Zone de tempête
La Ve République pourrait bien passer les habits de la IVE tout au long des trois prochains mois. Ouverte hier après-midi à l’assemblée nationale, la session parlementaire d’automne va rappeler cette époque lointaine qui voyait le pouvoir législatif mettre sans cesse à mal l’exécutif. Nous n’avons eu en juillet que les prémices de ce nouveau scénario sous haute tension. À force de négociations, notamment avec les députés Les Républicains, le gouvernement réussit alors à imposer ses textes de loi, en particulier les mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat, et la loi de finances rectificative pour 2022, ouvrant 44 milliards d’euros de nouveaux crédits.
Il va en aller tout autrement cet automne. L’assemblée née des législatives de juin, on le sait, n’offre pas de majorité absolue à Emmanuel Macron et son équipe ministérielle. Impossible de passer en force, sauf à recourir à l’article 49.3 de la Constitution dont l’usage est, aujourd’hui, limité à un seul texte hors loi de finances ou de financement de la Sécurité
sociale. La composition de la Chambre des députés fait que, aujourd’hui, Élisabeth Borne, la Première ministre, n’a d’autre issue que de s’en servir pour l’adoption des budgets 2023 de l’état et de la Sécurité sociale. Les cartes politiques sont claires : les formations d’opposition de droite ou de gauche ne sont en aucun cas prêtes à soutenir ces textes qui définissent la politique de l’exécutif pour l’année à venir. En se faisant d’ores et déjà les avocats de la baisse de la dépense publique, Les Républicains ne peuvent se rallier à un budget qui l’alourdit de 60 milliards d’euros et prévoit la création de 10 000 nouveaux postes de fonctionnaires. Quant à la Nupes et le Rassemblement national, ils ont déjà annoncé qu’ils feraient tout pour faire tomber le gouvernement à cette occasion.
Bref, le pouvoir entre dans une zone de tempête qui l’oblige à resserrer les liens des trois formations (Renaissance, Modem et Horizons) qui le soutiennent à l’assemblée et à exiger une présence permanente de
« Les Républicains, avec leurs 61 députés, détiennent la foudre de la censure s’ils décident de la voter »
ses troupes, sauf à courir le risque d’être mis en minorité ou censuré. Son sort dépend surtout des Républicains qui, avec leurs 61 députés, détiennent la foudre de la censure s’ils décident de la voter.
Ils ne le feront pas sur le premier texte que présentera le gouvernement cette semaine, la réforme de l’assurance chômage, que, sans doute, ils soutiendront. C’est une manière pour eux de démontrer qu’ils ne s’opposent pas à tous les projets d’un gouvernement qui, de son côté, va tout faire pour les placer en porte-à-faux et les transformer en fauteurs de troubles. Un jeu de la patate chaude qui pourrait finalement se terminer par... une dissolution. Il y a de la rumba politique dans l’air !