Vergers de Minelle : douche froide à Mandelieu
Alors que la Ville avait sanctuarisé les 17,5 ha en zone naturelle stricte, pour lutter contre les inondations, le tribunal administratif a jugé que plusieurs points n’étaient pas conformes.
Marche arrière. En juillet dernier – et après des semaines de tension – la commune de Mandelieu rachetait, pour 2 M€, 13,4 hectares (sur les 17,5) des Vergers de Minelle à L’immobilière Groupe Casino. Objectif : en faire une zone d’expansion des crues – la plus grande du département – du Riou de l’argentière. Pour le maire, Sébastien Leroy, un « élément central de la protection de l’aval du Riou et de ses quartiers » contre les inondations. Pour rappel, lors des intempéries du 3 octobre 2015, huit personnes avaient péri, à quelques centaines de mètres, boulevard de la Tavernière.
Un achat, dans la continuité de la révision du Plan local d’urbanisme ( PLU), acté le 17 décembre 2018, où la Ville avait sanctuarisé plusieurs zones – dont les Vergers – en zone naturelle stricte (N). Classement contre lequel plusieurs propriétaires [puisqu’il restait, si vous avez suivi, 4,1 ha n’appartenant pas à la Ville] avaient déposé des recours auprès du tribunal administratif de Nice. Qui leur a (en partie) donné raison.
Premier pas en arrière le 6 avril
Déjà, le 6 avril dernier, l’instance avait enjoint la Ville à revoir le zonage sur la parcelle de l’un desdits propriétaires. Arguant que le PLU est « entaché d’une erreur manifeste d’appréciation » et demandant le reclassement d’une partie de celle-ci en zone urbaine au lieu de naturelle ; et l’autre partie en zone naturelle, au lieu de zone naturelle de protection rapprochée de captage (Npr). Premier pas en arrière pour la « nature. »
Avant, le 8 juin, le second jugement. Le 23 août 2019, L’immobilière Groupe Casino attaquait, cette fois, la modification du PLU datée du 25 juin 2019. Celle-ci reclassait l’intégralité des Vergers de Minelle en zone naturelle stricte (N) au lieu de zone naturelle loisirs (Nl). Jargon administratif aux lourdes conséquences pour le groupe, détenteur du centre commercial voisin – et, donc, de parcelles sur les Vergers. Pourquoi ? Parce qu’en « Nl », il avait la possibilité de réaliser certaines constructions, à usage de stationnement ou encore de sport et loisir ; en « N » ? Rien.
Les 13,4 ha acquis « intouchables », mais le reste...
Basculement annulé par le tribunal, au motif que ce changement de zonage aurait dû faire « l’objet d’une procédure de modification de droit commun et non d’une modification simplifiée. » Alors, si Mandelieu garde la main sur la destinée des 13,4 ha acquis, le groupe la reprend, partiellement, sur ses propres parcelles. L’immobilière Groupe Casino qui, lors de cette même décision du 8 juin dernier, a, également, obtenu justice sur d’autres points. Concernant, cette fois, le PLU initial du 17 décembre 2018. Et plus indirectement liés (quoi que...) aux Vergers de Minelle.
D’abord, la non-obligation de garder 40 % (a minima) de surfaces non imperméabilisées – comprenez, pas bétonnées – sur sa propriété. Pourquoi ? Parce que les terrains de la zone commerciale sont classés en zone UZC, comme Les Tourrades qui, elles, n’ont aucune obligation. « Illégal » dit le tribunal.
Autre rejet : l’obligation (toujours fixée dans le PLU) de réaliser, pour chaque extension d’une surface plancher de 20 m2 ou plus, un bassin de rétention pluvial, à raison d’un volume de 100 litres par mètre carré imperméabilisé. «Erreur de droit et erreur manifeste d’appréciation. » Enfin, la hauteur des bâtiments.
Ainsi, lors des jugements du 6 avril comme du 8 juin, le tribunal laisse neuf mois à la Ville pour modifier les points mentionnés dans ses documents d’urbanisme.
La Ville va faire appel
Autant de décisions qui ont provoqué le courroux de Sébastien Leroy, qui n’a pas manqué de s’épancher sur ses réseaux sociaux.
« Nous avons classé ces terrains pour stopper l’urbanisation sur des secteurs à risque. Tout ça sur injonction du préfet, donc de l’état, s’émeut-il. Là, on supprime des possibilités de créer des bassins de rétention, on enlève toute limite à la hauteur des bâtiments. » Évoquant, aussi, le logement social – « comme on doit en faire, on laisse des terrains à l’urbanisation (1) » – le premier magistrat assure : « Nous allons faire appel. Pour contester des décisions qui, à mon sens, vont à l’encontre de l’histoire récente ; et parce que, si je remets ces terrains constructibles, j’engage ma responsabilité pénale en cas de catastrophe. »
On pensait, avec le rachat des 13,4 ha, en juillet 2021, le vieux dossier des Vergers de Minelle définitivement réglé. Affaire à suivre, finalement...
1. Lors du jugement du 6 avril 2022, le tribunal administratif avait déclaré, à propos des onze zones réservées par la Ville à la construction de logements – auxquelles n’appartenait pas la parcelle de la propriétaire requérante :« L’objectif de mixité sociale [Mandelieu est à 8,75 % de logements sociaux, contre les 25 % demandés par la loi SRU] ne s’analyse pas à l’échelle de ces emplacements mais à l’échelle de l’ensemble de la commune. »