Michel-edouard Leclerc : « Que l’état nous laisse plus libres ! »
En visite au Leclerc d’hyères, Michel-edouard Leclerc a salué hier les producteurs varois, avec qui il travaille, et donné son sentiment avant l’annonce des mesures du gouvernement pour le pouvoir d’achat.
Les consommateurs se serrent la ceinture devant la flambée des prix actuelle. Comment y remédier ?
Nous, nous faisons notre part. On travaille sur un bouclier où on va sélectionner entre
100 et 300 articles de grande consommation et bloquer les prix après négociation. Et, si ça dérape, on émettra des tickets Leclerc de compensation en caisse pour combler la différence. On expérimente ça depuis deux mois en offrant des réductions ciblées. Car, vous le savez, on n’a pas le droit de vendre à perte ; donc, si mon produit augmente trop, je ne peux compenser que par ce système. Alors, je le fais. Plus généralement, je négocie durement avec les multinationales pour que la hausse des prix ne se répercute pas sur les consommateurs. Nous avons 18 millions de clients dans les centres Leclerc. On va les choyer !
Il n’empêche que les prix des pâtes ou du café se sont envolés partout…
Depuis un an, l’inflation chez Leclerc n’est que de 2,5 % pour le moment. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas des prix qui ont super augmenté comme les pâtes. Mais, en moyenne, on a très peu répercuté les hausses de prix. C’est vrai pour Leclerc, mais c’est aussi vrai pour Intermarché ou Lidl. Alors que Carrefour a déjà bien augmenté…
Et la moutarde, on n’en trouve plus en rayon, ici, par exemple ?
La moutarde, c’est ponctuel et causé par la sécheresse au Canada. Vous savez, on rencontre tous les ans ce phénomène de produits qui manquent. Il n’y a pas péril en la demeure. Car il faut faire attention quand même : on n’est pas en guerre, hein ? La vraie guerre, elle est là-bas en Ukraine. Nous, s’il y a des ruptures en rayons, on n’en meurt pas.
Alors, selon vous, quel serait le meilleur rempart à cette inflation galopante ?
La concurrence ! Aujourd’hui, il faut réactiver les politiques de concurrence, remettre en compétition, par exemple, toutes les grandes marques industrielles de l’agroalimentaire, du chocolat etc. Et puis, si ça flambe vraiment beaucoup, ça peut être un blocage des prix ? Mais ça ne peut pas être sur la durée. Un blocage des prix, c’est un moyen d’arrêter l’incendie mais ça demande de prendre des mesures d’accompagnement.
Et l’action de l’état, dans tout ça ?
Justement. Il faut que l’état nous laisse baisser les prix. Qu’il nous laisse plus libres pour combattre l’inflation actuelle. Depuis trois ans, pour éviter la guerre des prix dans la distribution, l’état nous oblige à prendre 10 % de marge minimum sur l’alimentaire.
J’ai écrit au président de la République en ce sens. Car si l’état supprimait ou suspendait le dispositif qui m’oblige à prendre 10 % de marge, on pourrait baisser les prix d’autant. C’est ma demande mais il n’y a pas de Parlement pour le moment (rires). Je demande aussi que soit nommé un ministre de la Consommation. Il n’y en a pas depuis des années. Pourtant, c’est important que quelqu’un représente l’intérêt des consommateurs, non ?
Et cette maudite inflation, va-t-elle durer ?
Hélas, on ne fait que rentrer dans une période difficile qui va durer probablement des mois, voire plus… L’inflation française risque de monter au-delà de 6 % ou 7 %. Elle est due à la désorganisation de la reprise post-covid. Chaque marché de matières premières a subi une flambée (cacao, café, verre, papier, aluminium…). On entre dans un grand cycle d’inflation qui rebat les cartes. Cela oblige donc à des efforts de tout le monde, d’un bout à l’autre de la chaîne, et pas seulement des distributeurs. Car le mur d’inflation est trop fort pour les consommateurs.