire général de la CGT Philippe Martinez - « elle écoute mais elle n’entend pas » -, la plupart des responsables syndicaux jugent Élisabeth Borne, qui a notamment conduit la réforme de l’assurance chômage et l’ouverture à la concurrence du réseau SNCF, ouverte à la discussion mais souvent trop peu encline à dévier de sa ligne.
Attendue sur le pouvoir d’achat
C’est sur le pouvoir d’achat, sujet de préoccupation numéro un des Français, qu’elle devra d’abord convaincre, dans un contexte de forte inflation. Elle est surtout attendue au tournant pour lancer la réforme explosive des retraites.
Et il y aura « deux chantiers à ouvrir très vite : l’organisation territoriale de la santé, et l’organisation nationale de l’éducation nationale et de sa déclinaison locale », a rappelé le patron des députés LREM, Christophe Castaner, sur France Inter, promettant « concertation » et « débats » de la part de cette ancienne préfète, qui devra incarner la « méthode refondée » promise par Emmanuel Macron.