Nice-Matin (Cannes)

« Les aidants-tuteurs ne sont pas pris en compte »

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M «a vie privée ? Ouh, c’est un vaste sujet », s’exclame Bernard. Énergique, le Varois de 59 ans rit jaune : « Quand je rencontre une femme et qu’elle voit que je vis avec ma maman… Au début cela se passe toujours bien. Mais ça ne dure pas. Alors, c’est fini pour moi ! »

Rangé des voitures, le Toulonnais se consacre à sa mère de 84 ans, déclarée Alzheimer depuis 2 ans. De cette manière, elle peut rester chez elle, à Trets (Bouches-durhône) : « Mes parents ont toujours été présents pour moi. C’est normal. »

« Constituer les dossiers, la croix et la bannière »

Sauf qu’être aidant, cela prend du temps. Travaillan­t de nuit dans le domaine de l’alimentair­e, il remercie ses années de sport « qui permettent de rester en forme aujourd’hui ». Parce que porter des responsabi­lités sur ses épaules, ça pèse. « Je dors par saccades. Mais ça, ce n’est pas grandchose », coupe-t-il en lançant : « Constituer les dossiers, obtenir des créneaux avec des aides au domicile, ça c’est la croix et la bannière. »

Lui, s’estime chanceux. Parce qu’entouré : « J’ai ma famille, mes copains. » Son conseil à ceux qui aident ou vont aider ? « Ne restez pas seul. »

Un message relayé par la Niçoise Yveline. Depuis un an, elle offre une oreille attentive aux appelants. Bénévole pour la plateforme de soutien aux aidants « Avec nos proches », elle est joignable comme ses soixante consoeurs et confrères : « En parler

(1) est indispensa­ble, ici c’est anonyme. Cela permet d’en dire plus, sans crainte de jugement. » Passée par le statut d’aidante pour sa maman, l’octogénair­e découvre le poids que portent ses interlocut­eurs : « Dans certaines familles, c’est dur. On fait beaucoup de reproches à l’aidant qui se retrouve mal. Il se démène et doit rendre des comptes à ses frères et soeurs. C’est complexe. »

Pire, les vieux démons ressurgiss­ent : « Les anciennes tensions avec les parents ressurgiss­ent des années plus tard ! »

« Une meilleure aide financière »

Alors, pouvoir tout poser sur la table, ça fait du bien. « Quand je sens que cela est nécessaire, je les oriente vers un profession­nel psychologu­e. On ne peut pas serrer les

Oui, ça fait peur. Laetitia Fontecave et Federico Palermiti en ont bien conscience. Respective­ment directrice et conseiller technique au sein de France Tutelle à Nice, ils cherchent à démystifie­r les mesures de protection : « 60 % des tuteurs sont des aidants, ce chiffre en hausse est la résultante de la politique de primauté familiale. » L’objet des appels reçus à l’associatio­n ? « 70 % des personnes nous contactent en amont de toute décision. Ils se demandent si c’est la voie à prendre, ce qui existe, qui doit exercer… »

Des interrogat­ions délicates.

« En cas de désaccords, de conflit, la réponse de la justice va vers un profession­nel. Mais on peut aussi exercer une tutelle à deux membres de la famille. L’un qui se charge de la gestion patrimonia­le, l’autre de la protection de la personne par exemple. »

Un cheminemen­t qui demande

dents et attendre que ça passe. Ça ne marche pas comme ça. »

Les besoins ? Lyliane, de Nice, peut en parler. Son époux a disparu cet été. « On aurait fêté nos 60 ans de mariage », lance cette ancienne infirmière libérale qui a passé 10 ans à s’occuper de lui, fidèlement, tendrement. Désormais, elle peut prendre du du temps : « C’est indispensa­ble pour que la mesure s’exécute le mieux possible. » Ce qui doit guider les choix des tuteurs-aidants ? « L’intérêt du proche. » Une lourde responsabi­lité qui vient peser sur des épaules souvient bien chargées. « Ces aidants ne sont pas visibles. Ils n’ont pas de droits particulie­rs ni de formation spécifique sur ces sujets-là. Certes, les choses bougent, mais cette facette n’est pas prise en compte par les pouvoirs publics. Nous devons les accompagne­r. » Il est également possible d’anticiper et choisir qui fera face à des dilemmes éthiques si le besoin se présente : « Des dispositif­s existent. Sauf qu’ils ne sont pas connus, parce que ce ne sont pas des choses dont on aime discuter en famille. Par exemple, le mandat de protection future permet de désigner les personnes qui pourront avoir la charge d’une tutelle ou curatelle. »

recul. « Il est nécessaire de soutenir le conjoint. Certaines personnes se trouvent dans une situation de précarité. Avoir ne serait-ce qu’un peu d’aisance financière cela peut changer la donne. Pour s’offrir un temps d’évasion… »

1.

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