« Nous permettre de concilier vie perso et vie pro »
Laurence, Nadine, Nadia… Elles sont infirmières et aides-soignantes au CHU de Nice, et connaissent par coeur les difficultés auxquelles sont confrontés les professionnels de santé. Elles parlent au côté du secrétaire départemental de la branche santé des Alpes-maritimes de FO, Michel Fuentes, qui connaît la situation des hôpitaux du département. « Le Ségur, en octroyant notamment 183 euros sur la fiche de paie, a aidé mais cela n’a pas stoppé l’hémorragie », analyse ce dernier. « Dans les Alpes-maritimes, nous n’avons pas l’indemnité de résidence pour vie chère. Or le coût de l’immobilier est élevé. Comment voulez-vous qu’une aide-soignante se loge à Nice ou à Cannes ? »
Pour autant, le niveau de rémunération est loin d’être l’unique problème. « Nous nous battons pour avoir des places en crèches. Les soignants qui veulent avoir des enfants sont, à un moment ou à un autre, confrontés à cela. Si l’on facilitait l’accueil des tout-petits, en particulier en prenant en compte les horaires décalés, cela changerait tout ! Par ailleurs, la société a évolué, il faut prendre en compte les différents modes de vie : les parents solo se retrouvent souvent dans la galère lorsqu’au dernier moment, on leur demande de faire une garde supplémentaire. Si on ne l’a pas en tête, on ne comprend pas pourquoi des gens changent de métier. »
« Cercle vicieux »
La question du temps de travail est, elle aussi, épineuse. « Lorsque l’on embauche, que l’on vous dit que vous serez sur 12 heures par jour et que finalement on vous passe en 7 h 42, là aussi, c’est difficile à gérer. Car cela signifie que vous avez moins de jours de repos dans la semaine. Que ce soit dans un sens ou dans l’autre, ces changements modifient votre organisation personnelle. Cela a de quoi crisper. » On ferme des lits parce qu’on manque de personnel. Et on manque de personnel parce que les conditions de travail sont très pénibles. « C’est un cercle vicieux, s’accordent à penser les infirmières et aides-soignantes. Nous savons bien que c’est partout la même chose, nous en discutons régulièrement avec nos consoeurs et confrères des autres établissements. Penser que l’on pourrait passer d’un service à l’autre pour pallier les absences, c’est mal connaître nos métiers. Nous ne sommes pas des pions. À chaque fois, les pratiques professionnelles sont spécifiques : on ne peut pas exercer le lundi en réa, le mardi en pédiatrie et le mercredi aux urgences. Pour l’instant, nous tenons parce que nous avons une conscience professionnelle, mais peut-être qu’un jour, ce ne sera plus suffisant, que nous serons trop épuisés et à bout. Il ne faut pas oublier l’aspect humain, d’autant que tout cela rejaillit sur les malades. Il suffit de voir ces personnes qui attendent pendant des heures aux urgences : cela nous fend le coeur de voir ça. »
« Forte concurrence entre établissements »
Régulièrement, les établissements ont recours à des intérimaires, mais « cela cristallise des tensions, remarque Laurence Laporte, secrétaire FO à l’hôpital de Cannes. Des vacataires sont embauchés avec des salaires bien plus importants que les personnels en poste : forcément, c’est de plus en plus mal ressenti. Il y a une forte concurrence entre établissements. L’état doit prendre sa part et mettre des moyens. »