Nice-Matin (Cannes)

A Antibes, quelles sont ces rues aux noms d’enfer ?

Âmes-du-purgatoire, Asmodée, Pas-du-diable... Des artères de la cité des Remparts ont reçu des noms de baptême pas très catholique­s. En route, pour en savoir un peu plus !

- M.-C. A. mabalain@nicematin.fr

Vous habitez traverse du Pasdu-diable ? Comme c’est étrange. Vous êtes passé par le chemin d’asmodée ? Mais quel démon vous a donc piqué ? En cette période d’halloween, on a emprunté d’étranges chemins de traverses qui ont reçu de drôles de noms de baptême. Des dénominati­ons qui ne dégagent pas vraiment une odeur de sainteté. Pourquoi ? Quelles sont leurs histoires ? On lève une partie du voile (ou plutôt du suaire), mais la vérité est sans doute ailleurs.

Tête de mort tibias croisés...

Passant qui passe sur le chemin des Âmes-du-purgatoire, presse le pas ou recueille-toi devant l’oratoire qui marque la mort, à l’angle de l’actuelle route de Grasse, d’une trentaine d’antibois. C’était, il y a longtemps, un jour de juillet 1536, lors de la guerre entre François Ier et l’empereur Charles Quint. Les impériaux avaient envahi la place forte d’antibes. Gaspard Grimaldi a fui vers Grasse avec une partie de ses hommes mais l’ennemi a barré la route et les Antibois sont tombés. Tête de mort, tibias croisés, larmes en forme de flammes... l’oratoire est macabre à souhait. Mais, il est là pour rappeler la mémoire de ces pauvres hères qui, on l’espère, depuis, ont trouvé le paradis.

Le démon a pignon sur rue

Le chemin d’asmodée débouche sur le chemin des Sables. Qui a pu avoir bien l’idée de donner à une rue le nom d’un démon ? En l’occurrence celui dont la Bible dit qu’il a été vaincu par Tobie, avec l’aide de l’archange Raphaël. Selon la légende, Asmodée tourmentai­t Sara, faisant périr systématiq­uement les hommes qui l’épousaient. Ils tombaient comme des mouches la nuit de noces ! La malédictio­n a pris fin et Tobie a convolé en justes noces avec la belle. Du coup, pourquoi diable baptiser ce chemin Asmodée ? En fait, c’est une villa qui porte ce nom. Et, de fil en aiguille, le chemin a pris le nom de la propriété. Elle est toujours là, La Villa Asmodée ! C’était auparavant un hôtel, acquis dans les années 1930 par l’actrice anglo-allemande Lilian Harvey. Une beauté qui dansait et chantait et a fui le nazisme. Elle a vécu là jusqu’à sa mort en 1968. Aujourd’hui, la villa est devenue une maison d’hôtes. Lilian, elle, repose au cimetière Rabiac. Et on ne sait toujours pas si c’est elle qui a donné ce nom démoniaque à son ancienne propriété.

Dans les pas du diable

Avec ses allures de jardin d’eden, on ne s’attend pas à trouver un passage et une traverse du Pas du diable au cap d’antibes. Les deux existent bel et bien et abritent des demeures et des jardins paradisiaq­ues. Depuis le chemin des Nielles, tous les deux permettent de rejoindre le boulevard du Maréchalju­in, le premier au niveau du port Mallet, le second face à la plage des Ondes. Là, c’est le grand mystère quant à cette étrange dénominati­on. Même Pierre Tosan, auteur du dictionnai­re d’antibesjua­n-les-pins, a fait chou blanc. Nous avons retrouvé sur Internet, la reproducti­on d’un dessin représenta­nt une Villa Pas du Diable, daté de 1886 signé par Alfred Koechlin-schwartz. Alors, il semble que, comme dans le cas de la Villa Asmodée, la propriété a donné son nom au chemin.

Peur bleue

Pas de crainte, en revanche, en traversant le carrefour des Diables Bleus, à quelques encablures de la gare SNCF d’antibes. Ces diables-là étaient faits de chair et de sang. C’était le surnom donné aux chasseurs alpins par les Allemands pendant la guerre de 1418. À cause de la couleur de leurs uniformes et parce que ces soldats ont montré, à maintes reprises, une belle ardeur au combat. C’est pourquoi on retrouve de nombreuses artères en France baptisées en leur mémoire. Comme l’avenue des Diables Bleus à Nice.

Dames blanches

Pour les gourmands, la dame blanche est une glace. Pour les superstiti­eux, c’est un fantôme qui apparaît notamment aux automobili­stes, la nuit, bien sûr, sur des routes isolées... À Antibes, on peut toujours essayer d’en apercevoir une et même deux, avec un peu de malchance. Direction l’avenue des Dames Blanches, qui fait angle avec le Bd Wilson et se prolonge avec l’avenue des Frères Roustan. Selon Pierre Tosan, point de spectres, mais le souvenir de deux femmes qui habitaient une villa en bordure de ce qui était autrefois un chemin privé. « Été comme hiver, elles étaient vêtues de blanc de la tête aux pieds ». Alors, on disait, « c’est le chemin des dames blanches ». Et, le nom est resté.

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(Illustrati­on M.-C.A) Le diable se cache dans les détails, dit-on... A Antibes, certaines rues arborent des noms pour le moins étranges. Superstiti­eux, passez votre chemin !

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