Grand écart
« Dans le principe, un ministre doit quitter le gouvernement lorsqu’il
est mis en examen. » Une déclaration d’intention signée Marine Le Pen, Jean-luc Mélenchon, Olivier Faure ou Éric Ciotti ? Que nenni. Le noble conseil date de 2017 et appartient à Emmanuel Macron,
alors en campagne présidentielle. Le futur chef de l’état jouait à cette époque les chevaliers blancs, histoire de se positionner en garant de la probité en politique, en opposition à son principal rival du moment, François Fillon, et ses démêlés judiciaires. Cinq ans plus tard, le président a tourné casaque. Renonçant à débarquer son ministre de la Justice, Éric Dupond-moretti, mis en examen pour prise illégale d’intérêts et renvoyé devant la Cour de Justice de la République. Tout comme il souhaite garder près de lui à l’élysée son tout-puissant secrétaire général Alexis Kohler, lui aussi mis en examen depuis le 23 septembre pour prise illégale d’intérêts dans le cadre de ses liens supposés avec l’armateur MSC. Au passage, en digne apôtre du « faites ce que je dis, pas ce que je fais », Emmanuel Macron envoie valser la jurisprudence Bérégovoy. En 1992, le Premier ministre socialiste de François Mitterrand fut le premier à appliquer avec Bernard Tapie, ministre de la Ville, la règle tacite d’une démission en cas de mise en examen d’un ministre. Une jurisprudence suivie peu ou prou depuis par tous les exécutifs qui se sont succédé à la tête du pays. Y compris par Emmanuel Macron en personne au tout début de son premier mandat. Le jeune Président allant même plus loin que la jurisprudence initiale, incitant ses ministres François Bayrou, Sylvie Goulard et Marielle de Sarnez à démissionner avant l’ouverture d’enquête ou de mise en examen dans le cadre de l’affaire des assistants parlementaires du Modem. Autre temps, autres moeurs... politiques. Pendant que le Macron 2022 invente une nouvelle jurisprudence en mode « le ministre démissionne s’il est condamné », le leader écologiste Julien Bayou renonce de lui même au poste de secrétaire national de son parti avant toute judiciarisation d’une prétendue affaire de harcèlement moral. Vous avez dit grand écart ?
« En digne apôtre du ‘‘faites ce que je dis, pas ce que je fais’’, Emmanuel Macron envoie valser la jurisprudence Bérégovoy »