Nice-Matin (Cannes)

Seule face à trois malfrats à Èze : « J’étais tétanisée »

Françoise, 69 ans, a été attaquée un soir de 2017 dans sa villa par trois hommes en noir. Ses oeuvres d’art ont été retrouvées. Sept accusés comparaiss­ent pendant deux semaines aux assises.

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Sept hommes sont assis ce lundi côte à côte, comme à la parade, cheveux courts et chemises blanches, dans le box des accusés de la cour d’assises des Alpes-maritimes. Ils écoutent sagement, attentifs, Françoise, 69 ans. L’azuréenne a été victime d’une attaque perpétrée par trois malfaiteur­s à son domicile d’èze le soir du 19 novembre 2017. Seize ans auparavant, dans la même villa, elle avait déjà subi un home-jacking.

L’enquête rebondit quand la police judiciaire de Nice, alertée par les autorités belges, apprend que des malfaiteur­s tentent de négocier des tableaux volés. Parmi les oeuvres, des estampes signées Picasso, Matisse, une Vierge arménienne, une toile du XVIIIE siècle… propriétés de Françoise et de son mari.

« Entrés à coups de hache »

La découverte par les enquêteurs de la BRB d’une partie du butin chez un couple de Peillon permet d’identifier au fil des mois une équipe de malfaiteur­s.

Les toiles proviennen­t non seulement de la villa de Françoise mais aussi du cambriolag­e d’un appartemen­t à Saint-laurent-du-var en avril 2017. Le couple, libre, comparaît également. Dans le box vitré rempli de policiers, les accusés nient toute participat­ion au vol à main armée à Èze. À l’exception de Bilal Bouchaia, 28 ans, qui, dès l’entame du procès, alors qu’il a gardé le silence pendant ses quatre années de détention, admet avoir participé à ce cambriolag­e. Un vol particuliè­rement traumatisa­nt souligne Françoise : « J’étais sur mon canapé en train de regarder la télévision quand j’ai entendu un bruit terrible… Je ne le souhaite à personne. » « Un fracas », insiste Me Christian Scolari, son conseil. Des inconnus détruisent à coups de hache un fenestron et déboulent dans le salon. Ils sont vêtus de noir, gantés, leur visage masqué par une cagoule. L’un d’eux a une barre de fer à la main. Sans doute un pied-de-biche. Françoise est terrorisée. Tétanisée, elle est incapable d’activer un boîtier d’alerte. Elle reste persuadée qu’à tout moment, elle va être frappée. Les malfaiteur­s l’accompagne­nt à l’étage où elle est sommée d’ouvrir le coffrefort. « L’un d’eux était en train de vider mon secrétaire et envoyait tout en l’air. » Françoise est rattrapée par l’émotion. Elle demande un mouchoir. Elle se souvient avoir ouvert le second coffre avant de remonter dans le salon. Des tableaux ont été décrochés dans l’intervalle. Notamment une Vierge arménienne « offerte par un rescapé du génocide à mon grand-père ». « Une oeuvre d’une grande valeur sentimenta­le. Tout comme les bijoux de maman. Ils ne se rendent pas compte... Il y a beaucoup de souvenirs, d’émotions autour de ces objets. J’ai vraiment besoin de leur dire : quand ils prennent des objets dans ces conditions, ils détruisent aussi des personnes, des familles. » Soutenue et questionné­e par son avocat Me Christian Scolari, Françoise rappelle qu’elle est issue d’une famille de travailleu­rs, qu’elle n’est pas née avec une petite cuillère d’argent dans la bouche.

Ses parents horticulte­urs lui ont légué le terrain où la villa a été édifiée. Son mari, grossiste au Marché d’intérêt national (MIN), accaparé par son entreprise, est peu à la maison.

« Cette fois, j’étais seule »

La nervosité des malfaiteur­s, leur ton agressif, cette barre de fer menaçante... continuent de hanter le quotidien de Françoise, suivie encore aujourd’hui par un psychiatre.

La seconde attaque est, à l’écoute de sa déposition, pire que la première : «En 1993, j’avais trouvé en rentrant chez moi mes enfants ligotés. Je ne pensais qu’à une chose : que les individus partent le plus vite possible. À ce moment-là, je n’existais plus, seuls mes enfants comptaient. Les hommes armés me semblaient plus carrés, moins nerveux. Là, cette fois, j’étais seule...»

Le procès est prévu pour durer au moins dix jours. Les accusés ont tous déjà été condamnés. Certains encourent trente ans de réclusion criminelle.

 ?? (Photo Ch. P.) ?? Le temps fort du procès hier, aux assises, a été le témoignage de Françoise, soutenue par son avocat, Me Christian Scolari. En 2017, elle a été attaquée son domicile à Èze.
(Photo Ch. P.) Le temps fort du procès hier, aux assises, a été le témoignage de Françoise, soutenue par son avocat, Me Christian Scolari. En 2017, elle a été attaquée son domicile à Èze.

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