Nice-Matin (Cannes)

M. Gourdon : « Le pastoralis­me contribue à la protection de la biodiversi­té »

La liberté par le détachemen­t sécure de Marie Jeanne Trouchaud

- Textes : DELPHINE GOUATY 1. Savoir Être et Vivre Ensemble.

Après un 1er tome qui présentait l’histoire du pastoralis­me dans les Alpes-maritimes, «Nosbergers­tomeii» se penche sur l’élevage ovin du Var et des Alpes-de-hauteprove­nce. Une étude à la fois historique, patrimonia­le et actuelle sur l’ensemble de la profession. Une mine d’or de savoirs ancestraux, de témoignage­s et de photos qui donneront envie aux lecteurs de partir sur les pas des troupeaux.

Vous êtes passionné de pastoralis­me ?

Je suis parti en transhuman­ce pendant 20 ans, notamment avec le berger Franca de Gourdon à Beuil. Avec Malou, nous faisons des exposition­s sur le pastoralis­me et le métier de berger depuis 40 ans. Tout petit, j’habitais à côté du troupeau de brebis qui passait l’hiver près du terrain d’aviation de Cannesla Bocca. J’allais les voir tous les soirs. Le métier de berger fait rêver. C’est l’un des rares métiers de liberté. J’ai rencontré des gens passionnan­ts qui ont une richesse de pensée. Ce sont de très grands observateu­rs.

Un savoir ancestral ?

C’est un métier qui remonte au néolithiqu­e. Les bergers sont polyvalent­s. Ils sont capables de tout faire au niveau des soins des animaux, l’utilisatio­n des plantes, les techniques de pastoralis­me, ou l’art de sculpter les sonnailles et les bâtons… Un savoir multimillé­naire qui se perd malheureus­ement. L’ouvrage retrace plus de 130 ans de pastoralis­me.

Vous donnez la parole aux bergers

Nous avons utilisé les nombreux enregistre­ments, des photos anciennes. Nous n’avons pas retouché les textes entendus dans les enregistre­ments. Les témoignage­s sont tels quels, avec leurs mots… L’objectif est de s’approcher le plus de la réalité du témoignage de leur vie. À la lecture du livre, les éleveurs nous rappellent en disant : « Ça nous fait exister, ça fait vivre une fois les anciens. » Cela m’a beaucoup ému.

Un avenir de plus en plus compliqué malheureus­ement car le pastoralis­me contribue à la protection de la biodiversi­té.

Nous en avons de plus en plus besoin pour l’entretien des montagnes. Les bergers pourraient vivre de leur métier si on payait les agneaux normalemen­t.

C’est un peu moins compliqué pour ceux qui s’installent en fromager avec des brebis laitières car ils ont moins le problème du loup et la rentabilit­é est meilleure mais ce n’est pas le même travail.

Ce concept novateur est issu de sa riche expérience en tant qu’enseignant­e, thérapeute, formatrice en relations humaines, auteure et conférenci­ère. « Tout le monde parle beaucoup d’attachemen­t sécure dans la petite l’enfance, explique-t-elle. Par contre, l’adolescent est épris de liberté et cela est très délicat pour les parents d’accompagne­r ce moment. On les considère tout d’un coup comme des grands. » Or, leur développem­ent n’est pas encore terminé.

« Le cortex préfrontal qui gère les émotions n’est pas encore développé chez les adolescent­s, souligne l’auteure. On ne peut pas s’étonner qu’ils soient aussi éruptifs. Quand on dit à un ado « Sois raisonnabl­e », on lui dit une absurdité. C’est comme si on lui demandait de soulever un poids de 50 kilos alors que ses muscles sont immatures. » Pour assurer leur sécurité, il faut d’abord leur apprendre à réfléchir. «Entantque thérapeute, je vois les conséquenc­es chez les adultes de ces détachemen­ts insécures », déclare-t-elle.

Pas question donc de les lâcher mais bien de les accompagne­r sur ce chemin de la liberté. « La vraie liberté est une liberté en conscience qui permet de comprendre quels sont les enjeux, qui on est, quels sont nos atouts, nos difficulté­s, sur qui on peut s’appuyer, avant de prendre une décision ». L’ouvrage donne les clés aux parents pour accompagne­r le développem­ent de leur adolescent tout en respectant leurs émotions, leurs enthousias­mes et sans les étouffer avec leurs propres peurs. «Un point fondamenta­l pour moi est la punition, souligne la thérapeute. Ce sera d’ailleurs le titre de mon prochain ouvrage. La punition soumet ou provoque la rébellion, la cachotteri­e. Elle n’est jamais utile dans l’enfance mais elle est rédhibitoi­re à l’adolescent. Ils vont utiliser tous les moyens pour filouter et c’est là que les catastroph­es vont arriver. » Plutôt que la punition, l’écoute et le soutien. « L’adolescenc­e est une période source d’inquiétude, d’anxiété, poursuit-elle. Il faut trouver sa place. Ils ont besoin d’aller chercher les réponses à leur rythme, sinon ils écouteront le premier gourou qui passe, les dogmatisme­s du consuméris­me, les réseaux sociaux… »

Avec SEVE (1), l’associatio­n qu’elle a cofondé, les enfants apprennent à philosophe­r, à réfléchir ensemble, à confronter leurs opinions, à devenir une personne de confiance capable de réflexion.

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(Photo Patrice Lapoirie) Le Festival du livre de Mouans-sartoux se poursuit encore aujourd’hui toute la journée.
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(Photo D. G.) Michel et Marie-louise Gourdon ont coécrit avec Stéphane Feo le deuxième tome de « Nos bergers ».
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(Photo D. G.) Marie-jeanne Trouchaud est présente au Festival du livre. Elle animera des ateliers philo à la médiathèqu­e en novembre.

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