Nice-Matin (Cannes)

Sauveur Pecoraro, un coeur en or inoxydable

- SERGE JAUSAS

À 81 ans, Sauveur Pecoraro est toujours actif et motivé. Chaque jour, depuis 50 ans, il prend sa place devant son établi, dans sa bijouterie-horlogerie du boulevard Wilson. Il est réglé comme une pendule. L’heure c’est l’heure. Rien ne lui échappe. Il a le regard sur ses deux fils, Thierry et Jeanluc, son petit-fils, Julien, à qui il a transmis sa passion. Sous l’oeil vigilant de mamie Christiane. Car chez les Pecoraro, c’est une histoire de famille : rien ne se perd, tout se transforme... en amour et amitié.

1971 l’arrivée dans la cité

Toute une histoire pour le jeune Sauveur, d’origine italienne, né à Tunis. Avec son oeil malin, chargé de souvenirs, il raconte : «Ala sortie de l’école, j’allais chez mon oncle Arthur, horloger-bijoutier, pour le regarder travailler. Et comme tous les enfants qui n’avaient pas encore de mécano, je me suis donc mis à démonter montres et réveils. »

Passionné de mécanique de précision, et bercé par les tic-tac, il apprendra le métier et restera avec Arthur jusqu’à son service militaire. En 1962, il est appelé sous les drapeaux, à Sète, puis est affecté à Marseille pendant seize mois comme chauffeur de colonel. « À la caserne, mon placard était rempli de montres. Je réparais pour toute l’unité. »

Dégagé des obligation­s militaires, Sauveur retourne à Tunis et ouvre une bijouterie avec son frère aîné Vincent, marchand de biens. Ce dernier est à l’origine de l’installati­on à Antibes de toute la famille.

Une pince à billets offerte à Bébel

« Vincent est venu en voyage de noces à Antibes, explique Sauveur. Il a craqué. En revenant, il m’a dit : là-bas, il y a la mer, la montagne et la pêche, c’est pour nous ! Et si nous y allions tous ? Et nous sommes tous partis avec mes quatre frères – Vincent, Adrien, Guy et Louis – maman et papa Nonce qui a intégré le guichet de la banque du Crédit du Nord. »

C’était 1971, l’année de l’élection de Pierre Merli. Sauveur entre à la bijouterie Debove, rue de la République. Aujourd’hui Edgar Debove, 93 ans, se souvient de ce garçon talentueux travailleu­r et très appliqué.

Un apprentiss­age qui a permis à Sauveur de voler de ses propres ailes. « Avec mon frère Vincent, nous avons ensuite ouvert notre magasin au 41, boulevard Wilson. » Dans son atelier, tout est réalisé à la main : on fabrique, on façonne et on transforme. Bon pied bon oeil, depuis cinquante ans Sauveur travaille sans lunettes et, tel un chirurgien, avec une patience d’ange, il refait battre le coeur des montres, mais aussi réchauffe celui de ses clients devenus des amis.

Car Sauveur est un conteur au sourire enjôleur. Il a côtoyé le beau monde, la belle clientèle du Cap d’antibes et les artistes comme Aldo Maccione ou encore Jean-paul Belmondo : « Chez Mamo, au restaurant le Michelange­lo, je lui ai offert une pince à billets en or gravée Bebel, incrustée de brillants. » Une fierté pour lui ! Aujourd’hui encore, à la boutique c’est la maison du bon Dieu, le salon où l’on cause, car son plaisir, c’est de voir ses amis et les gens heureux autour de lui. Sauveur Pecoraro : c’est un coeur en or serti d’amitié !

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(Photo S. J.) Sauveur Pecoraro la fièvre du travail.

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