Dans le Var, des radars pour mesurer les courants
La carte s’étend jusqu’à environ 80 kilomètres au sud de Toulon. Direction le grand large. Représenté par des flèches de couleur, le courant liguro-provençal est calme ce vendredi 20 mai. Tout juste la vitesse s’accélère-t-elle à l’ouest de l’île de Porquerolles : en surface, les masses d’eau s’y déplacent à 47 centimètres par seconde.
Après des années de recherche, de mise en place technique et de progrès théoriques, voici le fruit du travail scientifique du laboratoire de recherche MIO, Institut méditerranéen d’océanologie, grâce à des radars océanographiques, installés dans le Var, qui analysent en continu l’évolution de courants côtiers en Méditerranée
« Au début des années 80, le laboratoire a commencé à travailler sur les premiers radars, explique Charles-antoine Guérin, enseignant chercheur à l’université de Toulon. Au début, nous étions tournés vers des applications purement liées à l’océanographie. Mais aujourd’hui, on peut dire qu’il existe un grand nombre d’applications civiles et environnementales. »
Détection des tsunamis
Ce n’est encore qu’un début. Mieux connaître les courants marins, c’est pouvoir calculer « la dérive d’objets flottants, ou de pollution marine ». Cela permet de prédire les lieux d’échouages de méduses ou, point crucial, de calculer la dérive d’un homme à la mer. «Le but est la connaissance des courants. Il y a beaucoup d’enjeux à comprendre comment évoluent les courants près des côtes, y compris pour les pêcheries », abonde Stephan Grilli, océanologue et professeur à l’université de Rhode Island (États-unis). Le chercheur passe six mois en France, au sein du laboratoire MIO, et donne des cycles de cours à l’université de Toulon. Au fil des ans, « on a compris que ces radars permettaient de compléter les systèmes d’alerte dans la détection des tsunamis », analyse Charles-antoine Guérin. Grâce aux progrès du calcul informatique.
« Après Fukushima, des collègues ont détecté les mouvements qui annonçaient le tsunami, en faisant tourner un algorithme sur les données radar. Depuis, cela a été testé sur des événements en temps réel, au Canada. La capacité de détection s’affine. » Les scientifiques ont développé « des techniques afin de voir un courant à l’échelle de la minute ».
Sur le littoral méditerranéen français, la côte rassemble un jeu de radars océanographiques unique. Le coeur du réseau est installé au fort Peyras, à La Seyne, complété par d’autres radars, au cap Bénat (Bormes-les-mimosas) et sur l’île de Porquerolles.
Des cartes très précises sont élaborées à partir d’un « énorme volume de données collectées ». Stephan Grilli aime àdireque « c’est la beauté d’aller chercher l’ordre dans le chaos ».
◗ Cartographie en temps réel et accès à des archives : www.hfradar.univ-tln.fr
◗ En plus d’aides des collectivités locales et de fonds européens, le programme dépend de financements publics, CNRS, Ifremer, Université de Toulon et d’aix-marseille, etc.
◗ Les données sont accessibles au grand public, gratuitement, sur internet.