L’extradition d’un richissime homme d’affaires russe devant la justice à Aix
Le parquet général de la cour d’appel d’aix-en-provence a requis, hier, un avis défavorable à la demande d’extradition déposée par la Russie d’andreï Isaev, 63 ans, un richissime homme d’affaires russe.
Un mandat d’arrêt avait été émis contre lui le 17 avril 2020 par un tribunal de Saint-pétersbourg dans le cadre d’une affaire de « fraude à très grande échelle », comparable à la qualification française d’escroquerie au préjudice de la Baltic Bank, l’une des plus importantes de Russie, dont M. Isaev était actionnaire à hauteur de 50 %.
Les détournements allégués dans la procédure russe avoisineraient 12 millions d’euros et concerneraient l’appropriation illégale de terrains dans les principales avenues de Saint-pétersbourg.
Andreï Isaev avait été interpellé le 23 décembre 2020 pour un banal excès de vitesse sur l’autoroute près d’aix-en-provence, au volant de sa Bentley immatriculée à Monaco. Il avait été placé sous contrôle judiciaire et non pas sous écrou extraditionnel.
Pour l’avocat général Denis Vanbremeersch, la chambre de l’instruction de la cour d’appel doit prononcer un avis défavorable à la demande d’extradition au motif que les faits allégués par les autorités judiciaires russes sont prescrits, au regard du code de procédure pénale français.
L’enquête avait été déclenchée le 24 octobre 2016 pour des faits prétendument commis jusqu’au 21 septembre 2013.
Des « représailles » selon la défense
Évoquant la guerre menée par Moscou en Ukraine, M. Vanbremeersch a pris soin de souligner que ce contexte géopolitique « n’a d’influence que sur la partie administrative de la procédure d’extradition mais que la phase judiciaire doit être menée àsonterme» . Mes Louis Guesdon et Jean-françois Pedinielli, avocats de M. Isaev, ont invité eux aussi la chambre de l’instruction à prononcer un avis défavorable, ce qui mettrait un terme définitif à la procédure. Selon eux, l’exclusion de la Russie du Conseil de l’europe et sa sortie le 16 septembre de la Convention européenne des droits de l’homme privent les juges français des conditions légales d’extradition.
La défense a dénoncé cette procédure judiciaire russe comme une forme de représailles contre leur client, organisées selon elle par le groupe Alfa Bank et trois oligarques proches de Vladimir Poutine. Pour ses avocats, la machine judiciaire avait été mise en mouvement contre lui en raison de sa résistance et de son activisme judiciaire contre le groupe Alfa Bank qui, par le biais d’un « raid financier », avait pris le contrôle de la Baltic Bank. M. Isaev, oncologue ayant fait fortune en créant une des premières cliniques privées de Russie, avait déposé une plainte contre Alfa Bank. Les trois oligarques cités par la défense figurent sur la liste noire de l’union européenne et sont visés par des sanctions. La décision de la cour d’appel sera rendue le 6 juillet.