La justice pousse le président du Département du Var vers la sortie
« Vous avez manqué à votre devoir, vous avez trahi votre fonction d’élu. »
La sanction est tombée comme un couperet, peu après 8 h 30, hier à Toulon.
Le tribunal correctionnel, présidé par Marie-laure Arnouil, a considéré que l’actuel président du conseil départemental du Var s’était rendu coupable d’un détournement de fonds publics en accordant un emploi jugé fictif à Patricia Arnould, entre octobre 2011 et mars 2015, alors qu’il était maire de Carqueiranne.
Marc Giraud a été condamné à 2 ans de prison avec sursis, à 20 000 euros d’amende et à une peine d’inéligibilité de 5 années. Le même sort a été fait à Patricia Arnould, première adjointe au maire de La Crau et conseillère départementale, qui n’a pas convaincu les juges de la réalité de son travail. « Il est intolérable de constater que des élus de la République se comportent ainsi. »
En prononçant « l’exécution provisoire », la juridiction met en péril l’avenir politique du binôme. Un coup de semonce. Cette disposition signifie que la peine d’inéligibilité est applicable même si les personnes condamnées retrouvent leur droit à la présomption d’innocence en interjetant appel – ce que leurs avocats Mes Guisiano et Callen ont d’ores et déjà annoncé. Un second procès se tiendra donc à Aix-en-provence. Si Marc Giraud et Patricia Arnould ne quittent pas leurs fonctions électives par eux-mêmes, les deux élus seront réputés démissionnaires d’office par le représentant de l’état dès que le jugement de Toulon lui aura été signifié, confirmet-on en préfecture.
« Un risque de récidive »
« Une mort politique » , a mis en garde Me René-pierre Guisiano lors du procès qui s’est tenu le 28 septembre. « L’exécution provisoire, cela veut dire que je suis rayé des cartes », a ajouté son client Marc Giraud, sous le choc des réquisitions du procureur de la République, Samuel Finielz. « Les positions de dénégations tenues à l’audience font craindre un risque récidive » ,a asséné le magistrat pour justifier cette sévérité. « Qu’est-ce qui a mis fin à l’infraction pénale ? C’est la justice. Il a fallu attendre l’intervention du service public de la justice et de la police judiciaire. » Philippe Voyenne et Didier Tollard, directeur de cabinet et directeur général des services à l’époque des faits, ont été condamnés pour « complicité » à 2 ans de prison avec sursis et à 20 000 euros d’amende.
Plus souvent à La Crau
L’instruction du dossier a mis en évidence une forme de confusion entre les activités politiques de Patricia Arnould – qui recevait en tant qu’élue les doléances des habitants de la commune et du canton de La Crau – et les tâches de la « référente sociale » qu’elle était au sein du cabinet du maire de Carqueiranne. « J’essaie d’être au service de tous », s’est-elle défendue.
Les enquêteurs avaient trouvé un bureau transformé en débarras à l’hôtel de ville, la géolocalisation de son téléphone portable a montré que Mme Arnould était beaucoup plus souvent à La Crau qu’à Carqueiranne, « l’absence de production » et des témoignages d’employés municipaux sont apparus comme autant d’éléments à charge.
« On n’est pas dans l’affaire Penelope Fillon », a relativisé Me Romain Callen. L’emploi de Patricia Arnould était supporté par les contribuables de Carqueiranne, à hauteur de 1 500 euros par mois. La Ville n’a d’ailleurs pas jugé utile de réclamer la réparation de son préjudice comme le lui permettait son statut de victime.