« Nous tirons la sonnette d’alarme »
Olivier Guérin, chef du pôle réhabilitation autonomie et vieillissement du CHU de Nice
Avec une hausse de plus de 50 % des cas de Covid-19 depuis une semaine en France, les médecins appellent à la vigilance et à la mobilisation citoyenne. Le professeur Olivier Guérin, membre du Conseil scientifique, chef du pôle réhabilitation autonomie et vieillissement du CHU de Nice, tire la sonnette d’alarme.
Que pouvez-vous dire de la situation en France face à la forte hausse des cas de Covid19?
Nous sommes très vigilants, du fait de la prévalence de BA.5, qui est en forte croissance. On assiste ces jours-ci à une hausse très rapide des cas de Covid-19. Une hausse qui s’explique par la contagiosité très importante de BA.5. Mais la situation n’est pas inquiétante, sauf bien sûr pour les personnes à risques, ce qui correspond aux personnes âgées de plus de 65 ans et les personnes immunodéprimées. Dans les Alpes-maritimes, la situation est similaire au reste de la France, pas plus, pas moins.
Avec BA.5, les symptômes sontils différents ?
On constate que, très souvent, les premiers symptômes sont des maux de gorge, ce qui n’était pas le cas avec BA.1 et BA.2. Après, comme avec les autres variants, les malades sont très fatigués, ont de la fièvre et des maux de tête. En revanche, on a remarqué qu’il y avait davantage de symptômes digestifs comme des vomissements.
La situation est-elle comparable à celle du Portugal où, ces dernières semaines, le variant BA.5 a entraîné une mortalité importante chez les plus de 80 ans ?
Nous regardons attentivement la situation au Portugal, puisque c’est un pays qui a quelques semaines d’avance sur nous. Mais la situation n’est pas vraiment transposable. En France, la population âgée est davantage vaccinée qu’au Portugal. En revanche, avec le conseil scientifique, nous tirons la sonnette d’alarme. Il faut absolument que les personnes à risques fassent leur deuxième rappel, qui correspond à la quatrième dose. On espérait pouvoir attendre un peu mais il ne faut pas prendre de risque. Surtout dans une période où nous connaissons des épisodes caniculaires de plus en plus fréquents, et avec un outil hospitalier délabré, nous avons tous les ingrédients pour que la situation devienne dramatique. Donc il faut absolument, je le répète, que les personnes à risques fassent leur deuxième dose de rappel.
Faut-il à nouveau rendre obligatoire les gestes barrières dans les transports en commun, les entreprises, les supermarchés ?
Tout le monde doit faire attention. Il faut inciter les citoyens à se remobiliser. Je conseille à toutes les personnes à risques de porter un masque en milieu clos. Dans un espace fermé, vous pouvez très bien croiser une personne qui est en train d’incuber la maladie, et vous vous contaminerez de cette manière. Si vous n’êtes pas une personne fragile, mais que vous êtes en contact avec une personne à risques, il faut en effet porter son masque, pour protéger l’autre. De là à rétablir les mesures barrières, c’est une décision du pouvoir politique. Mais n’oublions pas que nous sommes tous responsables.
Les Français auraient-ils oublié l’existence de la pandémie de Covid-19 ?
Oui, c’est tout à fait normal, au bout de deux ans si difficiles. Il y a un phénomène de résilience. On oublie. Mais la Covid-19 revient et va revenir encore. La solution passe par une vaccination de la population à risques, et par la responsabilité individuelle. Si ça se développe, le pouvoir exécutif en tirera les conséquences.
Faut-il réinstaller des vaccinodromes sur l’ensemble du territoire, comme au plus
fort de la pandémie ?
Je ne le pense pas. Le réseau existant suffit, je pense aux médecins de ville et aux pharmaciens.
C’est un système très performant avec un personnel très mobilisé. Et puis les personnes âgées, qui sont les plus concernées par cette dose de rappel, ne sont pas les plus adeptes de ces vaccinodromes : elles préfèrent se tourner vers leur médecin traitant.