Ce qu’attendent les étudiants… ...et ce que font les établissements
Thomas Barré, 28 ans, est en deuxième année à l’institut de formation en soins infirmiers (IFSI) de la Croix-rouge à Nice. Un changement de carrière après avoir été brancardier pendant plusieurs années, mais toujours la même idée : prendre soin des autres. Fort de son expérience, des stages qu’il a déjà effectués et de ses relations avec ses pairs et soignants (il est investi dans la Fédération nationale des étudiants en sciences infirmières ou Fnesi), il pose un regard lucide sur la situation. Et les écueils apparaissent dès les études. «Les conditions d’apprentissage se sont dégradées. Augmenter les quotas, former plus d’étudiants, ça ne sert à rien s’ils ne vont pas au bout. La Fnesi a réalisé au printemps 2022 une enquête sur le bien-être des étudiants infirmiers, et les résultats sont inquiétants : 61,4 % d’entre eux disent que leur santé mentale s’est dégradée depuis le début de leur formation (contre 52,5 % en 2017). La conséquence est claire : le nombre d’abandons avant l’obtention du diplôme augmente. On en a recensé 1 300 entre 2018 et 2021 en France. » Voilà pour le constat. Que faire, alors ? Thomas Barré avance des pistes. « L’accueil en stage est régulièrement soit inexistant, soit catastrophique. On vous appelle “le stagiaire”, vous n’êtes pas intégré à l’équipe. Vous êtes considéré comme de la main-d’oeuvre alors que vous êtes en formation. Ça ne donne pas envie ! » Il poursuit : «En ce moment, je suis en stage dans un Ehpad. Ce n’est pas ce vers quoi je me destine. Pourtant les conditions sont optimales, je suis bien encadré, je me sens respecté, du coup je me dis que je pourrais tout à fait venir travailler dans cet établissement s’il avait besoin de moi pour une vacation. C’est comme ça pour tous les étudiants. » Il pointe aussi que lorsque cela se passe mal pendant les stages, il est difficile de le faire remarquer. «Sivousdites quelque chose, vous risquez que l’on vous mette une mauvaise note. Or si vous ne validez pas le stage, vous devrez en refaire un pendant l’été. Or à cette période, beaucoup travaillent pour financer leurs études. » Autre angle d’attaque : « Le projet professionnel. Lorsque vous débutez, vous pouvez projeter de faire d’autres formations. Si celui qui veut vous recruter ne le prend pas en compte, jamais vous n’irez chez eux. Il ne faut pas oublier que l’intérim nous permet de travailler à peu près quand on veut, où on veut.
Si les établissements veulent recruter de manière pérenne, ils doivent écouter nos souhaits. »